Un groupe autochtone réclame le retrait du prix Juno de Buffy Sainte-Marie

Un groupe de femmes autochtones demande que Buffy Sainte-Marie perde son prix Juno pour l’album autochtone de l’année, après qu’un reportage de la CBC ait soulevé des doutes sur l’ascendance de la chanteuse.

«Nous invitons le comité des prix Juno à revoir cette catégorie 2018 et à explorer les moyens de réparer un tort passé. Tous les artistes autochtones de cette catégorie 2018 (…) devraient être reconsidérés pour cet honneur qui leur revient», a déclaré le Groupement des femmes autochtones dans un communiqué, dimanche soir.

Le Groupement des femmes autochtones, qui se décrit comme un groupe de mères, de grands-mères, d’universitaires et de militantes luttant pour mettre fin à la violence coloniale contre les femmes autochtones, a déclaré avoir examiné l’histoire de CBC et regardé l’émission «The Fifth Estate», diffusée vendredi. Il estime que Mme Sainte-Marie a trompé le public sur son origine en tant que «survivante de la rafle autochtone».

Le groupe a déclaré que la tromperie lui avait permis de bénéficier d’un faux récit qui avait induit en erreur des milliers d’Autochtones.

«Nous reconnaissons que Buffy Sainte-Marie a été adoptée traditionnellement par la famille Piapot il y a 60 ans en vertu des lois sacrées cries Wahkohtowin. Nous respectons la vie privée de sa famille, de ses amis, de ses collègues et de ses admirateurs, ainsi que leur décision de continuer à la soutenir et à l’aimer», a déclaré le collectif dans son communiqué.

«Nous comprenons que l’adoption traditionnelle comporte de grandes responsabilités, elle n’autorise personne à revendiquer faussement son identité d’origine autochtone. Être adopté dans une famille et une communauté autochtones n’autorise personne à parler au nom de l’ensemble de notre peuple», ajoute le groupe.

CBC a obtenu l’acte de naissance de Mme Sainte-Marie, qui indique qu’elle est née en 1941 à Stoneham, Massachusetts, d’Albert et Winifred Sainte-Marie. Le document répertorie le bébé et les parents comme étant blancs et comprend la signature d’un médecin traitant.

CBC a déclaré que l’acte de mariage de Mme Sainte-Marie, une police d’assurance-vie et le recensement américain corroborent les informations figurant sur l’acte de naissance.

Des membres de la famille aux États-Unis, dont la sœur cadette de Mme Sainte-Marie, ont également déclaré à CBC que la musicienne n’avait pas été adoptée et n’avait pas d’ascendance autochtone.

Mme Sainte-Marie, 82 ans, a déclaré dans un communiqué la veille du reportage de CBC qu’elle ne savait pas qui sont ses parents biologiques ni d’où elle venait, mais se disait «une fière membre de la communauté autochtone avec de profondes racines au Canada».

La chanteuse a également fourni un affidavit d’un ancien avocat chargé d’examiner son héritage autochtone. L’histoire orale de la Saskatchewan explique que Sainte-Marie est née au nord de la Première nation Piapot d’une femme célibataire «qui ne pouvait pas prendre soin d’elle».

Mme Sainte-Marie entretient des liens anciens et intimes avec ce qu’elle dit être sa communauté natale de Piapot, au nord-est de Regina. Des membres de la communauté ont déclaré que Buffy Sainte-Marie faisait partie de la famille et ont rejeté la présentation par CBC de l’acte de naissance américain du chanteur comme étant un «enregistrement colonial».

Les Juno n’ont pas répondu à une demande de commentaires lundi, mais ont déclaré la semaine dernière qu’ils n’avaient pas vu l’émission «The Fifth Estate» et n’avaient «rien à déclarer».

Mme Sainte-Marie a également reçu de nombreux autres prix notables, dont l’Ordre du Canada en 1997 et un Gémeaux, maintenant connu sous le nom de Prix Écrans canadiens.

Le Bureau du secrétaire du gouverneur général a déclaré dans un communiqué qu’il était au courant du rapport sur l’ascendance de Mme Sainte-Marie, mais ne commentait pas la possibilité que les honneurs soient révoqués.

«Le Conseil consultatif de l’Ordre du Canada examine les candidatures et fait des recommandations de nomination au gouverneur général. Ce même conseil peut également recommander de mettre fin à une nomination.»

Les Prix Écrans canadiens n’ont pas donné de réponse dans l’immédiat.

Note aux lecteurs: La traduction de la citation au cinquième paragrahe a été corrigée. Il fallait lire qu’il s’agissait «des lois sacrées cries de Wahkohtowin», et non «des lois sacrées des Cris de Wahkotowin».