Un camp d’été aide à outiller les jeunes adultes canadiens face à leur avenir

CALGARY — Cole Flanagan ne peut s’empêcher de parler de son expérience dans les Rocheuses canadiennes, où il s’est rendu plus tôt cet été. 

Pour lui, il ne s’agissait pas seulement d’avoir des aventures en montagne. Son périple l’a aussi mené à aborder des questions telles que les changements climatiques, la santé mentale et la réconciliation avec les peuples autochtones.

«C’était parfois très lourd, relate le jeune de 21 ans originaire du sud de l’Ontario. Il y avait beaucoup d’émotions. Il y avait beaucoup de gens qui traversaient des situations de vie assez difficiles, et tout le monde s’est réuni et a partagé, ri et pleuré.»

L’un des moments les plus riches en émotions, se souvient-il, a été une visite dans un ancien pensionnat pour enfants autochtones en Alberta, où des survivants ont partagé leurs histoires et parlé de traumatismes intergénérationnels.

Cole Flanagan participait à Howl, un programme qui offre aux jeunes âgés de 17 à 30 ans l’occasion d’apprendre auprès de gardiens du savoir, de scientifiques et d’experts en bien-être autochtones. Ce programme est offert sous forme de camps, allant d’un séjour d’une semaine à des semestres de trois mois, dans les Rocheuses, les Maritimes et le Yukon.

La vie après l’école secondaire

Adam Robb, fondateur et codirecteur des camps, a créé le programme pendant la pandémie de COVID-19 après avoir été enseignant au secondaire à Calgary pendant 15 ans.

«Je donnais des cours en ligne de chez moi et je regardais les jeunes à la maison, essayant de me connecter avec eux et de les aider à traverser une période assez isolée», raconte-t-il.

«Cela faisait longtemps que je mijotais sur cette question de ce qui arrive aux jeunes après qu’ils aient quitté l’école secondaire. C’est une grande question à laquelle nous ne réfléchissons pas assez en détail», estime-t-il.

Au Canada, dit-il, les élèves du secondaire vont généralement au collège ou à l’université, voyagent ou restent à la maison et économisent de l’argent.

Statistique Canada a établi dans un rapport de mai 2022 que 12,5 % de ceux qui se sont inscrits plus tard dans un établissement postsecondaire ont pris une année sabbatique.

M. Robb a remarqué un besoin croissant pour les jeunes d’acquérir une certaine expérience de la vie avant de prendre des décisions concernant leur avenir.

«Jamais auparavant, comme au cours des quatre ou cinq dernières années en tant qu’enseignant, autant d’étudiants ne sont venus me voir inquiets de choses comme le changement climatique, inquiets de grandes choses sociétales … comme Black Lives Matter et Vérité et Réconciliation, souligne-t-il. Ils ressentent juste cette immense anxiété face à l’état des choses.»

Howl leur offre l’expérience d’agir et de faire de leur communauté un meilleur endroit, croit son fondateur.

«Où votre jeune non autochtone typique va-t-il apprendre à développer des relations avec les peuples autochtones? demande M. Robb. Les jeunes veulent des réponses sur la façon d’aller de l’avant avec cela de manière concrète, mais ils n’en ont pas les opportunités.»

Soutenir les jeunes

Le codirecteur de Howl, Daryl Kootenay, un chef autochtone de la Première nation Stoney Nakoda, s’est impliqué dans le programme parce que cela correspondait au travail qu’il faisait dans sa communauté.

«J’ai moi-même suivi un programme similaire à Howl dans les pays en développement qui m’a amené à être le leader que je suis aujourd’hui, rapporte-t-il. J’ai toujours été quelqu’un qui voulait aider les autres à faire de même.»

M. Kootenay voit dans le programme une chance d’atteindre plus de jeunes, y compris ceux des communautés autochtones, en offrant un espace sûr pour apprendre à travers les connaissances traditionnelles et occidentales.

«Mon approche est que cela fonctionnera sur tous les jeunes, cela soutiendra tous les jeunes», dit-il.

M. Kootenay, également membre du corps professoral en leadership autochtone au Banff Centre, a déclaré qu’il existe des programmes sur la réconciliation pour les adultes, mais pas beaucoup pour les jeunes.

Howl, dit-il, «fait suite à certains des appels à l’action par le biais de l’éducation et de la sensibilisation des jeunes, qui en ont le plus besoin».

Comprendre les traumatismes

La réconciliation et le traumatisme sont complexes pour les jeunes autochtones, ajoute M. Kootenay.

«(Certaines victimes) ne sont même pas prêtes à partager leur expérience avec leur propre famille, souligne-t-il. En créant ce programme où nous vous emmenons voir un pensionnat — pour entendre des survivants des pensionnats qui sont prêts à partager leur histoire — approfondit leurs connaissances.»

Certains jeunes, ajoute-t-il ne pensent pas qu’ils sont exposés à un traumatisme intergénérationnel, mais quittent le programme avec une compréhension qui les aide à le reconnaître dans leur propre famille ou communauté.

«Cela les aiderait à être en mesure de prendre de meilleures décisions lorsqu’ils construisent une communauté et font partie de la communauté», estime le co-directeur

Apprentissages

Les participants au programme ont déclaré avoir beaucoup appris.

«J’ai assurément une nouvelle appréciation des luttes auxquelles sont confrontés les peuples autochtones et du manque de soutien dont ils bénéficient de la part de la communauté au sens large», note Cole Flanagan.

«Je ne connaissais pas beaucoup d’Autochtones avant le voyage, comme presque zéro, et devenir ami avec les habitants et les membres du personnel de Howl qui sont autochtones et entendre certaines de leurs histoires et ce qui se passe dans leurs communautés était très éclairant», commente-t-il.

Ally Macdonald, 26 ans, a participé à Howl en tant que participante et membre du personnel à temps partiel. Elle a appris des aînés autochtones ainsi que d’experts en ressources naturelles ou en conservation, et s’est liée d’amitié avec d’autres participants.

«C’était un espace sûr que nous partagions tous, relate-t-elle. Certaines personnes n’ont jamais eu de lien avec leur culture auparavant et ce qui s’en est le plus rapproché pour elles.»

Mme Macdonald a déclaré que Howl lui avait également appris la culture autochtone, qu’elle peut transmettre à sa fille, qui est en partie inuite.

«Je n’ai aucun lien avec sa famille, déplore-t-elle. Je ne veux pas qu’elle ait l’impression d’être déconnectée à un moment donné. Je veux qu’elle grandisse et sache que j’ai fait tout ce que j’ai pu.»

La jeune femme encourage d’autres à prendre part au programme, notant que les organisateurs facilitent la tâche à ceux qui sont intéressés.

«Ils savent que cela fera de bonnes choses pour vous et, si ce n’est pas tout de suite, cela vous incitera à vouloir en faire plus», résume-t-elle.