Le nombre de naissances au Québec est revenu au niveau de 2019

Le début de la crise sanitaire aura eu un effet de courte durée sur les naissances au Québec. Après avoir connu un creux en 2020, leur nombre est revenu, en 2021, au niveau observé avant la pandémie, selon l’Institut de la statistique (ISQ).

On estime à 84 900 le nombre total de nouveaux bébés dans la province en 2021, un rebond de près de 4 % par rapport à 2020, alors qu’on avait répertorié environ 81 850 naissances. En 2019, le nombre s’élevait à 84 309.

Ce soubresaut se reflète dans l’indice synthétique de fécondité qui s’établit à 1,58 enfant par femme en 2021. Après être descendu à 1,52 en 2020, il retrouve un niveau semblable à celui des années 2018 et 2019, note l’ISQ, qui souligne que l’indice affiche une tendance générale à la baisse depuis 2009.

Grossesses en «deux temps»

En 2020, une diminution particulièrement prononcée a été observée dans les derniers mois de l’année alors que les bébés conçus dans les premières semaines de la pandémie commençaient à naître. 

Cette tendance à la baisse s’est poursuivie au début de l’année 2021, mais elle s’est rapidement estompée dès mars, avec un retour à un niveau comparable ou supérieur aux périodes prépandémiques, révèle l’ISQ.

Les deux auteures du dernier bulletin sociodémographique sur les naissances indiquent que ces naissances sont le résultat de conceptions survenues en «deux temps»: à la sortie de la première vague et au début de l’automne 2020. 

Les démographes Anne Binette Charbonneau et Martine St-Amour soulignent que les conceptions à l’automne 2020 se sont faites «sur fond de début de deuxième vague et du retour graduel de certaines mesures sanitaires». 

La littérature scientifique semble démontrer qu’à la suite de la première vague, il y a eu «un retour d’optimisme» avec une reprise de l’emploi, après un contexte d’incertitude ayant pu retarder l’idée d’un projet de grossesse, évoque Mme Binette Charbonneau à La Presse Canadienne. 

«Le profil qu’on observe au Québec, on le voit dans plusieurs autres pays, notamment la France et les États-Unis. Ils ont vu le même genre de baisse temporaire des naissances au début de la pandémie, puis une reprise par la suite», fait-elle remarquer en entrevue.

Des chercheurs dans le monde ont été étonnés de voir la vitesse à laquelle ce rebond s’est manifesté, note Mme Binette Charbonneau.  

«Ils prévoyaient une baisse, mais ils s’attendaient à une baisse plus longue. Si on compare avec d’autres crises économiques par le passé, habituellement le report des naissances dure plus longtemps. Pour ces chercheurs, c’était une surprise de voir que ça n’avait duré que quelques mois», relate-t-elle. 

Tendance à plus long terme?

Il est encore trop tôt pour savoir si la progression de 2021 se répétera pour l’année en cours, prévient Mme Binette Charbonneau. Déjà, le premier trimestre de 2022 montre des données en dessous de la moyenne des années prépandémiques, précise la démographe de l’ISQ. 

«2020 et 2021 sont des années tellement particulières qu’on ne peut pas avoir tout de suite un portrait général de ce qui se passe. (…) De manière historique, les naissances étaient en train de baisser depuis quelques années. Donc, est-ce qu’on repart sur une nouvelle tendance à la hausse? Est-ce seulement une reprise et on va revenir à la tendance à la baisse? Ça va prendre plus de données pour analyser ça», avance Mme Binette Charbonneau. 

L’experte fait la même lecture pour le taux de fécondité qui a bondi en 2021. 

Il a été en hausse chez les femmes de 25 à 44 ans par rapport à 2020, ce qui «reflète possiblement un effet de rattrapage après les perturbations causées par les premiers mois de la pandémie», peut-on lire dans le bilan. 

L’indice de fécondité subit une tendance à la baisse depuis une dizaine d’années. Cette situation est la combinaison d’un fléchissement de la fécondité chez les femmes de moins de 30 ans et d’une certaine stabilité chez les plus âgées qui pouvaient avoir décidé de reporter le projet d’avoir un bébé à plus tard dans leur vie, explique Mme Binette Charbonneau. 

Chez les 20-24 ans, le taux a continué de fléchir l’an dernier pour s’établir à son plus bas niveau jamais enregistré.

Montréal fait bande à part

Les données de l’ISQ montrent que la fécondité s’est accrue dans presque toutes les régions du Québec en 2021. Montréal est la seule région où la baisse de la fécondité enregistrée en 2020 n’a pas été suivie d’une hausse en 2021. 

Selon Mme Binette Charbonneau, cet écart peut s’expliquer par le profil démographique différent de la métropole québécoise par rapport aux autres régions. 

De manière générale dans les grands centres urbains, la population demeure aux études plus longtemps et attend d’entreprendre une carrière avant de penser à un projet parental, mentionne la démographe. 

Cet article a été produit avec l’aide financière des Bourses Meta et La Presse Canadienne pour les nouvelles.