Carl Girouard condamné à la prison à vie; son avocat fait appel du verdict du jury

L’auteur des attaques au sabre dans le Vieux-Québec passera encore au moins les 23 prochaines années derrière les barreaux, après avoir été reconnu coupable de meurtres au premier de degré et de tentatives de meurtre. Un verdict de culpabilité qui est désormais contesté devant la Cour d’appel. 

Sans surprise, le juge Richard Grenier a condamné vendredi Carl Girouard à l’emprisonnement à vie, sans possibilité de libération avant 25 ans, pour avoir tué François Duchesne et Suzanne Clermont, le soir de l’Halloween 2020. 

Girouard sera admissible à une libération conditionnelle à partir du 31 octobre 2045, en tenant compte des deux années déjà passées en prison.

L’homme âgé dans la vingtaine a aussi été condamné à une peine concurrente de 10 ans de détention pour les cinq tentatives de meurtre. 

«Vous avez commis des crimes absolument atroces», a commenté le juge Grenier avant de prononcer sa sentence, au palais de justice de Québec. 

«Vous avez pris la vie de deux personnes et vous avez détruit la vie d’une multitude de personnes», a-t-il poursuivi, soulignant que les victimes et leur entourage restent avec des séquelles sur le plan physique et psychologique, et que leur «vie ne sera jamais la même». 

Quelques minutes plus tôt, des victimes et des proches de Mme Clermont et de M. Duchesne ont fait part de la souffrance et des conséquences qu’ils vivent encore deux ans après les agressions.

«La tristesse m’envahit chaque fois que je pense à lui, et cette tristesse nous suivra jusqu’à notre dernier souffle. Rien ne pourra jamais guérir cette absence», a témoigné en vidéoconférence l’une des sœurs de François Duchesne, Marie-Josée, dans le cadre des observations sur la peine.  

La belle-sœur de Suzanne Clermont, Marie-Claude Veilleux, a décrit comment le conjoint de la victime a été affecté après avoir été témoin d’une «partie de l’horreur» commise par Girouard. 

«Il a dû être suivi en psychothérapie pendant plusieurs mois, pour aujourd’hui pouvoir à peine garder la tête hors de l’eau. Sa vie est en dents de scie», a-t-elle affirmé dans la salle d’audience. 

Sa déclaration rendait également hommage à Mme Clermont, la décrivant comme une personne aimant la vie. 

«Suzanne était un actif pour la société. J’ignore si un jour vous allez en devenir un. Mais dans l’intervalle, vous avez un immense passif à rembourser», a mentionné Mme Veilleux, invitant Girouard à réfléchir durant sa détention à tout le mal qu’il a fait. 

Dans une lettre transmise et lue par le procureur de la Couronne, Me François Godin, une des victimes blessées par le sabre de style japonais — appelé «katana» — a détaillé ses problèmes de sommeil, les impacts sur sa vie professionnelle et ses craintes à l’égard de sa sécurité. 

Me Godin a salué le courage de ces témoignages à la sortie de la salle d’audience. 

«C’était important pour eux de le faire. Je tenais à souligner toute leur force de caractère dans ce qu’ils ont fait aujourd’hui à la cour», a-t-il déclaré aux journalistes.  

Demande d’appel

L’annonce de la sentence survient alors que l’avocat de Girouard a déposé un avis d’appel afin de renverser la décision du jury rendue le 20 mai ou pour ordonner un nouveau procès.

Me Pierre Gagnon avait déjà fait part de son intention de porter la cause en appel, au moment du verdict. 

Dans sa demande adressée à la Cour d’appel du Québec, en date du 9 juin, Me Gagnon avance trois erreurs commises par le juge Grenier pour motiver sa démarche.  

L’une d’elles est d’avoir omis de donner des directives au jury quant à l’interprétation qu’il devait faire du silence de Girouard lors de l’interrogatoire policier. En l’absence des jurés, le juge avait mentionné que l’accusé était dans son droit de garder le silence en vertu de la Charte des droits et libertés.

Me Gagnon déplore également le maintien d’une objection du tribunal l’empêchant de contre-interroger un expert psychiatre de la Couronne sur des décisions de la Cour d’appel, qui lui reprochaient des commentaires personnels lors de témoignages au cours de procès antérieurs. 

Les jurés n’ont pas retenu la défense de Carl Girouard au cours du procès. Il prétendait être non criminellement responsable pour cause de troubles mentaux et qu’il ne pouvait pas dissocier le bien du mal lors des meurtres. 

Le juge Grenier a dit au moment de la sentence être d’accord avec le verdict du jury, bien qu’il est «convaincu» que Girouard souffre de problèmes mentaux. 

«Je vais recommander qu’on vous examine, qu’on vous aide en psychiatrie. (…) J’espère que vous participerez à tout ce qu’on vous soumettra comme expertise, de façon à faire de votre détention quelque chose de positif, à apprendre un métier, à régler vos problèmes de santé mentale», a-t-il dit à Girouard.  

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Cet article a été produit avec le soutien financier des Bourses Meta et La Presse Canadienne pour les nouvelles.