Traité Petapan: Québec n’a pas respecté sa promesse de conclure à la date prévue

Québec a finalement raté l’échéance du 31 mars pour conclure le Traité Petapan avec trois communautés innues de la Côte-Nord et du Saguenay-Lac-Saint-Jean.

Ottawa et les chefs des Premières Nations d’Essipit, de Mashteuiatsh et de Nutashkuan ont annoncé vendredi avoir conclu leurs négociations, comme prévu, à la date butoir. Mais, malgré les promesses du premier ministre François Legault durant la campagne électorale et celles, en janvier dernier, de son ministre responsable des Relations avec les Premières Nations et les Inuits, Ian Lafrenière, Québec demeure à l’écart, disant avoir encore besoin de temps, du moins pour l’instant.

«Il y a quand même beaucoup d’avancées avec le Québec. Leurs négociateurs ont mis beaucoup d’efforts, mais effectivement, il restait quelques enjeux qui malheureusement n’ont pas été adressés, ce qui fait en sorte que le Québec n’a pas été au rendez-vous dans le dernier droit. C’est un peu décevant», a laissé tomber le chef de Mashteuiatsh, Gilbert Dominique, en entrevue avec La Presse Canadienne.

40 ans de négociations

On peut comprendre sa déception de voir Québec demander encore un peu de temps, alors que les négociations en vue d’en arriver au projet de traité se sont amorcées il y a 40 ans et que l’entente de principe initiale date, elle, de 2004.

Mais Gilbert Dominique ne lance pas l’éponge pour autant, surtout après avoir attendu aussi longtemps. «C’est un projet de société qui nous apparaît fondamentalement important et on espère que le Québec va nous envoyer le signal que, malgré qu’il n’était pas au rendez-vous au 31 mars, malgré qu’ils ont besoin d’un peu de temps pour finaliser leur réflexion, on va souhaiter qu’ils nous déposent au cours des prochaines journées une proposition qui nous permettrait au moins d’avoir une idée de leurs enjeux et de pouvoir penser qu’on est en mesure d’avoir un texte de traité complet.» 

Mais les trois communautés innues, qui regroupent quelque 12 000 citoyens, n’attendront pas Québec pour passer à la prochaine étape, qui est de donner toute l’information à leurs commettants en lien avec ce projet de traité de plus de 300 pages. Ultimement, le projet sera éventuellement soumis à un référendum.

Fin de la Loi sur les Indiens 

Le Traité Petapan est l’un des plus importants documents du genre depuis la Convention de la Baie James ou la Paix des Braves, mais représente aussi une approche novatrice en matière de relations entre les gouvernements du Québec et du Canada et les Premières Nations. 

Il soustrait les trois communautés à la Loi sur les Indiens, leur accorde le droit à l’autodétermination et reconnaît leurs droits ancestraux, y compris le titre ancestral sur le territoire, avec des modalités d’exercice convenues.

Les initiateurs de ce projet de longue haleine font valoir que le Traité Petapan ne contient aucune extinction de droit et n’affecte pas les droits des autres Premières Nations.

Dans sa forme actuelle, le projet comprend 23 chapitres et aborde entre autres les questions de patrimoine et de culture, du régime territorial propre aux Premières Nations. Il confère aux trois communautés l’autonomie gouvernementale, la pleine gestion des activités traditionnelles. Il aborde aussi la question de l’environnement, des arrangements financiers et du développement socioéconomique.

Le dossier des arrangements financiers est traité de façon à clore les litiges, a expliqué le chef Dominique. «Nous donnons une quittance aux différents gouvernements sur tous les dommages passés parce que dans le traité il y a, bien sûr, la reconnaissance des dommages et il y a, bien entendu, compensation pour les dommages passés. Ces fonds proviennent beaucoup du fédéral. Il y a des enjeux avec le Québec qui n’ont pas été encore abordés.» 

Une inspiration pour les autres

Les six autres communautés innues du Québec – Uashat mak Mani-utenam, Unamen Shipu, Pakua Shipu, Matimekush, Ekuanitshit et Pessamit – qui étaient sur la ligne de départ il y a quatre décennies, ont abandonné en cours de route après avoir perdu foi en un aboutissement quelconque. 

Qu’à cela ne tienne, dit Gilbert Dominique, elles pourraient très bien bénéficier du travail des trois autres. «Les communautés de la nation innue pourraient proposer au Québec et au Canada de l’utiliser. Je pense que c’est possible que les autres communautés de la nation innue s’en inspirent pour pouvoir appliquer des modalités dans leurs propres négociations», un souhait qui requiert toutefois que Québec vienne remplir ses promesses pour pouvoir être exaucé.