Les 10 phénomènes météo marquants de 2024 ont mis tout le Canada à l’épreuve
MONTRÉAL — Aucune région du Canada n’a été épargnée par les événements de météo extrêmes en 2024 et cette situation ne fera qu’empirer, si l’on se fie aux experts.
Environnement Canada a publié mardi sa liste annuelle des dix phénomènes météorologies les plus marquants de l’année qui se termine et le pays a vécu tous les temps sur l’ensemble de son territoire.
Il s’agit de la 29e année consécutive que l’agence fédérale se livre à cet exercice et sa préparation reflète un changement significatif au cours des trois dernières décennies, comme le raconte Chantal McCartin, spécialiste en sciences physiques chez Environnement Canada. «Au début du palmarès, on avait vraiment de la difficulté à trouver dix événements météo marquants qui survenaient au Canada. En 2024 et depuis les quelques dernières années, c’est vraiment le contraire. On en a plus que dix. On pourrait quasiment faire un top 20 si on voulait. Le défi vient vraiment d’en choisir seulement dix. Le nombre d’événements est beaucoup plus grand, (tout comme) leur fréquence et aussi leurs répercussions.»
Les ravages de Debby
Ainsi, par exemple, même si le centre du pays n’est pas une zone propice aux ouragans, c’est ce secteur, soit l’Ontario et le Québec, qui a été le plus touché par la saison des ouragans. Au Québec, l’ouragan Beryl a été le premier à se manifester, le 10 juillet, déversant entre 50 et 100 millimètres de pluie en quelques heures avant d’aller en déverser 130 millimètres dans les Maritimes. Mais c’est surtout l’ouragan Debby qui, le 9 août, a noyé le Québec avec des quantités allant de 100 à 200 millimètres, avec un record de 221 millimètres à Lanoraie.
Debby s’est finalement avérée la catastrophe météorologique la plus coûteuse de l’histoire du Québec, avec des dommages assurés estimés à 2,5 milliards $, un chiffre qui a dépassé le coût de la tempête de verglas de 1998, qui a causé environ 2,4 milliards $ de dégâts en dollars d’aujourd’hui.
L’Ontario, qui a aussi encaissé ces deux restes d’ouragan, a été le théâtre d’autres inondations causées par deux épisodes de fortes pluies dans le sud de la province, particulièrement dans la région de Toronto, les 15 et 16 juillet et les 17 et 18 août.
Chaleur torride au nord du cercle polaire
La nature a soufflé le chaud et le froid durant l’année, les collectivités de l’Arctique étant confrontées à une vague de chaleur inhabituelle pendant que l’Ouest canadien cherchait à se réchauffer durant un mois de janvier particulièrement glacial.
En Arctique, par exemple, la ville d’Inuvik, située à 200 kilomètres au nord du cercle polaire dans les Territoires du Nord-Ouest, a fracassé un record avec un mercure à 34,8 degrés Celsius le 7 août, période où le soleil ne se couche pratiquement jamais, de sorte qu’il était impossible de rafraîchir les bâtiments la nuit alors que le mercure ne descendait pas en dessous de 27 degrés. Les températures se sont maintenues au-dessus des 30 degrés durant cinq jours, allant jusqu’à un étouffant 37 degrés le 9 août dans la municipalité de Fort Good Hope, aussi dans les Territoires du Nord-Ouest.
À l’opposé, l’Ouest devait vivre en 2024 un des hivers les plus froids de son histoire avec des températures chutant sous les -40 degrés durant quelques jours à la mi-janvier en Colombie-Britannique, en Alberta et en Saskatchewan. L’Alberta a brisé 125 records quotidiens de basse température, la Colombie-Britannique 60 et la Saskatchewan 25. Les mercures les plus froids dans les trois provinces variaient entre -46 et -48,4 degrés pour présenter des refroidissements éoliens dépassant les -50.
La Colombie-Britannique durement éprouvée
La Colombie-Britannique, touchée par ces froids polaires sur son flanc est, a ensuite dû composer sur sa côte ouest avec une première rivière atmosphérique du 26 janvier au 1er février qui, elle, a déversé des pluies atteignant jusqu’à 200 millimètres dans certains secteurs. Une autre de ces rivières atmosphériques devait venir déverser de nouveaux torrents d’eau sur l’ouest de la province en octobre, avec une pointe de 318 millimètres sur l’île de Vancouver. Impitoyable, la météo a fait cinq morts à cette occasion.
À l’autre extrémité du pays, le Cap-Breton a aussi subi ce que les météorologues qualifient de «coup de fouet hivernal», avec une chute de neige de 100 centimètres qui a paralysé Sydney et Halifax, qui n’en a reçu «que» 80.
À Calgary, où l’on avait installé toutes sortes d’équipements pour étudier la grêle, celle-ci a collaboré un peu trop aux travaux des chercheurs, avec des grêlons atteignant la taille d’un pamplemousse accompagnés d’une tornade dans le centre de la province, causant des dommages évalués à 2,8 milliards $.
La tragédie de Jasper
L’Ouest canadien a été particulièrement touché en 2024 alors que la chaleur intense et la sécheresse ont provoqué d’incontrôlables feux de forêt qui ont ravagé la municipalité de Jasper, dans les Rocheuses albertaines. Cet événement, qui trône au sommet du palmarès d’Environnement Canada, s’est inscrit dans un épisode particulièrement sec et chaud, avec un mercure atteignant 38 degrés Celsius. Le parc national de Jasper et la municipalité ont été rasés lorsque deux immenses feux hors de contrôle ont fusionné avant de s’abattre sur Jasper, forçant l’évacuation de 5000 résidants et 20 000 visiteurs en plein coeur de la saison touristique et laissant derrière 880 millions $ de dommages.
L’autre bout du pays n’était pas épargné alors qu’à l’est complètement, le Labrador a connu lui aussi d’importants feux de forêt qui ont forcé l’évacuation de quelques communautés.
Canicule et neige en même temps
Enfin, Environnement Canada souligne parmi ses phénomènes de 2024 un «été divisé» marqué par des chaleurs étouffantes dans les Maritimes pendant qu’au même moment, l’Alberta grelottait. Du 18 au 20 juin, les températures sont montées jusqu’à 37,6 degrés Celsius à Bathurst, la température la plus élevée jamais atteinte au Nouveau-Brunswick. Des températures bien au-dessus des 30 degrés ont persisté dans l’ensemble des provinces maritimes durant cette période, soit 10 à 15 degrés supérieures aux moyennes saisonnières. Au même moment, l’Ouest était aux prises avec une inhabituelle vague de froid avec des températures atteignant les -4,8 degrés en plein mois de juin en Alberta. Pour ajouter à la misère des Albertains, la neige s’est mise de la partie, avec des accumulations allant jusqu’à 30 centimètres dans le secteur de Nanton, une petite municipalité située à une centaine de kilomètres au sud de Calgary.
Météo extrême: «la nouvelle norme»
«Se réchauffant plus rapidement que la moyenne globale, particulièrement dans le Nord, le Canada devient de plus en plus un territoire où les événements de météo extrêmes sont la nouvelle norme», a affirmé Jennifer Smith, météorologue nationale de sensibilisation aux alertes.
«L’atmosphère qui se réchauffe accroît l’intensité des événements comme les vagues de chaleur et intensifie les pluies torrentielles parce que l’air plus chaud peut contenir davantage d’humidité. Les événements qui ont eu le plus d’impact cette année (…) nous rappellent que le changement climatique n’est plus une préoccupation lointaine, mais une réalité déjà présente, transformant des vies, des paysages et le gagne-pain des nombreux citoyens à travers le pays», a-t-elle conclu.