L’acide tannique interférerait avec le SRAS-CoV-2

MONTRÉAL — L’acide tannique interférerait avec la capacité du SRAS-CoV-2 à infecter les cellules humaines et à s’y reproduire, ont constaté des scientifiques québécois.

Les chercheurs de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS), de l’Université de Montréal, de l’Université McGill et de l’Université du Québec à Montréal ont découvert, dans un premier temps, que l’acide tannique nuit à la liaison entre la protéine de spicule du virus et les récepteurs ACE2 qui se trouvent à la surface des cellules, et que le virus utilise pour entrer à l’intérieur et lancer sa reproduction.

Fait encore plus intéressant, les chercheurs ont constaté que l’acide tannique interfère avec la protéine de spicule du virus, et non avec les récepteurs ACE2, ce qui minimise le risque d’effets secondaires indésirables.

«(L’acide tannique) détourne le virus de sa cible biologique, a expliqué en primeur à La Presse Canadienne le professeur Charles Ramassamy, de l’INRS. C’est un énorme avantage parce qu’en fait, il ne perturbe pas, ou très peu, le fonctionnement de l’organisme. Il va modifier la structure de la protéine (de spicule), et donc c’est comme si on prévenait sa fixation sur la porte d’entrée.»

Les résultats sont d’autant plus probants que tous les chercheurs qui ont participé à ces travaux en sont venus aux mêmes conclusions, et ce même s’ils utilisaient des techniques différentes.

Poussant leurs travaux un peu plus loin, les scientifiques ont identifié un deuxième mécanisme par lequel l’acide tannique empêche le SRAS-CoV-2 d’infecter les cellules humaines. Ils ont enfin constaté, en dernier lieu, que l’acide tannique peut inhiber l’activité de l’enzyme virale responsable de la réplication du virus.

«C’est un mécanisme multicibles de l’acide tannique, si on peut dire, qui peut agir aussi bien sur la protéine virale, que sur l’inhibition de son entrée dans la cellule, ou encore si le virus est déjà à l’intérieur de la cellule, d’empêcher sa réplication», a résumé le professeur Ramassamy.

Les travaux ont été réalisés en laboratoire sur des fragments du virus, et non sur le virus complet, pour des raisons de sécurité. Ils ont aussi porté sur le variant B117 (le variant «britannique») qui dominait à ce moment, et non par exemple sur le variant Omicron, mais le professeur Ramassamy juge malgré tout que les résultats sont très encourageants.

L’acide tannique est un polyphénol naturel qu’on retrouve dans plusieurs boissons comme le vin rouge ou le thé, mais en quantités beaucoup plus faibles que celles utilisées lors de l’étude.

«Il faudrait boire beaucoup de tasses de thé ou de bouteilles de vin rouge pour en arriver aux concentrations que nous utilisons», a dit en riant le professeur Ramassamy.

Il envisage plutôt le développement éventuel de comprimés contenant de l’acide tannique ou encore une administration par voie nasale pour prévenir ou empêcher l’infection induite par le SARS-CoV-2.

Un tel traitement serait moins coûteux que les antiviraux actuellement sur le marché, et les effets secondaires seraient moindres en raison de la faible toxicité des polyphénols. De plus, a-t-il dit, l’acide tannique et ses dérivés physiologiques ont des propriétés anti-inflammatoires et antioxydantes, toutes deux bénéfiques lors de la rémission d’une infection au SARS-CoV-2

Les conclusions de ces travaux ont récemment été publiées dans l’International Journal of Molecular Sciences.