Submersible disparu dans l’Atlantique: course contre la montre engagée mardi

Un véhicule sous-marin a rejoint mardi les recherches dans une zone reculée de l’océan au sud de Terre-Neuve pour retrouver un submersible qui a disparu avec cinq personnes à bord, lors d’une plongée vers l’épave du Titanic, le paquebot emblématique qui a coulé il y a plus d’un siècle.

Les recherches, dans une zone située à environ 700 kilomètres au sud de Saint-Jean de Terre-Neuve, constituent une course contre la montre pour retrouver le navire qui a entamé sa descente vers le fond de l’océan dimanche avec une réserve d’oxygène de 96 heures.

Le capitaine Jamie Frederick, de la Garde côtière des États-Unis, a estimé qu’il restait environ 40 heures d’oxygène à l’équipage du Titan.

«À ce jour, les efforts de recherche n’ont donné aucun résultat», a déclaré le capitaine Frederick, lors d’un point de presse mardi après-midi. 

Il a précisé que le câblier Deep Energy, battant pavillon des Bahamas, se trouvait dans la zone de recherche avec le navire de surface du Titan, le Polar Prince. Il effectuait des recherches à l’aide de son véhicule sous-marin téléguidé.

Ce dernier a des capacités limitées, mais il est équipé d’une caméra, a mentionné le capitaine Frederick. «Ils ont commencé une plongée avec le véhicule sous-marin téléguidé à la dernière position connue du Titan, à l’emplacement approximatif de l’épave du Titanic. Cette opération est en cours.»

En outre, un avion de patrouille Aurora de l’Aviation royale canadienne effectue une surveillance aérienne, tandis que plusieurs avions militaires Hercules et un autre Aurora sont attendus sur les lieux plus tard dans la journée et dans la soirée. 

Le capitaine Frederick a indiqué que le navire John Cabot de la Garde côtière canadienne devait arriver mardi soir et que plusieurs autres navires des garde-côtes canadiens et américains étaient en route. Du matériel de sauvetage lourd de l’armée américaine devrait également être acheminé par avion à Saint-Jean avant d’être transporté vers la zone de recherche, a-t-il ajouté.

«D’un point de vue logistique, il est difficile d’apporter des ressources. Il faut du temps, il faut de la coordination et nous avons affaire à une recherche en surface et à une recherche souterraine, ce qui rend l’opération incroyablement complexe», a-t-il déclaré.

Le lieutenant-commandeur Len Hickey, du Centre conjoint de coordination des opérations de sauvetage, à Halifax, a indiqué que le NCSM Glace Bay de la Marine royale canadienne se rendait également sur les lieux avec une équipe médicale spécialisée dans la médecine de plongée, mais que son arrivée n’était pas prévue avant jeudi midi.

Deux systèmes de communication

Le submersible en fibre de carbone, qui fait partie d’une mission d’OceanGate Expeditions, transportait un pilote, un aventurier britannique de renom, deux membres d’une famille d’entrepreneurs pakistanais emblématique et un expert du Titanic. Les autorités ont signalé que le navire manquait à l’appel dimanche soir, à environ 700 kilomètres au sud de Saint-Jean de Terre-Neuve, selon le Centre commun de coordination des opérations de sauvetage du Canada.

Le journaliste de CBS News David Pogue, qui s’est rendu à l’épave du Titanic à bord du Titan l’année dernière, a expliqué que le vaisseau utilise deux systèmes de communication: des messages textuels qui vont et viennent vers un navire de surface et des signaux de sécurité qui sont émis toutes les 15 minutes pour indiquer que le submersible est toujours en état de marche.

Ces deux systèmes se sont arrêtés environ une heure et 45 minutes après l’immersion du Titan.

«Il n’y a que deux possibilités. Soit ils ont perdu toute leur puissance, soit le navire a développé une brèche dans la coque et il a implosé instantanément. Dans les deux cas, il n’y a aucun espoir», a déclaré M. Pogue à la chaîne CBC mardi.

Le submersible disposait de sept systèmes de secours pour remonter à la surface, notamment des sacs de sable, des tuyaux de plomb qui tombent et un ballon gonflable. L’un de ces systèmes est conçu pour fonctionner même si toutes les personnes à bord sont inconscientes, a précisé M. Pogue.

Contrairement aux sous-marins qui quittent le port et y reviennent par leurs propres moyens, les submersibles ont besoin d’un navire pour être mis à l’eau et récupérés. OceanGate a engagé le Polar Prince pour transporter des dizaines de personnes et le submersible jusqu’au site de l’épave dans l’Atlantique Nord. Le submersible devait effectuer plusieurs plongées au cours d’une même expédition.

Identité des passagers

Les autorités n’ont pas encore formellement identifié les personnes à bord, bien que certains noms aient été confirmés.

L’homme d’affaires britannique Hamish Harding, qui vit à Dubaï, aux Émirats arabes unis, était l’un des spécialistes de la mission, selon Action Aviation, une société dont M. Harding est le président. Le directeur général de la société, Mark Butler, a déclaré à l’AP que l’équipage était parti vendredi.

M. Harding est un aventurier milliardaire qui détient trois records du monde Guinness, dont celui de la plus longue durée en pleine profondeur océanique pour un navire avec équipage. En mars 2021, il a plongé avec l’explorateur Victor Vescovo jusqu’à la plus grande profondeur de la fosse des Mariannes. En juin 2022, il est allé dans l’espace à bord de la fusée New Shepard de Blue Origin.

Des ressortissants pakistanais, Shahzada Dawood et son fils Suleman, se trouvaient également à bord, selon une déclaration de la famille envoyée à l’AP. Les Dawood appartiennent à l’une des familles les plus en vue du Pakistan. Leur société éponyme investit dans tout le pays dans l’agriculture, l’industrie et le secteur de la santé.

Shahzada Dawood fait également partie du conseil d’administration de l’Institut SETI, établi en Californie, qui se spécialise dans la recherche d’intelligence extraterrestre.

L’explorateur français et expert du Titanic Paul-Henry Nargeolet était aussi à bord, selon David Gallo, conseiller principal pour les initiatives stratégiques et les projets spéciaux à la RMS Titanic. M. Gallo a identifié M. Nargeolet, un ami qui a mené de nombreuses expéditions sur le Titanic, mardi lors d’une entrevue avec CNN.

Stockton Rush, PDG d’OceanGate Expeditions, qui possède le submersible, fait également partie de l’équipage, a confirmé mardi un porte-parole de la société.

L’expédition était le troisième voyage annuel d’OceanGate visant à étudier la détérioration du Titanic, qui a heurté un iceberg et coulé en 1912, tuant tous les passagers et membres d’équipage, à l’exception de 700 d’entre eux, sur un total d’environ 2200. 

L’expédition devait partir de Saint-Jean, à Terre-Neuve, au début du mois de mai et se terminer à la fin du mois de juin, selon les documents déposés par la société en avril auprès d’un tribunal de district américain en Virginie qui supervise les affaires relatives au Titanic.

Les expéditions d’OceanGate sur le site de l’épave du Titanic comprennent des archéologues et des biologistes marins. La société fait également appel à des personnes payantes, appelées «spécialistes de mission», qui se relaient pour faire fonctionner l’équipement sonar et effectuer d’autres tâches dans le submersible de cinq personnes.

Le site web d’OceanGate décrit les «frais de soutien à la mission» pour l’expédition de 2023 comme s’élevant à 250 000 $ US par personne.

Le submersible est capable de plonger à quatre kilomètres «avec une marge de sécurité confortable», a assuré OceanGate dans des documents judiciaires.

Fonctionnement avec une manette de jeu vidéo

Lors de son expédition en 2022, OceanGate a signalé que le submersible avait eu un problème de batterie lors de sa première plongée et qu’il avait dû être attaché manuellement à sa plate-forme de levage, selon un document déposé au tribunal en novembre.

D’autres missions ont cependant suivi. OceanGate a décrit le submersible comme un «vaisseau de pointe» qui «est plus léger, plus spacieux et plus confortable que n’importe quel autre submersible de plongée profonde explorant l’océan aujourd’hui».

Mais le Titan, construit sur mesure et doté d’un dôme en titane, représentait un risque. M. Pogue et un autre passager, Mike Reiss, le scénariste et producteur de la série de dessins animés «Les Simpson», ont noté que la décharge de responsabilité pour le voyage comprenait des avertissements sévères en matière de sécurité.

Dans son article publié sur CBS, M. Pogue a également souligné qu’une grande partie du submersible «improvisé», de la taille d’une minifourgonnette, fonctionnait à l’aide d’un seul bouton, d’une manette de jeu vidéo, d’une toilette de fortune et de matériel provenant d’un détaillant de véhicules de loisirs.

– Avec les informations de Sarah Smellie et de l’Associated Press