Des syndiqués de l’éducation défient la loi spéciale du gouvernement Ford en Ontario

TORONTO — Des milliers de travailleurs de l’éducation ont débrayé vendredi matin pour protester contre l’adoption, par le gouvernement de Doug Ford, d’une loi spéciale interdisant tout recours à la grève. La loi, adoptée jeudi, impose aussi une convention collective non négociée de quatre ans à 55 000 travailleurs de l’éducation représentés par le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP).

Les travailleurs ont tenu des piquets de grève, vendredi, klaxonnant, agitant des drapeaux et scandant «debout, ripostez», au premier jour d’un débrayage dont la durée est indéterminée.

Les dirigeants du syndicat ont déclaré que l’action se poursuivrait «jusqu’à ce que nos membres en décident autrement».

La plus grande manifestation a eu lieu devant l’Assemblée législative, où les travailleurs se sont répartis sur la pelouse et ont défilé en ligne autour du bâtiment dans les rues fermées par la police.

Des membres d’autres syndicats, dont le Syndicat des employés de la fonction publique de l’Ontario (SEFPO) et Unifor, se sont joints aux membres du SCFP sur les lignes de piquetage.

Le gouvernement de l’Ontario s’est adressé vendredi à la Commission des relations de travail de la province pour qu’elle déclare illégales les grèves de travailleurs de l’éducation et les gestes de leaders syndicaux. Une audience a commencé tard en après-midi et devait se poursuivre samedi.

Le gouvernement progressiste-conservateur a utilisé la disposition de dérogation de la Charte des droits et libertés pour se prémunir déjà contre toute contestation constitutionnelle de la loi spéciale. Le droit de grève a été reconnu par la Cour suprême comme un droit constitutionnel.

Des travailleurs de l’éducation représentés par le SCFP manifestaient vendredi matin devant les bureaux de politiciens, dont des centaines devant le bureau de circonscription du ministre de l’Éducation, Stephen Lecce, à Vaughan.

Le SCFP soutient que la loi spéciale du gouvernement Ford constitue une attaque contre les droits de négociation de tous les travailleurs, et le syndicat a donc maintenu son mot d’ordre de grève pour vendredi, même si le débrayage devenait illégal. Le SCFP avait maintenu cette semaine son mot d’ordre de grève générale illimitée pour les 55 000 travailleurs de l’éducation — aides-enseignants, concierges, bibliothécaires, éducatrices en garderies ou personnel administratif.

Aaron Guppy, concierge au Conseil scolaire de district de la région de York, faisait du piquetage devant le bureau du ministre Lecce, vendredi matin. «S’ils nous enlèvent nos droits en tant que syndicat, tous les autres syndicats seront les prochains. Ils ne vont pas s’arrêter à nous, a-t-il soutenu. Nous sommes ici pour montrer essentiellement que nous n’allons pas reculer, nous n’allons pas accepter cette terrible affaire. Les gens nous appuient.»

Des amendes salées à venir?

La loi spéciale prévoit des amendes pouvant aller jusqu’à 4000 $ par jour de grève pour les syndiqués et jusqu’à 500 000 $ pour le syndicat.

Le SCFP prévoit contester les amendes, mais il affirme que s’il doit payer, il paiera. Les dirigeants du SCFP ont laissé entendre cette semaine que le syndicat recherchait une aide financière extérieure auprès d’autres organisations syndicales.

De nombreux conseils scolaires de la province, dont celui de Toronto, avaient prévenu que les écoles seraient fermées en cas de grève.

Le ministère de l’Éducation a exhorté les conseils scolaires à «maintenir les écoles ouvertes» si possible, ou alors «soutenir les élèves dans une transition rapide vers l’apprentissage à distance».

Plusieurs conseils scolaires de l’Ontario ont déclaré vendredi qu’ils passeraient indéfiniment à l’apprentissage à distance la semaine prochaine en cas de poursuite de la grève.

Le conseil scolaire du district de Toronto (TDSB) – qui avait précédemment affirmé que les écoles seraient fermées jusqu’à la fin de la grève – a déclaré vendredi qu’il espérait la conclusion d’un accord, mais qu’il devra passer à l’apprentissage à distance si l’action se poursuit.

«Les élèves du TDSB commenceront la transition vers l’apprentissage synchrone (en direct, interactif) au début de la semaine prochaine, si la grève se poursuit», a déclaré le conseil dans une note envoyée aux parents.

Le conseil scolaire catholique du district de Toronto (TDCSB) et le conseil scolaire catholique du district de York (YCDSB) ont déclaré que leurs écoles resteraient fermées la semaine prochaine en cas de grève prolongée et que les élèves commenceraient l’apprentissage à distance lundi.

Dans la région de Peel, le conseil scolaire a indiqué que les écoles resteront fermées lundi en cas de grève, et que les élèves commenceront l’apprentissage à distance mardi s’il y a poursuite des moyens de pression.

Le gouvernement avait d’abord proposé des augmentations de 2 % par année pour les travailleurs gagnant moins de 40 000 dollars et de 1,25 % pour tous les autres. Le ministre Lecce a précisé cette semaine que la nouvelle convention de quatre ans décrétée par loi spéciale accorderait 2,5 % par année aux travailleurs gagnant moins de 43 000 $ et 1,5 % pour tous les autres.

Mais selon le SCFP, ce cadre n’est pas tout à fait exact, car les augmentations dépendent des salaires horaires et des échelles salariales, de sorte que la majorité des travailleurs qui gagnent moins de 43 000 $ par an n’obtiendraient pas 2,5 %. Le SCFP plaide que ces travailleurs, qui gagnent en moyenne 39 000 $ par année, sont généralement les moins bien payés dans tout le réseau. Le syndicat demandait des augmentations de salaire annuelles de 11,7 %.