Transport collectif: Québec obtiendra exactement le contraire de ce qu’il dit vouloir

MONTRÉAL — Le transport collectif sera entraîné dans une «spirale vers le bas» qui sera tout à fait contraire à ce que le gouvernement Legault dit vouloir réaliser si celui-ci maintient sa décision de ne pas financer le manque à gagner des sociétés de transport.

Devant un parterre de gens d’affaires réunis par la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, lundi, le président du conseil d’administration de la Société de transport de Montréal (STM), Eric Alan Caldwell, a cherché à démontrer que le manque à gagner des sociétés de transport, «ce n’est pas un déficit», mais bien une décision d’offrir un certain niveau de service.

Chiffres à l’appui, M. Caldwell a démontré que la baisse d’offre de service de 5 % survenue entre 2011 et 2018 avait entraîné une baisse équivalente de 5 % de l’achalandage et que le rehaussement subséquent de 5 % de l’offre de service s’était traduit par une augmentation identique de l’achalandage.

«Si on veut que les gens prennent plus le transport en commun, il faut investir dans l’offre de service. Les gens veulent de la fréquence», a-t-il martelé.

Menace sur le financement

Or, la ministre des Transports, Geneviève Guilbault, menace de ne couvrir que 20 % du déficit des sociétés de transport, ce qui ne représente que 70 millions $ sur les quelque 350 millions $ dont la STM a besoin pour boucler son budget tout en maintenant l’offre de service actuelle. Cette menace plane sur l’ensemble des services de transport collectif municipaux de la province.

Une telle décision aurait l’effet contraire de ce que prétend vouloir le gouvernement Legault dans son discours de décarbonation des transports, affirme M. Caldwell. «Ça, c’est la spirale vers le bas. On tire vers le bas. Si on dégrade l’offre de service, on a moins de clients, on a moins de revenus, on tire le service vers le bas. On l’a vu: un investissement dans l’offre de service est générateur d’achalandage. Si on veut tirer vers le haut, il faut faire le choix d’investir dans l’offre de service.»

Accompagnant M. Caldwell, la directrice générale de la STM, Marie-Claude Léonard, a fait valoir que l’hypothèse d’un métro qui cesse ses activités à 23h00 n’est qu’une des «hypothèses théoriques qu’on a travaillées pour regarder ce serait quoi des pistes d’envergure si on avait à réduire le service. Ce n’est pas ça qu’on veut faire.»

Mme Léonard a rappelé que 85 % des dépenses de la STM sont consacrées aux opérations et que 70 % du budget d’exploitation représente de la masse salariale. La STM dit avoir réalisé de nombreuses compressions au cours des dernières années dans tout ce qui touche le côté administratif. 

«On ne peut avoir de demi-chauffeur»

Il y a toutefois des limites, dit Eric Caldwell. «Quand on conduit un autobus, on ne peut pas le faire avec un demi-chauffeur. Ça prend un chauffeur pour conduire un autobus pour ajouter de la fréquence. Il faut investir dans l’offre de service pour avoir plus d’achalandage», martèle-t-il.

Le président de la Chambre de commerce, Michel Leblanc, ne s’est fait pas fait prier pour appuyer ces propos: «Pour le milieu des affaires, un système de transport collectif performant est une condition absolument nécessaire à notre prospérité économique.»

Le milieu des affaires s’installe, dit-il, «là où il y a des facilités d’accès pour le personnel, pour les clients». Faisant référence à un éventuel REM de l’Est, ou toute autre amélioration du transport en commun dans ce secteur de la métropole, Michel Leblanc a été catégorique: «Il n’y aura pas d’investissements majeurs dans l’Est si on n’est pas capable de répondre à la question: comment les employés vont-ils s’y rendre en transport collectif?»