L’APN exige une enquête nationale sur le racisme dans les services de police

OTTAWA — L’Assemblée des Premières Nations (APN) exige que le gouvernement fédéral lance une enquête nationale sur le racisme systémique dans les services de police et sur les décès de membres des Premières Nations.

Une résolution rédigée par le chef Allan Polchies, de la Première Nation de St Mary’s, affirme qu’en dépit de 20 enquêtes et commissions individuelles sur la police et le système judiciaire depuis 1989, Ottawa n’a pas réussi à apporter des changements substantiels pour lutter contre le racisme systémique au sein de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et d’autres organismes.

Les membres des Premières Nations devraient se sentir en sécurité sur leurs propres terres et ne devraient pas avoir peur de la police, a soutenu Allan Polchies devant les personnes réunies à l’assemblée spéciale des chefs de l’APN, à Ottawa.

Sa résolution fait suite à une série d’incidents survenus entre le 29 août et le 24 septembre, qui ont fait neuf morts parmi les membres des Premières Nations pendant ou après des interactions avec la police.

«Les enquêtes sur les récents décès de membres des Premières Nations après des interactions avec la police sont menées de manière isolée, ce qui ne permet pas de tirer des conclusions sur une épidémie interdépendante», indique la résolution.

En plus de demander une enquête nationale, la résolution réclame également la démilitarisation des forces policières et la création d’une équipe nationale d’intervention en cas de crise à travers le Canada, qui peut soutenir les personnes en crise.

Elle stipule aussi qu’immédiatement après un incident grave impliquant une personne des Premières Nations, l’équipe d’enquête devrait inclure une personne des Premières Nations.

La résolution a été adoptée par consensus.

Dans un communiqué, le bureau du ministre de la Sécurité publique, Dominic LeBlanc, a déclaré que la GRC coopère avec les organismes indépendants de surveillance de la police qui enquêtent sur les décès.

«Nous reconnaissons que les récents incidents mortels impliquant des policiers dans les communautés autochtones ont été incroyablement difficiles pour les membres de la communauté, et surtout pour les proches des personnes décédées. Nos pensées les accompagnent», indique le communiqué.

Plus tôt dans la matinée, la cheffe nationale de l’APN, Cindy Woodhouse Nepinak, a mentionné aux délégués que le sous-financement et le manque de forces policières des Premières Nations «coûtent des vies aux Premières Nations».

«Il est temps de dire une fois pour toutes que la vie de nos Premières Nations compte dans ce pays», a-t-elle insisté.

L’élection fédérale déjà abordée

La première journée de cette assemblée de trois jours a été pour l’essentiel cordiale, après une assemblée houleuse en octobre dernier, au cours de laquelle les chefs ont rejeté un accord de 47,8 milliards $ sur la réforme du système de protection de l’enfance conclu avec le Canada, après des décennies de batailles juridiques qui ont révélé que le gouvernement fédéral discriminait les enfants des Premières Nations.

Elle intervient également alors que les chefs s’inquiètent de plus en plus d’un changement de gouvernement, avec des élections fédérales imminentes et un Parlement bloqué, ce qui signifie que des projets de loi essentiels pour les Premières Nations n’avancent pas.

La cheffe Woodhouse Nepinak a évoqué l’élection à venir dans son discours d’ouverture, affirmant que l’APN continuera de «repousser les limites de la loi et de veiller à ce que nos droits inhérents et issus de traités soient pleinement mis en œuvre au Canada».

Elle a également exhorté les Premières Nations à participer aux élections, affirmant que leur voix et leurs votes comptent.

Anaida Poilievre ne sera pas présente

L’épouse du chef conservateur Pierre Poilievre devait parler mercredi de la traite des êtres humains lors d’un panel avec le chanteur et défenseur Paul Brandt. Un porte-parole du Parti conservateur et le conseil des femmes ont tous deux confirmé mardi qu’elle ne participerait pas à l’événement.

Le conseil des femmes de l’APN n’avait pas été consulté sur ce point à l’ordre du jour, a expliqué la cheffe adjointe de la nation Nishnawbe Aski, Anna Betty Achneepineskum, aux personnes réunies à Ottawa pour l’assemblée spéciale des chefs.

Entourée d’une douzaine de délégués, Mme Achneepineskum a fait savoir qu’il y avait des membres des Premières Nations qui sont des voix fortes et des défenseurs de cet enjeu.

«Nous sommes reconnaissants que Mme Anaida Poilievre ait changé d’avis et ne fasse pas de présentation», a-t-elle déclaré.

Anaida Poilievre ne serait pas présente parce qu’elle est malade, a fait savoir mardi matin un porte-parole du Parti conservateur.

Les rassemblements de l’Assemblée sont souvent suivis par des politiciens fédéraux. Le premier ministre, Justin Trudeau, le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, et le chef du NPD, Jagmeet Singh, devraient prendre la parole. Il en va de même pour plusieurs ministres du gouvernement.

Pierre Poilievre ne devrait pas être présent à cette assemblée et aucun député conservateur n’est inscrit à l’ordre du jour.

La cheffe nationale de l’APN, Cindy Woodhouse Nepinak, a indiqué lors d’une entrevue lundi que l’organisation continuerait d’inviter M. Poilievre à s’adresser aux chefs et qu’il pourrait se joindre à eux pour des discussions lors de la prochaine assemblée.

Le dirigeant conservateur s’est adressé à l’APN pour la première fois depuis qu’il a été nommé chef du parti lors de son assemblée générale annuelle, en juillet dernier.

Certains chefs ont semblé apprécier une partie de ce qu’il avait à dire, applaudissant généreusement lors d’un discours qui soulignait son engagement à faire progresser la réconciliation économique avec les Premières Nations et à créer des emplois, notamment grâce au développement des ressources.

Judy Wilson, déléguée à la réunion, avait mentionné à l’époque qu’il fallait reconnaître qu’une poignée d’anciens combattants et de représentants du conseil LGBTQ+ de l’Assemblée se sont tenus silencieux et ont tourné le dos à Pierre Poilievre pendant qu’il parlait.

Elle a ensuite fait remarquer à M. Poilievre qu’il n’avait pas mentionné la question des femmes autochtones assassinées ou disparues ni la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, ainsi que les droits inhérents, pendant son discours.

Bien que Pierre Poilievre ne participe pas à cette assemblée, les chefs ont rencontré des membres du Parti conservateur à Ottawa.