Des délégués du NPD manifestent pour une posture pro-palestinienne plus forte

HAMILTON — Des délégués ont manifesté dans le corridor du centre de congrès où se déroule le grand rendez-vous néo-démocrate à Hamilton, en Ontario, au moment même où le chef du parti, Jagmeet Singh, prononçait un discours pour galvaniser et rallier les militants.

L’incident visant à contester la position du parti sur le conflit israélo-palestinien a ensuite mené à une perturbation de la poursuite des débats sur les résolutions mises de l’avant par des délégués.

Des néo-démocrates se sont levés et ont haussé le ton pour dénoncer la façon dont les hauts rangs du parti ont géré la manifestation, enterrant ainsi la voix des députés et de la représentante du parti modérant les discussions.

L’élue Heather McPherson, qui est la porte-parole du Nouveau Parti démocratique (NPD) en matière d’Affaires étrangères, a exhorté les délégués à cesser de «crier les uns sur les autres».

Visiblement émotive, elle a défendu la position exprimée par sa formation politique au cours des derniers jours, plaidant que le NPD dénonce toute forme de violations des droits de la personne, que ce soit du côté israélien ou du côté palestinien.

Les personnes qui ont manifesté en marge du discours de M. Singh estiment que le NPD ne se porte pas suffisamment à la défense des droits des Palestiniens.

Un membre du caucus socialiste du NPD, Barry Weisleder, était présent durant l’acte de contestation et a raconté à La Presse Canadienne que plusieurs manifestants se sont mis à crier «Palestine libre!».

Il a affirmé que cela n’était pas son initiative, mais qu’il était d’accord avec le message qui était lancé.

Selon Jennifer Howard, cheffe de cabinet de M. Singh, les manifestants qui ont entrepris la contestation n’étaient pas des délégués.

«Certains délégués ont quitté la salle (plénière du congrès) pour se joindre à eux et les gens qui se sont présentés (initialement) pourraient être ou ne pas être membres du parti», a-t-elle dit.

Elle a affirmé que les délégués qui se sont joints aux manifestants ont contrevenu à la politique du NPD sur le harcèlement.

Mme Howard a indiqué que l’accréditation de quatre délégués a, par conséquent, été retirée. Cela leur enlève leur droit de vote sur les résolutions et fait en sorte que la personne présidant les débats ne reconnaît pas leur droit de parole, a expliqué une porte-parole du parti.

Questionné par les journalistes à savoir si la politique sur le harcèlement pouvait avoir le dos large, M. Singh n’a pas répondu directement à la question.

Il a fait valoir qu’il ne pouvait pas aller loin dans ses commentaires, soulignant qu’il n’était pas présent durant la manifestation puisqu’il prononçait une allocution.

Il a toutefois affirmé qu’il souhaitait créer un environnement sain pour tous et exempt de harcèlement, de façon générale.

La police de Hamilton a indiqué sur le réseau social X (anciennement Twitter) qu’elle mène une enquête pour une agression contre un garde de sécurité survenue en marge du congrès du NPD. Selon le corps policier, les faits allégués sont survenus durant la manifestation qui s’est déroulée au centre des congrès et qui réunissait «25 à 30 personnes».

M. Singh s’est dit inquiet, en mêlée de presse, des faits allégués.

M. Weisleder estime qu’il a été «faussement accusé» par les hauts dirigeants du NPD de perturber le congrès. Selon ses dires, une haute responsable de la formation politique a tenté de l’empêcher d’entrer dans la salle plénière du congrès, ce qu’il a dénoncé comme étant «illégitime».

Lignes de fracture

L’incident a exposé des lignes de fracture dans les rangs du NPD au chapitre du soutien qui doit être exprimé envers le peuple palestinien.

M. Singh a abordé le conflit israélo-palestinien durant son discours, prononcé quelques minutes avant de se soumettre à un traditionnel vote de confiance auprès des membres du NPD. «Il ne peut y avoir aucune justification pour la torture, le meurtre et la violence sexuelle commis par le Hamas», a-t-il dit.

Il a pris soin de souligner que la guerre au Proche-Orient fait des victimes tant en Israël qu’en Palestine.

«Nous devons appeler à la fin immédiate des meurtres de civils innocents à Gaza», a-t-il poursuivi. La foule de délégués présents dans la salle l’a aussitôt applaudi à tout rompre, les militants du parti se levant pour une ovation debout.

Plus tard samedi, les délégués ont adopté une résolution d’urgence visant à ce que le NPD demande «la fin du siège total de Gaza par Israël, qui est interdit par le droit international».

«Les néo-démocrates appellent le Canada à plaider pour la libération de tous les otages (…), (à) exiger un cessez-le-feu et une aide humanitaire vitale pour les habitant(e)s de Gaza, (à) soutenir les enquêtes de la CPI et de la CIJ sur les crimes de guerre», peut-on lire dans la résolution adoptée.

Les débats entourant cette résolution se sont déroulés sans fracas, ce qui a contrasté avec le ton des échanges incisifs survenus plus tôt.

Vers l’heure du dîner, une source néo-démocrate avait indiqué à La Presse Canadienne être inquiète de la tournure que pourrait prendre le débat. Cette personne a souligné que le choix d’un seul mot plutôt qu’un autre était susceptible de faire déraper la discussion.

Cette source s’exprimait sous le couvert de l’anonymat afin de faire valoir plus librement ses préoccupations.

Vote de confiance

Le chef néo-démocrate Jagmeet Singh a recueilli 81 % d’appui lors du vote de confiance sur son leadership.

Dans les hauts rangs du parti, on ne cachait l’optimisme que le chef obtienne un solide taux d’appui de la part des délégués, au jour deux du grand rendez-vous de la base militante du NPD.

C’est finalement plusieurs points de pourcentage de moins que les scores précédents que M. Singh a recueillis.

Le chef du NPD, qui a pris la tête du parti en 2017, a reçu un score de 87 % en avril 2021. Il avait précédemment obtenu un taux d’appui de 91 % en 2018.

Malgré la baisse de sa popularité, M. Singh a déclaré aux journalistes avoir reçu un «mandat fort» des délégués. Il croit que le message que ceux-ci lui ont envoyé est d’exiger davantage à l’endroit du gouvernement minoritaire de Justin Trudeau, avec qui il est lié par un accord de soutien et de confiance.

«Moi, je veux qu’on utilise le pouvoir qu’on a pour faire en sorte qu’Ottawa travaille pour monsieur et madame Tout-le-Monde — plutôt que pour les ultrariches», avait lancé M. Singh à l’adresse des délégués, peu de temps avant que ceux-ci ne commencent à voter.

Le chef du NPD a consacré le plus clair de son discours à attaquer les libéraux de Justin Trudeau, mais aussi les conservateurs de Pierre Poilievre, les accusant notamment d’avoir aggravé la crise du logement par leur inaction.

— Avec des informations de Mickey Djuric.