Rodriguez laisse la porte ouverte à la réglementation du nouveau Threads de Meta

OTTAWA — Le ministre du Patrimoine canadien laisse la porte ouverte à une réglementation de la nouvelle plateforme de médias sociaux Threads dans le cadre du projet de loi obligeant Google et Meta à indemniser les médias d’information pour les nouvelles qu’ils partagent ou réutilisent d’une autre manière sur leurs plateformes. 

Interrogé mercredi sur la possibilité d’inclure le nouveau réseau social de Meta dans la Loi sur les nouvelles en ligne, connue sous le nom de projet de loi C-18, Pablo Rodriguez a répondu que «cela sera éventuellement inclus dans la réglementation».

«Il pourrait être inclus dans le projet de loi. Nous étudions la question, a-t-il ajouté. Nous ne le savons pas encore, mais ce sera plus précis lorsque nous passerons à la réglementation.»

La plateforme de microblogage Threads a recueilli au moins 100 millions d’utilisateurs depuis sa création mercredi dernier, après que la loi visant les entreprises de Meta, Facebook et Instagram, ainsi que le moteur de recherche et les produits d’information de Google, a reçu la sanction royale le 22 juin.

Depuis, la loi a déclenché un bras de fer entre les géants du numérique et le gouvernement fédéral.

Les deux entreprises technologiques, qui ont fait pression contre la loi, ont promis de bloquer l’accès aux nouvelles canadiennes sur leurs plateformes, tandis que M. Rodriguez a refusé de faire marche arrière en demandant une compensation pour l’industrie du journalisme au Canada.

Dans sa dernière salve, il a retiré la semaine dernière des plateformes de Meta les 10 millions $ de dépenses publicitaires annuelles du gouvernement fédéral.

Les entreprises de presse et de télécommunications Québecor, Bell Média, Torstar, Cogeco et Postmedia Network Canada ont fait de même. L’Université de Montréal a quant à elle annoncé mercredi qu’elle «réduira de manière significative ses placements publicitaires sur les plateformes des médias sociaux Facebook et Instagram», «par solidarité avec les médias».

M. Rodriguez a épargné à Google la suspension des publicités puisque le géant des technologies s’est «montré ouvert à la recherche d’une solution», a déjà déclaré le ministre, qui ajoutait être «profondément convaincu» que les préoccupations de l’entreprise seraient résolues par la réglementation. La société a pourtant annoncé qu’elle bloquera aussi les articles et reportages d’information canadiens de sa plateforme.

«Google a décidé de rester à la table et de continuer à discuter avec nous. Meta a adopté une approche intimidante et a décidé de ne plus discuter avec nous», a affirmé M. Rodriquez.

«Depuis, nous avons rencontré Google vendredi… nous travaillons à une mise à jour cette semaine.»

M. Rodriguez a refusé d’évoquer les détails des conversations qu’il a eues avec Google, mais il a déclaré qu’il s’agissait de «discussions ouvertes et franches».

«Je pense qu’elles vont dans la bonne direction», a-t-il dit.

Google n’a pas voulu commenter ses discussions avec le ministre, mais a renvoyé La Presse Canadienne à un blogue, où son président des affaires mondiales a déclaré : « Nous prévoyons de participer au processus de réglementation et nous continuerons d’être transparents avec les Canadiens et les médias d’information au fur et à mesure que nous avançons ». 

«Nous espérons que le gouvernement sera en mesure de tracer une voie viable pour l’avenir», a indiqué Kent Walker.

Meta s’est refusé à tout commentaire.

Un plafond financier

Ses conversations avec Google interviennent alors qu’il a publié lundi un document indiquant qu’il proposait un plafond financier sur le montant que Google et Facebook devraient verser en compensation aux entreprises de médias, qui serait basé sur les revenus canadiens estimés d’une plateforme, et qui serait spécifique à chaque plateforme et à sa position sur le marché de l’information.

La proposition réaffirme que les offres non monétaires aux entreprises de presse, telles que la formation, peuvent être incluses dans les motifs d’exemption et s’efforce de clarifier ce qui constitue une «part importante» des entreprises de presse locales indépendantes, des organes de presse autochtones et des organes de presse des communautés de langue officielle en situation minoritaire.

«Je pense que nous avons démontré ce que nous disions depuis le début : une grande partie de la clarification demandée par les géants du numérique est apportée par la réglementation», a indiqué M. Rodriguez.

Bien qu’il ne soit pas entré dans les détails concernant le plafond financier que les géants du numérique devront payer ou le nombre d’organisations avec lesquelles ils devront négocier des accords, il a souligné que la réglementation concernera chaque province et territoire, aura un impact sur les publications en anglais et en français et garantira la représentation des médias autochtones de toutes tailles.

Radio-Canada/CBC, le radiodiffuseur public du pays, pourrait également recevoir de l’argent grâce à la loi, a déclaré M. Rodriguez, mais cela dépendra de Google et Meta et des organisations avec lesquelles ils choisiront de conclure des accords.

Bien que ces questions soient encore à l’étude, M. Rodriguez a déclaré qu’il restait ouvert à une rencontre avec Meta.

«Nous ne voulons pas de confrontation. Nous avons été très déçus par l’attitude de Meta, qui est à notre avis irresponsable, a-t-il déclaré. Nous n’agissons pas de la même manière, nous leur disons : venez à la table.»

Meta finance un nombre limité de bourses qui soutiennent les journalistes émergents de La Presse Canadienne.