Trois générations de techniciens dentaires
Laboratoire dentaire 3R fabrique des prothèses dentaires pour plusieurs cliniques à travers le Québec. La famille Dugré a vu trois générations de techniciens dentaires œuvrer dans le domaine, dont le patriarche qui a exercé cette profession avant même qu’on mette un nom sur le métier.
Le laboratoire est dirigé par Jeffrey Dugré. Son grand-père, Claude, a été un précurseur dans le domaine.
« Il a commencé à travailler pour des dentistes avant même que la denturologie soit inventée. On appelait ça des mécaniciens-dentistes dans le temps. Il réparait les appareils des dentistes et avec le temps il a appris à couler des empreintes et à faire quelques travaux de laboratoire. »
Claude Dugré a non seulement été un pionnier, mais il s’est vu décerner le titre prestigieux de sénateur de la denturologie.
« Quand on obtient ce titre-là, c’est qu’on a beaucoup aidé au développement et à la création de la denturologie. Mon père, Guy, est sénateur et un autre de ses frères, André, aussi. Ma famille a toujours contribué au développement de la profession dans tous les aspects, que ce soit dans la protection du public à l’Ordre des denturologistes, tout comme à l’Association des denturologistes. »
Le grand-père a transmis sa passion à ses enfants, puisque trois de ses fils ont embrassé la même carrière.
« Mon père et ses deux frères ont ouvert une clinique de denturologie. Lorsque c’est devenu une profession reconnue avec un ordre professionnel, mon grand-père était déjà technicien dentaire. C’est pour ça qu’on ne peut pas dire qu’on est rendu à près de 90 ans de pratique parce qu’auparavant, ce n’était pas reconnu. Moi, je suis technicien dentaire, mon père et ses frères sont techniciens dentaires et denturologistes. La différence entre les deux, c’est que les techniciens, on ne fait que la conception en laboratoire sous une ordonnance. Les denturologistes voient le patient, prennent des empreintes et ils font toutes les mêmes fabrications que nous. »
Dès l’adolescence, Jeffrey est attiré par le métier. Il n’a jamais vraiment songé à une autre carrière.
« J’avais 14 ans et je parlais déjà à mon père de racheter son entreprise. J’étais quelqu’un de très artistique qui voulait utiliser mes mains. J’ai commencé à travailler de soir, je cirais les prothèses et quand ils ont vu la qualité de ma main, ils ont dit que j’avais du potentiel. Ils ont commencé à me faire travailler l’été et ensuite, j’ai fait ma technique pendant trois ans. J’ai décidé de me spécialiser comme technicien parce que je voulais qu’il y ait une autre branche à l’entreprise. Quand je suis revenu, j’ai travaillé deux ans à temps plein pour avoir l’expérience nécessaire pour devenir directeur de laboratoire. J’ai ouvert ensuite mon laboratoire et ma famille était mon client principal. Maintenant, on dessert des cliniques à Montréal, en Gaspésie, à Amqui, à Gatineau, un peu partout. »
M. Dugré voit des avantages à être technicien dentaire sans être denturologiste.
« Avec un laboratoire, je dois focusser un peu plus, comme un pharmacien versus le médecin. Le pharmacien connaît tous les médicaments. Le médecin sait quoi donner mais le pharmacien va parfois guider les choix. Moi, je suis celui qui travaille tous les jours avec les matériaux, qui suit continuellement le développement, alors que les professionnels, comme les dendrologistes et dentistes, prennent une empreinte et on les guide sur ce qui est le mieux selon la situation. On a plus de temps pour se tenir informé sur les produits, l’évolution, l’impression 3D, les usineuses. »
Ayant vu évoluer les techniques de fabrication, Jeffrey Dugré est bien placé pour savoir ce qui a le plus changé.
« La seule différence, c’est vraiment les scanners, les usineuses. Avant, si faisait la même prothèse deux fois, elles étaient un peu différentes. Maintenant, avec la technologie, on peut vraiment répéter exactement la même prothèse. On peut s’aider avec les machines, mais on essaie toujours d’apporter la touche manuelle qu’on a appris depuis des générations. Notre défi va être de réussir à trouver notre place à côté des machines. D’ici 20 ou 30 ans, peut-être que les machines vont faire la grande majorité de la production, mais ils va toujours y avoir un humain pour faire l’assemblage final et un professionnel pour la mise en bouche, le contrôle, les ajustements, s’assurer que tout est conforme. Trouver la façon d’intégrer les technologies de la meilleure façon à nos côtés sans qu’elles prennent notre place. »
Y a-t-il de la relève dans la famille pour une quatrième génération de techniciens dentaires?
« Mon frère a deux enfants. Les enfants d’André ont plusieurs enfants. Ils sont encore assez jeunes mais ils démontrent déjà certains intérêts. Ceux qui ont dix ans sont toujours curieux quand ils viennent à la clinique. C’est la façon de les intégrer. On ne leur met pas de pression, on les laisse jouer avec le brûleur, la cire, comme quand on était jeunes. On leur fait faire des sculptures puis quand ils prennent plaisir à ça, ils veulent revenir. »