Ce qu’il faut savoir au sujet des prix Nobel

STOCKHOLM — L’automne est arrivé en Scandinavie, ce qui signifie que la saison des prix Nobel est là.

Début octobre, les comités Nobel se réunissent à Stockholm et à Oslo pour annoncer les lauréats des prix annuels.

Comme d’habitude, le prix Nobel de médecine ou de physiologie a été décerné lundi. Il a été octroyé à deux scientifiques pour des découvertes qui ont permis la mise au point de vaccins à ARNm contre la COVID-19.

Mardi, trois scientifiques ont remporté le prix de physique pour leurs travaux sur la façon dont les électrons se déplacent dans l’atome pendant les fractions de secondes les plus infimes.

Les prix de chimie, de littérature, de paix et d’économie suivront, avec une annonce chaque jour de la semaine jusqu’au 9 octobre.

Voici ce qu’il faut savoir au sujet des prix Nobel :

UNE IDÉE PLUS PUISSANTE QUE LA DYNAMITE

Les prix Nobel ont été créés par Alfred Nobel, un homme d’affaires et chimiste suédois du XIXe siècle. Il détenait plus de 300 brevets, mais son titre de gloire avant les prix Nobel était d’avoir inventé la dynamite en mélangeant de la nitroglycérine avec un composé qui rendait l’explosif plus stable.

La dynamite est rapidement devenue populaire dans la construction et l’exploitation minière, ainsi que dans l’industrie de l’armement. Cette invention a fait de M. Nobel un homme très riche. Peut-être cela l’a-t-il également amené à réfléchir à son héritage, car vers la fin de sa vie, il a décidé d’utiliser son immense fortune pour financer des prix remis annuellement «à ceux qui, au cours de l’année précédente, ont apporté le plus grand bénéfice à l’humanité».

Les premiers prix Nobel ont été décernés en 1901, cinq ans après sa mort. En 1968, un sixième prix a été créé, pour l’économie, par la banque centrale de Suède. Bien que les puristes du prix Nobel soulignent que le prix d’économie n’est techniquement pas un prix Nobel, il est toujours décerné en même temps que les autres.

LA PAIX EN NORVÈGE

Pour des raisons qui ne sont pas tout à fait claires, M. Nobel a décidé que le prix de la paix serait décerné en Norvège et les autres prix en Suède. Les historiens du prix Nobel pensent que le passé militariste de la Suède a pu jouer un rôle dans cette décision.

Du vivant de M. Nobel, la Suède et la Norvège formaient une union, à laquelle les Norvégiens avaient adhéré à contrecœur après l’invasion de leur pays par les Suédois en 1814. Il est possible que M. Nobel ait pensé que la Norvège serait un lieu plus approprié pour un prix destiné à encourager la «fraternité entre les nations».

À ce jour, le prix Nobel de la paix est une affaire entièrement norvégienne, les lauréats étant sélectionnés et annoncés par un comité norvégien. Le prix de la paix a même sa propre cérémonie à Oslo, la capitale norvégienne, le 10 décembre, date anniversaire de la mort de M. Nobel, alors que les autres prix sont remis à Stockholm.

QUEL EST LE RAPPORT AVEC LA POLITIQUE?

Les prix Nobel donnent l’impression d’être au-dessus de la mêlée politique et de ne s’intéresser qu’au bien de l’humanité. Mais les prix de la paix et de la littérature, en particulier, sont parfois accusés d’être politisés. Les détracteurs se demandent si les lauréats sont sélectionnés parce que leur travail est vraiment exceptionnel ou parce qu’il correspond aux préférences politiques des juges.

L’examen minutieux peut devenir intense pour les prix très médiatisés, comme en 2009, lorsque le président Barack Obama a reçu le prix de la paix moins d’un an après son entrée en fonction.

Le comité Nobel norvégien est un organisme indépendant qui insiste sur le fait que sa seule mission est d’exécuter la volonté d’Alfred Nobel. Il a toutefois des liens avec le système politique norvégien. Les cinq membres sont nommés par le Parlement norvégien, de sorte que la composition du comité reflète l’équilibre des pouvoirs au sein du corps législatif.

Pour éviter de donner l’impression que les prix sont influencés par les dirigeants politiques norvégiens, les membres en exercice du gouvernement ou du parlement norvégien ne peuvent pas siéger au comité. Malgré cela, le comité n’est pas toujours considéré comme indépendant par les pays étrangers. Lorsque le dissident chinois emprisonné Liu Xiaobo a reçu le prix de la paix en 2010, Pékin a réagi en gelant les négociations commerciales avec la Norvège. Il a fallu des années pour que les relations entre la Norvège et la Chine se rétablissent.

L’OR ET LA GLOIRE

L’une des raisons pour lesquelles les prix sont si célèbres est qu’ils sont assortis d’une généreuse somme d’argent. La Fondation Nobel, qui administre les prix, a augmenté le montant du prix de 10 % cette année, pour le porter à 11 millions de couronnes (environ 1,35 million de dollars canadiens). En plus de l’argent, les lauréats reçoivent une médaille en or 18 carats et un diplôme lorsqu’ils reçoivent leur prix Nobel lors de la cérémonie de remise des prix en décembre. 

La plupart des lauréats sont à la fois fiers et humbles de rejoindre le panthéon des lauréats du prix Nobel, d’Albert Einstein à Mère Teresa. Mais deux lauréats ont refusé leur prix Nobel : l’écrivain français Jean-Paul Sartre, qui a refusé le prix de littérature en 1964, et le politicien vietnamien Le Duc Tho, qui a refusé le prix de la paix qu’il devait partager avec le diplomate américain Henry Kissinger en 1973.

Plusieurs autres n’ont pas pu recevoir leur prix parce qu’ils étaient emprisonnés, comme le militant bélarussien pour la démocratie Ales Bialiatski, qui a partagé le prix de la paix de l’année dernière avec des groupes de défense des droits de l’homme en Ukraine et en Russie.

LE MANQUE DE DIVERSITÉ

Historiquement, la grande majorité des lauréats du prix Nobel sont des hommes blancs. Bien que cela ait commencé à changer, il y a encore peu de diversité parmi les lauréats du prix Nobel, en particulier dans les catégories scientifiques.

Avec l’annonce de lundi, 61 femmes ont obtenu un prix Nobel, dont 26 dans les catégories scientifiques. Seules quatre femmes ont remporté le prix Nobel de physique et deux seulement le prix d’économie.

Au début de l’existence des prix Nobel, le manque de diversité parmi les lauréats pouvait s’expliquer par le manque de diversité parmi les scientifiques en général. Mais aujourd’hui, les détracteurs affirment que les juges doivent mieux mettre en valeur les découvertes faites par les femmes et les scientifiques hors d’Europe et d’Amérique du Nord.

Les comités des prix affirment que leurs décisions sont fondées sur le mérite scientifique, et non sur le sexe, la nationalité ou la race. Toutefois, ils ne sont pas sourds aux critiques. Il y a cinq ans, le directeur de l’Académie royale des sciences de Suède a déclaré que son institution avait commencé à demander aux organismes de nomination de s’assurer qu’ils ne négligent pas «les femmes ou les personnes d’autres ethnies ou nationalités dans leurs nominations».