Le chantier naval Irving demande plus d’argent pour livrer les frégates à temps

OTTAWA — Le chantier naval Irving de Halifax chargé de construire la prochaine flotte de frégates canadiennes dit respecter son échéancier qui prévoit de commencer à tailler de l’acier dans deux ans, à condition qu’Ottawa lui verse plus d’argent pour moderniser ses installations.

Prenant la parole lors d’une importante conférence portant sur la défense, mercredi, le président du chantier naval Irving, Kevin Mooney, a expliqué que l’entreprise avait besoin d’améliorations majeures qui n’étaient pas prévues au moment où elle a décroché le contrat fédéral en 2010.

Tout cela s’expliquerait par le fait que les frégates attendues aujourd’hui sont bien différentes de celles prévues au moment où Irving avait promis de rénover ses installations à ses frais en guise de condition pour décrocher le contrat de plusieurs milliards de dollars, a expliqué M. Mooney.

«Essentiellement, on parle de navires plus grands et plus complexes, a-t-il soutenu. Alors on doit modifier des parties de notre chantier naval afin d’avoir la capacité et l’espace nécessaire.» Le président de l’entreprise dit également chercher à limiter le niveau de risque sur son chantier de construction.

Irving dit maintenant attendre la réponse d’Ottawa à sa plus récente demande, mais M. Mooney dit avoir besoin des fonds supplémentaires avant la fin de l’année pour éviter un retard dans le début de la construction de la première frégate en 2024.

«Pour respecter la date de début du chantier à la mi-2024, nous avons besoin d’un financement ferme pour l’achat d’équipement, l’innovation et d’autres trucs du genre sur le chantier maritime d’ici la fin de l’année ou en début d’année prochaine», a-t-il insisté.

«Le temps presse et il file rapidement. Il est essentiel, absolument essentiel que nous ayons cette réponse le plus tôt possible», a poursuivi M. Mooney.

Ce dernier n’a pas précisé combien d’argent l’entreprise réclamait au gouvernement fédéral pour améliorer ses installations. Un porte-parole de l’entreprise a refusé de commenter le dossier.

Services publics et approvisionnement Canada a refusé de commenter les déclarations de M. Mooney.

Un porte-parole du ministère, Jeremy Link, s’est contenté de réitérer dans une réponse écrite que le gouvernement demeurait dévoué à collaborer avec ses partenaires de l’industrie navale afin que les commandes soient livrées efficacement et en temps opportun.

Il a ajouté que la participation du fédéral pouvait inclure la mise en place de stratégie de réduction des risques en cas de besoin, mais a refusé de commenter précisément les demandes du chantier Irving.

L’entreprise a décroché le contrat de construction de 15 nouveaux navires de guerre pour remplacer les 12 frégates vieillissantes et trois destroyers. Ces vaisseaux seront calqués sur un modèle britannique, le Type 26, aussi utilisé par l’Australie.

À l’origine, Ottawa avait prévu un budget de 26 milliards $ pour ces nouveaux navires et voulait voir le premier bateau prendre la mer en 2025. De nombreux retards sont toutefois venus bousculer les plans et l’on s’attend désormais à payer 60 milliards $ et voir un premier navire en mer en 2030.

L’inflation et les difficultés d’approvisionnement auraient cependant fait à nouveau gonfler la facture, selon M. Mooney. Des avertissements semblables avaient d’ailleurs été lancés en avril dernier par des fonctionnaires fédéraux.

Pendant ce temps, les frégates continuent de tomber en désuétude. Construites au milieu des années 1990, ces embarcations ont été victimes de plus d’une dizaine d’incendies depuis 2018 ainsi que d’au moins une panne majeure.

Un rapport interne de la Défense nationale rédigé en 2020 faisait aussi état des grandes difficultés à maintenir la flotte en bonne condition en raison d’un manque de main-d’œuvre, de pièces de rechange et de la vétusté des navires.