Ces professeurs qu’on n’oublie pas!

Mes années de secondaire à la polyvalente L’Escale de Louiseville ont moins marqué mon imagination que celles à l’école primaire. Peut-être parce que j’étais plus vieux. Ce qui ne m’a pas empêché d’écrire une histoire intitulée : « Bugs Bunny s’arrache les tripes! »

Mon professeur de français, Daniel Béland, avait levé un sourcil désapprobateur devant le titre. De mémoire, il ne l’avait pas effacé. De mémoire, la note avait été plutôt belle. De mémoire, Daniel Béland était un professeur plutôt cool. Je l’aimais bien.

Parodie de Robert Charlebois

C’était la fin de l’année scolaire. Nous étions quatre gars. Comme dernier travail, nous devions préparer un oral. Le hasard a voulu que l’on soit les derniers à passer et, à moins de me tromper, c’était la dernière journée de l’année. Alors, nous nous sommes lancé un défi : « Come on, boys! On s’lâche lousse! On fait quelque chose de sauté! Pas grave si nos notes « droppent ». Avoir 61 ou 90 comme note, qu’est-ce que ça change? »

Comme j’aimais beaucoup le Charlebois de l’époque, j’avais décidé d’en faire une parodie. Le gars était tellement sauté qu’on l’appelait « le sauvage» ou « le chanteur fou ». Nous, les quatre gars, avions décidé de simuler une entrevue télé avec Charlebois comme vedette.

Impossible de me faire une tête afro comme Charlebois. Par contre, j’avais les cheveux longs et bouclés. Suffisait de foutre un peu d’anarchie dedans. J’avais le torse nu avec des dessins au feutre en guise de tatouages sur la peau. Une veste de jeans usée entrouverte, une petite guitare à la main et voilà pour le déguisement.

L’entrée dans la classe avait été spectaculaire. Je me tenais agrippé au cadre de porte tandis qu’un des quatre gars, qui jouait le rôle du gérant, me tirait au moyen d’une longue corde que j’avais au cou. Je refusais d’entrer. Souvenez-vous : on surnommait Charlebois le sauvage.

Lip Sync

Au coeur de l’émission, je devais bouger des lèvres et des pieds sur une toune de Charlebois en grattant de la guitare. J’avais choisi « Que-can Blues ». Pendant que la voix de Charlebois chantait, je me suis rendu compte que j’avais choisi une chanson de six minutes. Cinq peut-être. « Idiot! » me suis-je dit en voyant tous ces visages m’observer. Pourquoi ne pas avoir opté pour une toune de deux minutes?

La toune terminée, j’ai sauté sur le bureau du prof et j’ai entonné, « live », la célèbre «Entre deux joints » de Charlebois. Jusqu’à ce que le gérant, confus et s’excusant auprès du prof, me ramène sur le plancher. En tirant toujours sur la corde que j’avais autour du cou.

Le numéro terminé, on s’attendait au pire. Ce fut le contraire. Les applaudissements fusaient.

Daniel Béland, le professeur, a levé un sourcil désapprobateur. La classe a protesté : « Come on, monsieur! C’est la fin de l’année! Et pis c’était drôle! ». Daniel Béland a secoué la tête en souriant. Ce professeur était plutôt cool.

Attention il va sauter!

Ah oui! Toujours au secondaire, il y avait ce professeur de géographie aux yeux de loup. Il faisait des colères terribles.

-Est-ce que la mécanisation de l’industrie a créé ou supprimé des emplois? nous demanda-t-il un jour.

La réponse fut immédiate.

-Elle a supprimé des emplois, monsieur, de crier la classe.

Les yeux de loup du professeur ont lancé des éclairs.

-Gang de niaiseux! J’peux pas croire!

Et il nous a tourné le dos, déprimé. Cela lui arrivait souvent de traiter les élèves de niaiseux ou d’imbéciles.

À bas les capitalistes

Au collégial, j’ai souvenir de quatre professeurs au cegep de Trois-Rivières.

Il y avait ces deux professeurs d’histoire. Durant les cours ou entre deux joints à la brasserie Le Gosier ou ailleurs, ils pourfendaient les capitalistes. Sinon, ils nous faisaient l’éloge de Mao.

-« Mais monsieur, disait-on, les journaux disent que Mao est un dictateur qui a tué des milliers de gens durant la Révolution culturelle.

-Faut pas se fier aux journaux, ils sont au service des capitalistes et des multinationales.

-Oui, mais à la télévision on disait que Mao…

-Fuck la télé! Fuck les journaux! Fuck les médias! Mao est un humaniste, point à la ligne! Cessez de me contredire!

Soulard et Brulotte

Je me souviens de Jean-Claude Soulard. Il nous avait donné un conseil que j’applique scrupuleusement depuis. « Avant de vous engager dans un débat, imaginez les répliques de l’autre et préparez vos réponses immédiatement. Vous ne serez jamais pris de court. »

Merci Jean-Claude.

Et enfin, Gaëtan Brulotte, professeur de littérature fantastique. Je le vois encore entrer dans la classe, poser une fesse sur le bureau et parler à voix basse. Rarement il écrivait au tableau. Il ne faisait que raconter. Nous étions pendus à ses lèvres. Mêmes les gars réputés pour sécher leurs cours ailleurs n’en séchaient aucun avec Brulotte. J’adorais ce professeur.

(Ce commentaire est la suite de l’article Vous rappelez-vous de vos profs? que vous trouverez à lhebdojournal.com, section opinion commentaire)

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-À poil dans les toilettes du curé

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