Un groupe réclame l’enseignement du génocide des Autochtones au niveau secondaire

OTTAWA — L’Association des femmes autochtones du Canada espère rendre les affreuses vérités sur le génocide actuel des peuples autochtones plus faciles à voir et à comprendre pour les élèves de niveau secondaire grâce à un guide qui pourrait constituer la base de programmes scolaires.

Le groupe a créé un guide illustré facile à lire dans l’espoir qu’il inciterait les politiciens à agir et à mieux éduquer la prochaine génération de Canadiens.

«Nous ne voulons pas que le prochain groupe d’adultes ignore l’existence du génocide. Nous voulons enseigner à nos jeunes», a déclaré la cheffe de la direction du groupe, Lynne Groulx, lors d’une conférence de presse lundi.

De nombreuses personnes ont été choquées et confuses lorsque l’enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées a conclu que le Canada, en tant qu’État, a contribué à un génocide des peuples autochtones, a-t-elle affirmé.

«Ceux qui ne craignent pas constamment pour la sécurité de leurs mères et filles ou sœurs ne peuvent tout simplement pas comprendre comment l’enquête en est arrivée à ses conclusions, et ils ont de la difficulté à reconnaître le génocide ou même à dire le mot» a-t-elle ajouté.

Au cours des quatre années qui se sont écoulées depuis, seuls deux des 231 appels à la justice qui accompagnaient ce rapport ont été mis en œuvre, a souligné Mme Groulx, qui attribue cette «inaction» à un «manque de volonté politique».

Le guide réalisé par l’organisation ressemble à une bande dessinée et expose l’argument juridique selon lequel le Canada a commis un génocide dans des illustrations colorées et simples à suivre. L’artiste Chloé Germain-Thérien dit avoir utilisé l’aquarelle pour ses illustrations afin de faire appel aux émotions du lecteur, ainsi qu’à son côté intellectuel.

L’association prévoit en envoyer un exemplaire à chaque député ainsi qu’aux ministres provinciaux de l’Éducation. Elle dit chercher à «ébranler leur conscience» et à les encourager à agir, en particulier en ce qui concerne la recommandation 11.1 du rapport final de l’enquête, qui appelle les écoles à enseigner aux élèves «les vérités historiques et actuelles sur le génocide contre les peuples autochtones par l’intermédiaire de l’État, les lois, des politiques et des pratiques coloniales».

Le livre de 10 pages dissèque également les éléments mal compris du génocide pour expliquer comment il s’applique au Canada, a déclaré l’avocate Fannie Lafontaine, autrice du livret et qui est également la rédactrice principale d’un rapport supplémentaire sur le génocide pour l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées.

Selon elle, beaucoup ne reconnaissent pas le traitement des populations autochtones comme un génocide parce qu’ils associent le terme à d’autres événements historiques qui se sont déroulés différemment.

«Notre objectif dans le livret, qui, je l’espère, sera enseigné dans toutes les écoles, est que le génocide s’est produit ici au Canada d’une manière différente de, par exemple, l’Holocauste», a-t-elle illustré.

Quand beaucoup de gens pensent à un génocide, ils imaginent des massacres commis par des individus, a-t-elle rappelé lors de la conférence de presse de lundi.  

Dans le cas du Canada, l’État était l’auteur, a réitéré Me Lafontaine.  Plutôt que des massacres uniques, a-t-elle poursuivi, le génocide s’est produit sous la forme d’abus, d’agressions sexuelles, de mauvaises conditions de vie, de stérilisation forcée et de retrait d’enfants de familles pour les placer dans des pensionnats ou les adopter dans des familles non autochtones.  

«Les programmes actuels ne parlent pas de l’histoire autochtone en termes de génocide, a plaidé l’autrice, et cela doit changer pour que la prochaine génération fasse pression publiquement sur les dirigeants politiques pour qu’ils agissent.  Vous ne pouvez pas l’édulcorer. Vous devez dire la vérité.»