Cinq patients seraient morts dans un hôpital de Gaza

RAFAH, Palestine — Cinq patients en soins intensifs sont décédés à la suite d’une coupure d’oxygène dans le principal hôpital du sud de Gaza qui a été pris d’assaut par les troupes israéliennes, provoquant le chaos pour des centaines de membres du personnel et de blessés qui se trouvaient à l’intérieur, ont déclaré vendredi des responsables de la santé.

Les troupes fouillaient le complexe où l’armée a déclaré qu’elle pensait que les restes des otages enlevés par le Hamas pourraient se trouver. 

Ce raid intervient après que les troupes aient assiégé l’hôpital Nasser, dans la ville de Khan Younès, pendant près d’une semaine. Le personnel, les patients et les autres personnes présentes à l’intérieur ont dû faire face à des tirs nourris et à une diminution des ressources, notamment de la nourriture et de l’eau. L’armée israélienne a déclaré vendredi qu’elle avait arrêté des dizaines de personnes dans l’établissement, dont certaines auraient été impliquées dans l’attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre.

Les négociations en vue d’un cessez-le-feu à Gaza semblent être dans l’impasse, et le premier ministre israélien Benjamin Nétanyahou s’est fermement opposé vendredi à la vision américaine de l’après-guerre, en particulier à son appel à la création d’un État palestinien. Après s’être entretenu cette nuit avec le président Joe Biden, M. Nétanyahou a écrit sur X qu’Israël n’accepterait pas «les diktats internationaux concernant un règlement permanent avec les Palestiniens».

Il a ajouté que si d’autres pays reconnaissaient unilatéralement un État palestinien, cela reviendrait à «récompenser le terrorisme». M. Nétanyahou a rejeté à plusieurs reprises la création d’un État palestinien. 

M. Nétanyahou a promis de poursuivre l’offensive et de l’étendre à la ville de Rafah, près de l’Égypte, jusqu’à ce que le Hamas soit détruit et que les otages pris lors de l’attaque du 7 octobre soient libérés. Lors de leur conversation téléphonique, M. Biden a de nouveau mis en garde M. Nétanyahou contre une opération militaire à Rafah avant d’avoir présenté un «plan crédible et exécutable» pour assurer la sécurité des civils palestiniens, a indiqué la Maison-Blanche.

Deux frappes aériennes israéliennes sur Rafah dans la nuit ont tué au moins dix personnes, dont sept membres d’une même famille, selon des responsables hospitaliers.

La guerre ne montrant aucun signe de fin, le risque d’un conflit plus large s’est accru alors qu’Israël et le groupe militant libanais Hezbollah ont procédé à l’échange de tirs le plus meurtrier le long de la frontière depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas. Israël a lancé des frappes aériennes dans le sud du Liban pour une deuxième journée jeudi, après avoir tué dix civils et trois combattants du Hezbollah mercredi, en réponse à une attaque à la roquette qui a tué un soldat israélien et en a blessé plusieurs autres. 

SCÈNES DE PANIQUE À L’HÔPITAL

L’hôpital Nasser est le dernier d’une série d’hôpitaux que les forces israéliennes ont assiégés et pris d’assaut pendant la guerre, sous prétexte que le Hamas les utilisait à des fins militaires. Ces assauts ont vidé de sa substance le secteur de la santé de Gaza, qui s’efforce de soigner un flot constant de personnes blessées par les bombardements quotidiens. 

L’armée a assuré jeudi qu’elle disposait de «renseignements crédibles» selon lesquels le Hamas avait détenu des otages dans ce bâtiment et que les dépouilles des otages pouvaient encore s’y trouver. Vendredi, l’armée a déclaré que ses troupes continuaient à fouiller l’hôpital, mais n’a pas indiqué avoir trouvé de corps. 

Elle a ajouté avoir arrêté vingt personnes soupçonnées d’avoir participé à l’attentat du 7 octobre, et que des dizaines de personnes ont été emmenées pour être interrogées. Elle a également indiqué que les troupes avaient trouvé des grenades et des obus de mortier, et que des militants avaient tiré des mortiers depuis l’intérieur de l’hôpital il y a un mois. Ces affirmations n’ont pas pu être confirmées de manière indépendante.

Le mois dernier, une otage libérée a déclaré à l’Associated Press qu’elle et plus de deux douzaines d’autres captifs avaient été détenus à l’hôpital Nasser.

Au cours de leurs recherches, les troupes ont ordonné aux 460 membres du personnel, aux patients et à leurs proches de s’installer dans un bâtiment plus ancien du complexe, qui n’est pas équipé pour traiter les patients, a indiqué le ministère de la Santé de Gaza. Six patients ont été laissés dans l’unité de soins intensifs sans personne pour les surveiller, ainsi que trois nourrissons en couveuse, a indiqué le ministère. 

Vendredi, le ministère a annoncé que cinq de ces patients étaient décédés à la suite d’une coupure d’électricité qui avait interrompu l’approvisionnement en oxygène. «L’occupation israélienne est responsable de la vie des patients et du personnel, car le complexe est désormais sous son contrôle total», a déclaré le ministère. Il a ajouté que des troupes s’étaient installées dans le service de maternité de l’hôpital et y amenaient des patients de sexe masculin, apparemment pour les interroger. 

Des troupes israéliennes, des chars et des tireurs d’élite encerclent l’hôpital Nasser depuis au moins une semaine, alors que la nourriture, l’eau et les fournitures à l’intérieur s’amenuisent et que des tirs provenant de l’extérieur ont tué plusieurs personnes à l’intérieur, selon les responsables de la santé. Quelques heures avant que les troupes n’entrent dans l’hôpital jeudi, des tirs israéliens ont tué un patient et en ont blessé six autres, selon le personnel. 

Dans un communiqué publié vendredi, le Hamas a nié que ses combattants utilisaient l’hôpital Nasser à des fins militaires, qualifiant ces accusations de «mensonges diffusés pour justifier le crime de guerre».

Le droit international interdit de prendre pour cible les installations médicales, bien qu’elles puissent perdre cette protection si elles sont utilisées à des fins militaires. Même dans ce cas, Israël doit prendre des précautions et respecter les principes de proportionnalité, a rappelé le Bureau des droits de l’homme des Nations unies, ajoutant qu’«en tant que puissance occupante», Israël a le devoir d’entretenir les installations médicales.

PAS DE FIN EN VUE POUR LA GUERRE

La guerre a commencé lorsque les militants du Hamas ont fait irruption dans la bande de Gaza le 7 octobre et ont attaqué plusieurs communautés israéliennes, tuant quelque 1200 personnes et en prenant 250 autres en otage. Plus de 100 captifs ont été libérés lors d’un cessez-le-feu en novembre, en échange de 240 prisonniers palestiniens. Il reste environ 130 otages à Gaza, dont un quart serait mort. 

Israël a répondu à l’attaque du Hamas par l’une des campagnes militaires les plus meurtrières et les plus destructrices de l’histoire récente.

Au moins 28 775 Palestiniens ont été tués, principalement des femmes et des enfants, et plus de 68 500 ont été blessés, selon le ministère de la Santé de Gaza, qui ne fait pas de distinction entre les civils et les combattants. Environ 80 % de la population a été chassée de chez elle et un quart meurt de faim, dans un contexte d’aggravation de la catastrophe humanitaire. De vastes zones du nord de la bande de Gaza, première cible de l’offensive, ont été complètement détruites.

Les médias israéliens ont rapporté que le directeur de la CIA, William Burns, s’était envolé pour Israël afin de rencontrer M. Nétanyahou et de discuter des efforts en vue d’un cessez-le-feu.

Le Hamas affirme qu’il ne libérera pas tous les otages restants tant qu’Israël n’aura pas mis fin à son offensive, ne se sera pas retiré et n’aura pas libéré les prisonniers palestiniens, y compris les principaux militants.

M. Nétanyahou a rejeté ces demandes et a prévenu qu’Israël étendrait bientôt son offensive à Rafah, la ville la plus méridionale de Gaza. Plus de la moitié des 2,3 millions d’habitants de Gaza ont trouvé refuge à Rafah après avoir fui les combats ailleurs.

L’ÉGYPTE CONSTRUIT UN MUR

L’Égypte construit un mur et nivelle des terres près de sa frontière avec la bande de Gaza avant une offensive israélienne prévue visant la ville frontalière de Rafah, selon des images satellitaires analysées vendredi par l’Associated Press.

L’Égypte, qui n’a pas reconnu publiquement la construction, a averti à plusieurs reprises Israël de ne pas expulser par la force les plus d’un million de Palestiniens actuellement déplacés à Rafah, de l’autre côté de la frontière, vers son territoire, alors qu’il combat le groupe militant Hamas pour un cinquième mois.

Toutefois, les préparatifs du côté égyptien de la frontière, dans la péninsule du Sinaï, suggèrent que Le Caire se prépare précisément à ce scénario, qui pourrait mettre en péril l’accord de paix conclu en 1979 avec Israël et qui a été un pilier de la sécurité régionale.

Le gouvernement égyptien n’a pas répondu aux demandes de commentaires de l’AP. Le 11 février, le ministère égyptien des Affaires étrangères a publié un communiqué mettant en garde Israël contre son éventuelle offensive à Rafah et son «déplacement du peuple palestinien».

Les images satellitaires, prises jeudi par Maxar Technologies, montrent la construction en cours du mur, qui se trouve le long de la route Sheikh Zuweid-Rafah, à environ 3,5 kilomètres à l’ouest de la frontière avec Gaza. Les images montrent des grues, des camions et ce qui semble être des barrières en béton préfabriqué installées le long de la route.

Ces images satellitaires correspondent à des éléments visibles dans une vidéo publiée le 12 février par la Fondation du Sinaï pour les droits de l’homme, basée à Londres. La vidéo montre une grue qui soulève des murs de béton pour les mettre en place le long de la route.

La construction «vise à créer une zone isolée et clôturée de haute sécurité près des frontières avec la bande de Gaza, en préparation de l’accueil des réfugiés palestiniens dans le cas d’un exode massif», a déclaré la fondation.

À proximité, des équipes de construction semblent niveler et déblayer le terrain dans un but inconnu. C’est également ce que montrent les images de la zone prises par Planet Labs PBC. Le Wall Street Journal, citant des responsables égyptiens anonymes, a décrit «une enceinte fortifiée de 20 kilomètres carrés» en cours de construction dans la région, qui pourrait accueillir plus de 100 000 personnes.

Les maisons et les terres agricoles de la région avaient déjà été rasées lors de la guerre menée par l’Égypte contre une filiale du groupe État islamique dans la région.

Des responsables de la ligne dure au sein du gouvernement du premier ministre israélien Benjamin Nétanyahou ont évoqué la possibilité de pousser les Palestiniens hors de la bande de Gaza, ce à quoi s’oppose fermement le principal allié d’Israël, les États-Unis. La bande de Gaza et la Cisjordanie occupée sont des territoires que les Palestiniens espèrent avoir pour leur futur État.