La course automobile au féminin

La course automobile est souvent synonyme d’hommes. Anne Roy a su faire sa place dans la course automobile depuis 18 ans. Cette année elle travaille avec l’équipe du Grand Prix de Trois-Rivières à titre de responsable de la salle de presse.

Cette femme déterminée a travaillé avec plusieurs pilotes au cours de sa carrière. Bruno Spengler, Alexandre Tagliani, Kevin Lacroix, Patrick Carpentier et Jacques Villeneuve, sont quelques-uns des pilotes avec qui Mme Roy a travaillé.

Votre parcours a été difficile?

«Il y a 18 ans, travailler dans un monde d’hommes ce n’était pas évident. J’ai dû m’imposer pour qu’on me respecte. Quand une grande blonde aux yeux bleus comme moi arrive, on ne la prend pas au sérieux. Je devais être très professionnelle et travailler plus fort. J’ai su me faire respecter. Il n’y a pas assez de femmes dans ce monde. Les athlètes ont avantage à être encadrés par une femme droite.»

Comment avez-vous commencé votre carrière dans la course?

«Quand je suis sortie de l’université avec mon certificat en journalisme, j’ai commencé à travailler à RDS. Ça été une excellente école d’apprentissage. Un jour, Patrick Carpentier m’a approché parce qu’il avait besoin d’argent pour pouvoir courir. J’ai travaillé bénévolement avec lui. Je lui ai fixé des entrevues dans des émissions de télévision. Peggy Haas l’a vu à la télévision et lui a offert 1,3 million $ pour lancer sa carrière. La série IndyCar avait entendu parler de ce que j’avais fait pour Patrick. Ils ont voulu que je les aide à faire parler d’eux. C’est comme ça que j’ai commencé en course automobile.»

Que faites-vous exactement?

«Ce que je fais c’est de l’encadrement. J’apprends aux pilotes à être fiers de ce qu’ils font. C’est important le facteur humain. J’ai été agente de communication et je me suis occupée de la promotion et du marketing. Je trouvais que les pilotes avaient besoin de quelqu’un pour les encadrer et leur apprendre à donner de bonnes entrevues et à bien se comporter. IndyCar s’est rendu compte que je travaillais personnellement avec les pilotes. Ils ont aimé ce que je faisais et j’ai continué. Mon poste en tant que tel n’existe pas vraiment.»

Quel est l’ingrédient clef pour réussir dans le domaine? «Il faut être une bonne personne qui travaille avec gentillesse. Il y a une ligne imaginaire qu’il ne faut pas traverser. On ne devient pas l’amie ou la petite amie du pilote. On est la personne ressource qui s’occupe de lui.»

Qu’avez-vous appris aux pilotes?

«J’ai implanté un règlement, le “Golden Rule”. Le pilote ne doit pas garder ses lunettes fumées en entrevue et lorsqu’il rencontre le public. Les yeux sont le miroir de l’âme. Tous les pilotes avec qui j’ai travaillé me disent qu’ils n’oublient pas d’appliquer cette règle. Au fond, je leur apprends les bonnes manières. J’ai donné des techniques d’entrevue. Je leur ai montré l’importance de parler avec leur cœur, de donner de l’émotion. J’ai déjà été journaliste. J’étais bien placée pour donner ces conseils.»

Comment voyez-vous la course automobile?

«Je compare la course automobile à un cirque. On va de ville en ville, on déploie notre équipement et on fait notre spectacle. Ensuite on ramasse tout et on part ailleurs. On est une grande famille, on est ensemble 10 mois par année.»

Le Grand Prix de Trois-Rivières fait bien les choses?

«Oui. Lors d’évènements de course, il ne faut pas miser que sur les voitures. Il faut des activités pour la famille. À Trois-Rivières il y a plein d’activités au centre-ville et sur le site du Grand Prix. Il faut en donner au public pour son argent.»

Comment pourrait-on en faire plus?

«Ce que je suggère c’est qu’à Trois-Rivières on fasse un “ shoot out” deux ou trois mois avant le Grand Prix et qu’on invite des pilotes. À la fin des courses, on choisit le meilleur dans l’ensemble, celui qui a excellé sur la piste et en entrevue. On pourrait offrir une voiture aux couleurs du Grand Prix. Il y a plein de gens qui aimeraient faire de la course, mais qui n’ont pas les moyens. Ça donnerait de la visibilité au Grand Prix et peut-être que ça lancerait la carrière d’un jeune pilote.»

Quel évènement vous a marqué?

«À ma deuxième année en course automobile, j’ai aidé deux pilotes qui s’étaient mis dans le pétrin. Nous étions à Vancouver et à 3h du matin le téléphone a sonné dans ma chambre d’hôtel. Les deux pilotes étaient en prison, ils avaient passé la soirée dans les bars. Je les ai sortis de là. Toutefois, j’ai été bien claire: je ne referai plus ça. Si cette histoire était sortie dans les médias, ces deux pilotes n’auraient plus de carrière aujourd’hui parce que les commanditaires n’acceptent pas ça. Heureusement, ils ont compris.»

Ça été difficile de faire votre place?

«J’ai dû travailler pour être respectée. Je me souviens d’une fois. Je pense que c’était ma deuxième saison dans les courses et je me promenais sur le bord de la piste. Deux mécaniciens étaient au loin et m’ont crié: «Hey blondy! Hey cuty!» Je suis allée les voir et j’ai dit calmement: «Je m’appelle Anne. Pas blondy ni cuty. Ça va me faire plaisir de vous aider si vous avez besoin d’aide, mais appelez-moi par mon prénom!» et je suis repartie. J’ai revu un des mécaniciens il n’y a pas si longtemps et il se rappelait de notre première rencontre. Il m’a dit qu’il respectait comment je lui ai parlé à ce moment.»