Une consultation demande plus de détails sur un registre sur l’influence étrangère

OTTAWA — Le gouvernement fédéral indique que les personnes interrogées dans le cadre d’une consultation publique se sont montrées généralement favorables à la création d’un registre de transparence sur l’influence étrangère, mais ont insisté sur la nécessité de clarifier son fonctionnement.

Un résumé de la consultation récemment publié indique que les participants souhaitaient un registre pour définir de manière appropriée qui doit s’y inscrire et pour préciser ce qui relève des activités couvertes.

Sécurité publique Canada a annoncé une consultation en mars sur la manière dont le Canada pourrait mettre en œuvre un registre de transparence en matière d’influence étrangère, à la suite d’une vague d’articles dans les médias sur des allégations d’ingérence étrangère.

Certains États se livrent à de l’ingérence pour promouvoir des objectifs politiques étrangers et peuvent employer des personnes pour agir en leur nom sans révéler leurs liens avec l’État étranger.

Certains pensent qu’exiger de ces personnes qu’elles s’enregistrent officiellement auprès du gouvernement qu’elles tentent d’influencer, avec la possibilité d’amendes, voire de peines de prison en cas de non-respect de cette obligation, peut rendre ces transactions plus transparentes.

Le résumé de la consultation indique que les répondants soutiennent à la fois les sanctions financières et pénales, ainsi que «des capacités d’application adéquates» pour garantir la conformité.

Ils ont également souligné qu’un registre devrait, dans la mesure du possible, éviter une charge administrative excessive pour les déclarants, ajoute le résumé.

Les États-Unis et l’Australie disposent de tels registres, et un système de transparence devrait entrer en vigueur au Royaume-Uni l’année prochaine.

Le rapport sommaire est un aperçu des commentaires de plus de 1000 répondants en ligne et de plus de 80 groupes d’intervenants clés, ainsi que des commentaires publics dans les médias canadiens.

Même si les personnes interrogées «étaient majoritairement favorables» à la création d’un registre, beaucoup ont déclaré qu’il ne s’agissait que d’un outil parmi tant d’autres pour contrer l’ingérence étrangère.

Le résumé indique que les parties prenantes ont exhorté le gouvernement à entreprendre une «réforme structurelle et culturelle» et d’autres amendements législatifs dans le domaine de la sécurité nationale, à poursuivre son programme de sensibilisation auprès des communautés menacées par l’ingérence étrangère et à allouer des ressources supplémentaires pour l’application de la législation existante contre l’ingérence étrangère. 

En vue d’autres mesures, le gouvernement a annoncé vendredi qu’il entamait de nouvelles consultations sur d’éventuelles modifications à la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité, qui régit les services d’espionnage du Canada, ainsi qu’au Code criminel, à la Loi sur la protection de l’information et à la Loi sur la preuve au Canada. 

«Il est essentiel de dialoguer avec les individus et les communautés les plus touchés par les menaces d’ingérence étrangère pour garantir qu’un large éventail de points de vue et d’expertise soit pris en compte lors de l’élaboration de mesures renforcées», a soutenu le gouvernement, par voie de communiqué. 

Il accepte les soumissions en ligne via une page web de consultation jusqu’au 2 février.

«En plus des consultations publiques en ligne, le gouvernement sollicitera également l’avis d’experts, d’intervenants et de groupes communautaires dans le cadre de tables rondes au cours des semaines et des mois à venir.»

Au milieu de fuites dans les médias et de pressions des partis d’opposition, le gouvernement a annoncé en septembre qu’une juge québécoise dirigerait une enquête publique sur les allégations d’ingérence étrangère et sur la capacité du fédéral de régler la question.

La juge Marie-Josée Hogue de la Cour d’appel du Québec examinera l’ingérence de la Chine, de la Russie et d’autres États étrangers et d’acteurs non étatiques.

Des exemptions étroites demandées

Un document de travail préparé pour la consultation définissait un mandant étranger comme «une entité qui est détenue ou dirigée, en droit ou en pratique, par un gouvernement étranger. Cela pourrait, entre autres, inclure une puissance étrangère, une entité économique étrangère, une organisation politique ou un individu ou un groupe ayant des liens avec un gouvernement étranger».

Le résumé indique que les répondants en ligne sont fermement d’accord avec la définition et affirment que les Canadiens ont le droit de connaître l’ampleur de l’influence étrangère, et même des formes légitimes d’influence étrangère, au Canada.

«De nombreuses réponses indiquent que les entités non gouvernementales et les sociétés multinationales devraient également être incluses.»

La grande majorité des parties prenantes était favorable à ce que le registre s’applique à tous les pays, sur la base du principe que la transparence dans les affaires publiques est fortement soutenue par la population, ajoute le résumé.

«En outre, un registre spécifique à un pays pourrait inutilement alimenter l’exclusion raciale et ethnique et aboutir à une « liste noire » plutôt qu’à un moyen de transparence.»

Le document de consultation indique que les activités couvertes pourraient inclure le lobbying parlementaire, le lobbying politique en général et les activités de plaidoyer et de communication. Lorsqu’elles sont exercées pour le compte d’un donneur d’ordre étranger, ces activités pourraient donner lieu à une obligation d’enregistrement.

Certains répondants en ligne ont suggéré que les universitaires bénéficiant de subventions gouvernementales étrangères devraient également être tenus de s’inscrire.

«D’autres ont souligné l’importance de la simplicité. Certaines parties prenantes ont estimé que l’échange d’argent devrait constituer le seuil d’une activité enregistrable», précise le résumé.

«Cependant, un autre intervenant a soutenu que certaines personnes entreprennent des activités d’influence pour des raisons non monétaires, par exemple, pour rechercher un statut plus élevé au sein de leur gouvernement.»

Les groupes de parties prenantes ont fait valoir que les exemptions devraient être aussi étroites que possible pour éviter de créer des failles.

«Les personnes interrogées en ligne étaient majoritairement opposées à l’octroi de toute exemption à l’enregistrement. Parmi la minorité des personnes interrogées favorables à des exemptions, elles préféraient également une liste restreinte.»

Les juristes ont plaidé en faveur d’une exemption pour les personnes qui fournissent des conseils juridiques et une représentation à des gouvernements étrangers, au motif que toute activité juridique liée à la Loi sur Investissement Canada et à la Loi sur la concurrence exige déjà le même type de divulgation.

Les représentants d’un consortium d’universités ont préconisé une exemption pour les activités à prédominance académique ou scolaire, ajoute le résumé.

«Ils souhaitent que la définition de l’exemption inclue les activités d’enseignement et de recherche, y compris la communication des résultats de la recherche par tout moyen. De même, ils souhaitent voir une exemption spécifique pour les efforts de défense des droits des étudiants internationaux et des travailleurs étrangers temporaires.»