Le président du Congrès américain Kevin McCarthy démis de ses fonctions par ses pairs

WASHINGTON — Le président du Congrès américain Kevin McCarthy a été démis de ses fonctions mardi après-midi, une première dans l’histoire des États-Unis. Le vote de 216 à 210, forcé par un contingent de conservateurs d’extrême droite, jette la Chambre des représentants et ses dirigeants républicains dans une situation difficile, voire chaotique.

Le principal rival de M. McCarthy, le représentant Matt Gaetz de Floride, a présenté une «motion de libération du fauteuil» – quelque chose qui ne s’est pas produit au Congrès depuis un siècle, rassemblant plus d’une poignée de critiques républicains conservateurs du président et de nombreux démocrates qui disent qu’il est indigne de diriger la Chambre.

C’est un moment stupéfiant pour M. McCarthy. Cette punition alimentée par des griefs croissants a été déclenchée par sa décision, samedi, de travailler avec les démocrates pour maintenir le gouvernement fédéral opérationnel jusqu’au 17 novembre plutôt que de risquer une rupture temporaire des services gouvernementaux. 

Une décision qui a déplu aux républicains, dont certains auraient préféré une pause des services fédéraux alors qu’ils luttent pour des réductions plus importantes des dépenses.

Les démocrates sont également mécontents que M. McCarthy ait renoncé à l’accord sur la dette qu’il a conclu avec le président Joe Biden plus tôt cette année et qui fixait déjà les niveaux de dépenses fédérales.

Il avait fallu à M. McCarthy 15 tours en janvier, répartis sur plusieurs jours de vote, avant d’obtenir le soutien de ses collègues pour remporter son siège. 

Aucun successeur évident pour diriger la majorité républicaine de la Chambre ne semble se manifester.

Débat

Déjà, les opposants à M. McCarthy avaient laissé entendre au cours des derniers jours que celui-ci ne bénéficierait pas de leur appui si un vote de confiance était demandé.

Le leader démocrate Hakeem Jeffries avait déclaré dans une lettre à ses collègues qu’il souhaitait travailler avec les républicains, mais qu’il n’était pas disposé à fournir les voix nécessaires pour sauver M. McCarthy.

«Il est désormais de la responsabilité des membres du (Parti républicain) de mettre fin à la guerre civile à la Chambre», a déclaré M. Jeffries, annonçant que les dirigeants démocrates voteraient pour la motion visant à évincer le président.

«C’est un triste jour» a déclaré plus tôt mardi le représentant républicain Tom Cole, de l’Oklahoma, alors que le débat commençait, exhortant ses collègues à ne pas plonger la majorité républicaine de la Chambre «dans le chaos».

Mais M. Gaetz, l’un des principaux alliés de Donald Trump, a rétorqué pendant le débat : «Le chaos, c’est le président McCarthy ».

Jim Jordan, républicain de l’Ohio, l’un des dirigeants fondateurs du Freedom Caucus, a défendu M. McCarthy. «Je pense qu’il a tenu parole», a-t-il dit.

Dans une réunion privée tenue avant le vote crucial, M. McCarthy a insisté sur le fait qu’il n’avait pas demandé de l’aide au leader démocrate Jeffries pour conserver son poste, et qu’il n’avait pas non plus exigé quoi que ce soit en retour.

Au cours de la réunion d’une heure dans les sous-sols du Capitole, M. McCarthy a invoqué le dernier président républicain, Joseph Cannon, qui, il y a plus de 100 ans, a affronté ses détracteurs de front en les appelant au bluff et en organisant lui-même le vote sur son éviction. M. Cannon avait  survécu à cette tentative de retrait qui, jusqu’à présent, était la première fois que la Chambre votait en faveur de la destitution de son président de la Chambre. Une menace plus récente, en 2015, n’a pas fait l’objet d’un vote.

M. McCarthy a reçu trois ovations au cours de la réunion privée – une lorsqu’il est venu au micro pour parler, une deuxième fois lors de ses remarques et enfin lorsqu’il a terminé, selon un républicain présent à la réunion et qui a accordé l’anonymat pour en discuter.

Au même moment, de l’autre côté du Capitole, les démocrates se sont alignés pour une longue discussion et se sont unis autour d’un point commun : on ne peut pas faire confiance à M. McCarthy, ont déclaré plusieurs législateurs présents dans la salle.

«Le pays a besoin d’un représentant sur lequel on peut compter, a déclaré le représentant Adam Schiff, démocrate de Californie. Nous ne lui faisons pas confiance. Leurs membres ne lui font pas confiance. Et il faut un certain degré de confiance pour être le président.»