L’opposition songe à un BAPE générique sur la filière batterie: Fitzgibbon dit non

QUÉBEC — L’opposition officielle envisage de demander des consultations publiques et une étude environnementale sur l’ensemble de l’industrie de la batterie, mais le gouvernement ferme déjà la porte. 

Trop de questions demeurent sans réponse concernant l’implantation de ces nouveaux joueurs à coups de milliards de dollars, a plaidé mardi le Parti libéral (PLQ), qui serait ouvert à des consultations plus larges sur cette filière. 

Mais il demande d’abord de soumettre le projet de l’usine de batteries Northvolt, annoncée la semaine dernière, à la procédure d’évaluation des impacts du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE). 

Le Parti québécois (PQ) a déposé une motion après la période de questions pour demander la tenue d’un BAPE sur ce projet d’usine, mais les élus du gouvernement ont refusé d’en débattre. 

Québec solidaire (QS) accuse pour sa part le gouvernement d’avoir modifié la réglementation environnementale à la demande de l’industrie, mais le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, a tout démenti.  

Le gouvernement Legault avait écarté une intervention du BAPE, mais dans Le Devoir de mardi, le ministre de l’Environnement, Benoit Charette, a finalement ouvert la porte. 

«Le ministre de l’Environnement se réveille», a déclaré la députée libérale Désirée McGraw en demandant un BAPE sur ce projet et en dénonçant la confusion entretenue par le gouvernement caquiste. 

«On a cinq positions (du gouvernement) en cinq jours, c’est une joke», a-t-elle lancé, en mêlée de presse à l’Assemblée nationale.   

Et du même souffle, son parti est ouvert à ce que l’ensemble de cette nouvelle industrie soit étudiée dans le cadre d’un BAPE dit «générique»: une vaste enquête sur cette filière avec consultation de tous les acteurs concernés dans le dossier.  

«C’est intéressant comme idée», a affirmé Mme McGraw.

«Non, je pense pas que c’est requis», a tranché le ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, lors d’une mêlée de presse avant de se rendre à la période de questions.

«Les nouvelles règles de l’environnement sont ajustées en fonction des nouvelles filières de batteries.»

Le chef libéral Marc Tanguay se scandalise des sommes faramineuses qui sont englouties pour attirer les multinationales au Québec. Il s’est questionné sur les rouages de la transaction avec Northvolt. 

«On va avoir quel pourcentage de l’actionnariat de la société mère? Quelles sont nos garanties quant à ces gros sous? Pourquoi la Caisse de dépôt et de placement ne s’est pas pointée le nez? Pourquoi elle n’a pas investi avec toutes ces équipes d’analystes?»

À ses yeux, il s’agit non seulement d’une filière «énergivore», mais aussi «dollarvore» (sic), pour reprendre son néologisme. 

L’aide du Québec et d’Ottawa pourrait en effet totaliser 7,3 milliards $ dans le projet Northvolt. 

Le député Haroun Bouazzi, de Québec solidaire (QS), a également dénoncé l’investissement de fonds publics considérable, sans contrepartie sur la propriété intellectuelle, la baisse des gaz à effet de serre (GES) ou le pouvoir décisionnel. Il ne va pas toutefois jusqu’à demander la nationalisation de l’industrie. 

«Il y a une différence entre nationaliser et être propriétaire d’un pourcentage qui a de l’allure», a-t-il dit en mêlée de presse.  

«Concrètement, quand on met à terme 7 milliards $ sur la table et qu’il y a juste 500 millions $ qui servent à acheter des actions, on n’a pas le pouvoir de décider un minimum de ce qui se passe dans cette compagnie-là. Ce que je décris, ce n’est pas du communisme.»

QS a voté contre une motion du gouvernement récemment en appui à la filière batterie. 

Le parti de gauche fait valoir qu’il proposait une enveloppe de 2 milliards $ pour la filière batterie dans son programme électoral l’an dernier. Cependant, cette somme peut paraître bien peu au regard de ce qui semble maintenant nécessaire pour attirer les grands joueurs de cette industrie.

À titre d’exemple, le fédéral et l’Ontario ont mis au total plus de 28 milliards $ sur la table pour la construction de deux usines de batteries pour véhicules électriques dans cette province.