La Cour fédérale rejette la contestation du décret de l’exécutif sur les armes à feu

OTTAWA — La Cour fédérale rejette une contestation judiciaire du règlement de mai 2020 du pouvoir exécutif à Ottawa qui interdit quelque 1500 types d’armes à feu au Canada.

Les demandeurs avaient notamment soulevé des questions sur le fond concernant les armes à feu et la sécurité publique. Mais dans une décision rendue publique lundi, la juge Catherine Kane explique que le tribunal s’est uniquement penché sur la question de savoir si le cabinet Trudeau avait outrepassé ses pouvoirs en adoptant les règlements.

Quelques semaines après la tuerie de Nouvelle-Écosse, qui avait fait 22 morts en avril 2020, les libéraux fédéraux ont annoncé qu’ils interdisaient 1500 modèles d’armes à feu «de type militaire», qu’ils considéraient comme trop dangereux pour la société civile canadienne.

La Coalition canadienne pour les droits aux armes à feu et d’autres organisations liées à ces armes ont alors contesté devant les tribunaux la réglementation adoptée par le pouvoir exécutif à Ottawa. Ces organismes ont notamment plaidé que l’exécutif n’avait pas le pouvoir de promulguer le décret interdisant ces armes, notamment l’AR-15 et le Ruger Mini-14.

Dans sa décision, la juge Kane conclut que la promulgation du décret et du règlement qui a suivi n’excède pas le pouvoir du premier ministre Trudeau et de son cabinet.

«Le gouverneur en conseil n’a pas outrepassé les pouvoirs qui lui ont été délégués par le législateur» en vertu du Code criminel, écrit la juge Kane. «Le gouverneur en conseil est d’avis que les armes à feu prohibées désignées ne peuvent raisonnablement être utilisées pour la chasse ou le sport, et cet avis, de même que la décision de désigner les armes à feu en question, sont raisonnables.»

La juge estime par ailleurs que le règlement ne porte pas atteinte à l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés, qui stipule que «chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne».

Mais la juge ajoute que même si la Cour estimait que le règlement «portait atteinte à l’article 7 d’une manière qui n’est pas conforme aux principes de justice fondamentale», elle conclurait que cette atteinte est justifiée et «s’inscrit dans les limites raisonnables».

«L’atteinte minimale aux droits des propriétaires d’arme à feu, qui disposent désormais d’un choix moindre quant aux armes à feu qu’ils peuvent posséder et utiliser (…) est supplantée par l’effet bénéfique du Règlement, soit la réduction des dommages découlant des fusillades de masse et du danger inhérent aux armes à feu prohibées, et par l’atteinte de l’objectif plus global d’améliorer la sécurité publique», conclut la juge Kane.

L’organisme «PolySeSouvient» a applaudi le jugement, qui «confirme l’autorité du gouvernement fédéral d’interdire certaines armes qu’il considère un risque disproportionné pour la sécurité publique».

«Ce jugement devrait pousser le gouvernement Trudeau à rapidement mettre en œuvre ses promesses réitérées lors des trois dernières campagnes électorales à interdire l’ensemble des armes communément appelées des ‘armes d’assaut’, soit de style militaire qui ne sont pas raisonnablement utilisées pour la chasse», a écrit dans un communiqué Nathalie Provost, survivante du féminicide à l’École Polytechnique en 1989 et porte-parole de PolySeSouvient.  

La Coalition canadienne pour les droits aux armes à feu a indiqué sur son site internet qu’elle analyserait la décision et déterminerait «si un appel a des chances d’aboutir». 

«Nous avons promis de lutter contre cette action injuste et irresponsable du gouvernement libéral et nous continuerons à le faire jusqu’à ce que toutes les possibilités soient épuisées», écrit la vice-présidente aux relations publiques, Tracey Wilson.