NEX-périence: quand le téléphone cellulaire s’invite dans les concerts classiques

Utiliser le téléphone cellulaire pour bonifier l’expérience des spectateurs lors d’un concert? Ça peut sembler contre-intuitif, mais c’est le pari que prennent les musiciens Valérie Milot et Stéphane Tétreault avec la technologie NEX-périence qu’ils ont conçue.

NEX-périence a lancé une technologie qui ouvre de nouvelles perspectives dans la diffusion de programmes de concerts sur téléphone cellulaire. Cherchant à rapprocher la musique classique du public, l’application permet aux spectateurs d’accéder à des informations synchronisées sur leur appareil mobile. NEX-périence ne requiert pas d’installation d’application ni d’abonnement, deux éléments essentiels aux yeux de ses créateurs.

« C’était d’abord une version préliminaire qu’on a créée pour le spectacle Transfigurations. On a utilisé une version préliminaire de l’application. Depuis, on a ajouté plusieurs modules d’engagement du public, comme des sondages et des questionnaires, détaille le violoncelliste Stéphane Tétreault. On a voulu rendre l’expérience interactive tout le long du concert. On a également beaucoup travaillé sur l’interface visuelle pour rendre le tout plus beau. Un gradateur de luminosité a été installé à même l’application. NEX-périence propose une expérience avant le concert, pendant et après le concert, alors que les gens ont l’opportunité de revenir vers le programme. L’idée est de rendre l’expérience la plus complète possible. »

L’application a été testée lors de 15 concerts avec cinq organismes culturels québécois, dont l’Orchestre symphonique de Trois-Rivières.

« Avec un orchestre, on est capable de synchroniser des informations sur une ligne du temps. Dans le cas d’une symphonie, ça va beaucoup varier selon l’interprétation, de sorte que ce n’est pas efficace de le faire de cette façon. Cela fait en sorte que pour l’instant, on doit avoir un opérateur qui suit la partition d’orchestre et qui active les informations au bon moment », explique Valérie Milot.

« La synchronisation est un gros enjeu. On est en démarrage d’un projet de recherche qui pourrait mener à la conception d’un module de reconnaissance audio des œuvres en musique classique, ajoute-t-elle. Il s’agirait, par exemple, de se baser sur une version de l’œuvre et l’application pourrait reconnaître les moments où activer certaines informations. »

Stéphane Tétreault et Valérie Milot suivent d’un œil intéressé les développements en cours en matière d’intelligence artificielle. « Les avancées en matière d’ intelligence artificielle sont très encourageantes. Pour nous, ça ferait une énorme différence de ne pas avoir besoin d’un opérateur sur place pour l’application. C’est un projet à long terme, mais ce serait fantastique », note Stéphane Tétreault.

La harpiste trifluvienne Valérie Milot et le violoncelliste Stéphane Tétreault ont fondé NEX-périence. (Photo Sylvain Foster Photographe – archives)

Ce dernier souligne également que la collecte des données par le biais de l’application pourra contribuer au renouvellement des publics. « L’application les collecte de façon légale et honnête, insiste-t-il. C’est certain qu’on a moins l’habitude en musique classique d’utiliser le téléphone cellulaire comme un outil. On propose de repenser ça légèrement pour les personnes ouvertes à l’essayer. Est-ce qu’on s’attend à une utilisation de 100% dans une salle de spectacle? Pas nécessairement. On veut développer un produit plus complet qui donne davantage de contexte sur une œuvre, mais qui ne dérange pas les personnes qui ne veulent pas l’utiliser. On y rappelle aussi aux gens de faire attention à la luminosité, à la sonnerie, aux notifications. »

« On ne veut pas que les gens fassent une utilisation de leur téléphone comme dans les concerts pop. En l’encadrant, on croit que ça peut amener une utilisation de façon constructive, renchérit la harpiste trifluvienne Valérie Milot. L’idée est d’accompagner différents moments. Pendant une performance, l’application demeure discrète. »

L’appréciation envers l’application s’est avérée élevée lors des concerts tests avec une appréciation moyenne de 90%. « Les gens se sentent parfois intimidés par la musique classique ou les arts de niche. Avec NEX-périence, on récolte des commentaires et on est capable de les partager avec l’organisation. L’application est aussi un bon guide qui fait remarquer de petites choses sur une œuvre. C’est aussi un vecteur ou un démarreur de conversation », mentionne Valérie Milot.

Cette technologie vient aussi répondre à une vision plus écologique recherchée par les organisations culturelles qui songent à délaisser le traditionnel programme de spectacle.

Ces jours-ci, le duo de musiciens entrepreneurs présente NEX-périence à l’événement RIDEAU, un important congrès qui rassemble des professionnels du milieu culturel, dans le but de développer les autres secteurs culturels. Une première entente a déjà été signée avec l’Orchestre classique de Montréal jusqu’à  la fin de la présente saison.