Syndicats: la pénurie d’employés menace les services publics

QUÉBEC — La grave pénurie de personnel observée dans divers ministères menace directement la qualité des services publics offerts à la population, selon plusieurs syndicats d’employés de l’État québécois.

Certains estiment que le problème a pris une telle ampleur qu’il fait craindre un démantèlement de l’État, qui serait orchestré en douce par le gouvernement Legault.

Au total, cinq centrales syndicales regroupant quelque 40 000 employés du secteur public ont tenu à joindre leur voix, lundi, pour sonner l’alerte en réclamant du gouvernement Legault qu’il procède à l’embauche des milliers de fonctionnaires nécessaires, selon eux, au bon fonctionnement de l’État québécois.

Réunis en conférence de presse à Québec, ils ont dit souhaiter une rencontre avec la présidente du Conseil du trésor, Sonia LeBel, afin de la sensibiliser le plus rapidement possible à leurs revendications. Et ils espèrent que le ministre des Finances, Eric Girard, aura une bonne pensée pour les fonctionnaires dans son budget du 22 mars.

Selon eux, à titre d’employeur, le gouvernement du Québec ne semble pas voir la gravité de la situation, ni reconnaître qu’il a de plus en plus de difficulté à attirer et retenir du personnel qualifié dans un nombre élevé de domaines, qu’il s’agisse de psychologues, ingénieurs, informaticiens, agents de la faune, agents des services correctionnels ou autres. Résultat: le Québec se prive d’une précieuse expertise dans plusieurs secteurs d’activité.

Les cinq syndicats en question sont le Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec (SFPQ), le Syndicat des professionnels (SPGQ), l’Association des ingénieurs (APIGQ), le Syndicat des agents de la paix en services correctionnels (SAPSCQ-CSN) et le Syndicat des agents de la protection de la faune (SAPFQ).

Selon eux, l’ampleur actuelle de la pénurie de main-d’oeuvre au sein de la fonction publique québécoise force le gouvernement à recourir «de façon disproportionnée» à la sous-traitance. 

Ils notent qu’environ un millier de postes sont vacants en informatique dans l’appareil gouvernemental et des centaines d’autres au ministère des Transports seulement, qu’on pense aux ingénieurs.

Au ministère des Transports, justement, cela se traduit notamment par un manque de surveillance des chantiers de construction, une lacune qui va à l’encontre des conclusions de la Commission Charbonneau, soucieuse de rappeler l’importance de maintenir une expertise de surveillance à l’interne pour éviter tout dérapage, ont-ils déploré en choeur.

Au nouveau ministère délégué à la transformation numérique du gouvernement, dirigé par le ministre Éric Caire, le tiers des besoins de main-d’oeuvre a été confié à des firmes externes en sous-traitance. 

La présidente du SPGQ, Line Lamarre, ne cache pas son inquiétude. «Est-ce qu’on est en train de voir un gouvernement qui se dit: plus il y aura de sous-traitance, moins il y aura de gens dans l’État, plus l’État sera léger? Est-ce qu’on s’en va vers ça: un réel démantèlement de l’État?», s’est-elle interrogée.

Mme Lamarre voit dans cette façon de faire du gouvernement une «non-volonté d’embauche réelle», qui s’appuie sur des conditions de travail et salariales moins alléchantes qu’au secteur privé.

Autre exemple: au ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs, le syndicat déplore le trop petit nombre d’agents de la faune disponibles sur le terrain, ce qui ouvre la porte au braconnage. Les agents de la faune seront bientôt «une espèce en voie de disparition» au Québec, craint le président du SAPFQ, Martin Perreault.