Compressions dans les cégeps: Une décision « odieuse »
Le Syndicat des professeures et professeurs du Cégep de Trois-Rivières et le Syndicat des enseignantes et enseignants du Cégep de Shawinigan dénoncent des compressions budgétaires annoncées en plein milieu de l’été, le 31 juillet dernier par la ministre de l’Enseignement supérieur, Pascale Déry, qui se traduisent par des coupures affectant les budgets de l’année en cours.
Les syndicats représentant les employés des deux cégeps de la Mauricie interpellent depuis une semaine la présidente du Conseil du Trésor et députée de Champlain, Sonia LeBel, afin d’obtenir une rencontre avec elle pour la sensibiliser aux conséquences des compressions qui touchent les budgets alloués au mobilier, à l’appareillage, à l’outillage, à la bibliothèque et aux investissements.
« On est en présence d’un gouvernement électoraliste qui instaure un climat d’austérité, déplore le président du SPPCTR, Jean Fournier. C’est un gouvernement de »paraître », un gouvernement électoraliste qui cherche simplement à diriger le Québec à partir d’une lecture de sondage. Qu’est-ce que l’État ne comprend pas en termes de priorité, en termes d’effets et de conséquences? On lance un cri très fort au gouvernement Legault, à Mme Lebel, à M. Caire aux Finances, à Mme Déry. J’ai certaines appréhensions en regard du prochain budget. Comment ça va se traduire? C’est odieux, le contexte dans lequel le gouvernement nous plonge. »
Les révisions budgétaires se traduisent par des coupures majeures. Au Cégep de Shawinigan, le seul budget dédié à l’infrastructure des bâtiments, amputé de plus de la moitié, passe de 2 150 000 $ à 975 000 $. Le président du SEECS, Luc Vandal, dénonce l’improvisation causée par les coupures faites sur les sommes planifiées pour l’année en cours.
« Un collège ne décide pas en deux semaines ce qu’il va faire. Ça nécessite des appels d’offres, des octrois de contrats. Actuellement, la direction gère les priorités. Des travaux qui étaient prévus cette année doivent être arrêtés, puis le collège restreint au maximum les dépenses déjà engagées. Il met fin à tout ce qu’il peut mettre fin et retient les budgets des départements aussi. Les laboratoires qui devaient être refaits, le gymnase, il va falloir que ce soit refait, on ne sait pas ce qui va arriver avec ça. »
Pour le Cégep de Trois-Rivières, « il faut normalement ajouter un zéro » aux coupures, selon M. Fournier.
« Juste la piscine, c’était un engagement de 17 millions de dollars pour lesquels le cégep de Trois-Rivières injectait quelques centaines de milliers de dollars. Les laboratoires, ce sont des centaines de milliers de dollars. Juste le lab de travail social, ç’a coûté un million de dollars. Imaginez-vous un lab à technique lourde. Ce qu’on nous dit, c’est ne développez pas ce que vous devez développer. La cafétéria, touchez-y pas, même si elle est en mal de rénovation. Le Cégep de Trois-Rivières deviendra l’un de ceux pour qui l’actif bâti devra être négligé. C’est un sacrifice qu’on ne peut pas faire. On nous plonge dans une totale impasse. C’est ingérable en ce début de session. On est à la sixième semaine. C’est ingérable si cela s’étirait sur plusieurs mois. »
Comme autre conséquence, les cégeps devront probablement se passer de certains investissements prévus par le gouvernement fédéral parce que le gouvernement provincial ne participe plus aux projets.
« Quand un programme implante une nouvelle séquence d’enseignement avec de nouvelles compétences, notamment dictées par le marché de l’emploi, on transforme nos labs, on les adapte, on ajoute de la machinerie. Ça nécessite de l’engagement financier. Assez souvent, c’est financé en partie par le provincial, en partie par le fédéral, mais aussi en partie issu de nos budgets. Et là, le provincial ferme son robinet. Le fédéral va retirer ses billes. C’est le contexte qu’on vit actuellement dans trois programmes, génie électrique, génie mécanique et techniques policières, qui ne pourront pas diplômer autant d’étudiantes ou d’étudiants formés, outillés, capables de répondre aux besoins des communautés. Cette décision-là, elle est odieuse, annoncée en pleine vacances. »
Les outils de documentation, comme la bibliothèque, sont les premiers à être touchés.
« L’exemple le plus patent, à portée immédiate, c’est la bibliothèque. Il n’y a plus aucun achat de livres. C’est inadmissible dans une maison du savoir qu’on ne puisse plus consolider la collection de livres. Quand nous enseignons, nous invitons nos étudiantes et étudiants à aller à la bibliothèque ou la matériauthèque pour consulter des livres, faire des recherches pour finir leur compréhension d’une problématique X ou d’un savoir Y. Là, les professeurs se sont fait refuser l’achat de livres parce que le robinet est fermé. »
Vers des moyens de pression?
M. Fournier souligne la solidarité qui unit autant le personnel que la direction des établissements.
« Les fédérations syndicales et patronales parlent d’une même voix. C’est original et ça arrive assez rarement. »
Il ne dévoile pas le plan des syndicats s’ils ne sont pas entendus par la ministre LeBel ou les autres membres du gouvernement du Québec, mais annonce que la mobilisation n’en restera pas là.
« Il y aura une autre étape. Ne me posez pas la question »quelle sera l’autre étape ». Il y en aura une autre parce qu’il faudra crier haut et fort que fermer le robinet comme on l’a fait, c’est inacceptable. »