Regroupement familial: un avocat veut s’adresser à la cour et s’offre comme médiateur

QUÉBEC — Un avocat menace de poursuivre le fédéral et le Québec en Cour supérieure pour les retards dans le traitement des demandes de regroupement familial en immigration.

Me Maxime Lapointe donne 60 jours aux deux gouvernements pour trouver une solution, sinon l’affaire sera portée devant les tribunaux.

«Je me porte même volontaire à titre de conciliateur pour renégocier les clauses» de l’accord Canada-Québec de 1991 sur l’immigration qui est en cause, a-t-il déclaré dans un entretien téléphonique avec La Presse Canadienne.  

Il y aurait plus de 38 000 demandes individuelles de regroupement familial en attente, évoque Me Lapointe dans sa mise en demeure.  

La période de traitement de la demande varie au Québec entre 26 et 41 mois, tandis qu’elle est de 10 à 12 mois pour le reste du Canada, déplore-t-il. 

C’est notamment parce que les parties ne respectent pas les termes de l’accord, selon lui. 

Ainsi, le Québec n’a pas le droit d’imposer un plafonnement, tandis que le fédéral n’a pas le droit de respecter ce plafonnement, a exposé Me Lapointe.

Il assure qu’il est possible de réduire les retards dans le traitement des demandes en regroupement familial, puisqu’on y est arrivé dans une autre catégorie, soit les gens d’affaires.

Dans une courte mêlée de presse avant de se rendre à la séance du conseil des ministres à Québec, la ministre de l’Immigration, Christine Fréchette, a confirmé qu’elle avait bel et bien reçu la mise en demeure.

Elle a toutefois refusé de commenter plus amplement, en expliquant que le dossier est désormais judiciarisé.

Dans sa mise en demeure, l’avocat reproche au ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration (MIFI) du Québec de reconduire des quotas d’admission pratiquement semblables d’année en année alors que pourtant, on peut constater une hausse des demandes.    

Ainsi, «la cible de 10 200 à 10 600 admissions de demandes individuelles de 2023 fut reconduite pour 2024, malgré des résultats de 13 896 admissions en 2021 et selon des données préliminaires pour 2022 de 12 904 admissions», écrit-il. 

«Aucun écoulement des demandes n’a été prévu à ce jour pour décongestionner la catégorie du regroupement familial dont les  inventaires sont estimés à plus de 38 000 demandes individuelles selon les articles relayés par les médias.»

Or l’accord de 1991 prévoit que le Québec est seul responsable de la sélection de l’immigration, mais que la compétence de l’admission «des immigrants des catégories de la famille et des parents aidés» revient au fédéral.

La cible annuelle fixée par le MIFI dans la catégorie du regroupement familial, «placée au stade de l’admission et non de la sélection», est ainsi «en apparence de contravention de sa propre compétence consignée dans l’accord», plaide l’avocat. 

Si les délais de traitement des demandes pour le reste du Canada sont dans les normes, on pourrait donc conclure que les délais pour les demandes à destination du Québec sont «inusuels», fait valoir Me Lapointe. 

Dans sa liste de requêtes, il réclame au MIFI d’amender son plan d’immigration 2024 pour ajouter des quotas additionnels dans la catégorie du regroupement familial et de retirer toute cible d’admission dans cette catégorie.

Au fédéral, il demande de finaliser les dossiers sélectionnés par le MIFI pour en arriver aux mêmes normes de temps de traitement que dans le reste du pays. 

Également, Me Lapointe exige que commence un processus de révision de l’accord par des deux parties.

À défaut, il s’adressera donc au tribunal pour qu’il se prononce sur «la légalité et la légitimité» de l’accord de 1991, «dans un contexte de distorsions de ses dispositions».