Tuerie en N.-É.: un officier de la GRC à la retraite témoigne, avec aménagements

TRURO, N.-É. — La commission d’enquête sur la tuerie de 2020 en Nouvelle-Écosse entend jeudi le témoignage d’un officier de la GRC à la retraite, qui a obtenu des aménagements spéciaux pour s’assurer qu’il ne soit pas traumatisé à nouveau en ayant à revivre l’événement tragique.

Après près de 40 ans de service, le sergent d’état-major Al Carroll, de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), était à un mois de prendre sa retraite, le 18 avril 2020, lorsqu’il a été appelé au détachement de Bible Hill, en Nouvelle-Écosse, où il a été parmi les premiers à apprendre qu’un «tireur actif» sévissait à Portapique.

M. Carroll répond aux questions par visioconférence, et la commission d’enquête a accepté de lui permettre de prendre autant de pauses qu’il le souhaite. À titre d’ancien commandant de district du comté de Colchester, M. Carroll est le premier officier de la GRC à témoigner avec des aménagements spéciaux, mais il ne sera pas le dernier.

Les trois commissaires de l’enquête ont convenu mardi d’accorder des accommodements à deux autres officiers de la GRC. Ils ont été informés qu’ils n’auraient pas à subir le contre-interrogatoire des avocats qui représentent les proches des 22 victimes. Cette décision a incité plusieurs avocats à boycotter les audiences de mercredi, puis celles de jeudi.

À l’extérieur de la salle d’audience, à Truro, une dizaine de personnes ont organisé jeudi matin une manifestation sur le trottoir, la plupart portant des pancartes bricolées.

Parmi les manifestants se trouvait Charlene Bagley, dont le père, Tom, a été mortellement abattu par le tireur tôt le 19 avril 2020, alors qu’il se promenait à West Wentworth.

«Les familles ont assez patienté, a-t-elle dit. Nous voulions des réponses et nous voulions la vérité (…) Avec l’annonce des aménagements de cette semaine, cela montre simplement que nous n’obtiendrons probablement jamais cela.»

Mme Bagley estime que l’approche de l’enquête tenant compte des traumatismes est erronée. «Trauma pour qui? Ils ne pensent pas aux autres personnes impliquées et à leur traumatisme – juste aux policiers. Leur traumatisme semble l’emporter sur celui de tous les autres.»

L’enquête a appris que la tuerie avait commencé vers 22 h, le 18 avril 2020, à Portapique. Après avoir battu et ligoté sa conjointe, le tueur a commencé à tirer sur des voisins et à mettre le feu à leur maison. Déguisé en policier de la GRC et conduisant une réplique d’autopatrouille de la police fédérale, il a ensuite tué 13 personnes à Portapique, avant de quitter la région. 

Le lendemain, le tireur a tué neuf autres personnes alors qu’il parcourait plus de 100 km à travers le nord et le centre de la Nouvelle-Écosse. L’enquête a appris que le tireur, Gabriel Wortman, technicien en prothèses dentaires âgé de 51 ans, a été abattu par deux policiers de la GRC juste avant 11 h 30, dimanche matin, alors qu’il s’était arrêté à une station-service au nord d’Halifax pour faire le plein d’une voiture volée.

La semaine dernière, l’enquête a publié un résumé des preuves qui indiquait une confusion considérable quant à savoir qui était responsable de l’opération de la GRC cette nuit-là. La commission d’enquête a également entendu des témoignages, la semaine dernière, sur le «chaos dans les communications» qui s’est ensuivi lorsque les radios bidirectionnelles de la GRC ont été submergées par trop de trafic.

La question de savoir qui était responsable lors de ces premières heures cruciales avait déjà été abordée dans un rapport sur la santé et la sécurité au travail, qui a révélé que la GRC avait enfreint le Code du travail fédéral en ne s’assurant pas que ses employés avaient la supervision nécessaire.

Lors d’une audience d’enquête le 19 mai, le président de la commission, Michael MacDonald, a demandé à un autre sergent d’état-major, Steve Halliday, s’il aurait été préférable qu’une seule personne soit responsable la première nuit.

«Je suis d’accord avec vous qu’une personne (devrait être responsable), dans la mesure du possible, a déclaré M. Halliday, reconnaissant qu’au moins trois autres officiers de la GRC donnaient des ordres le premier soir. «Mais avec les opérations de police, il y a parfois une tendance à être plusieurs personnes, et cela peut créer des problèmes (pour savoir) qui est en charge (…) et bloquer les communications radio.»