Gorge profonde n’avait rien à voir avec la porno

Dans la nuit du 17 juin 1972, cinq hommes s’introduisent par effraction dans l’immeuble du Watergate, à Washington. Leur mission : installer des micros. L’ordre vient de la Maison Blanche, située à un kilomètre et demi.

Les cambrioleurs ont été soigneusement triés sur le volet. Rien à voir avec le petit criminel du coin. Les hommes du président Richard Nixon installés à la Maison Blanche avaient veillé à tout.

Trois des cinq cambrioleurs étaient des anciens agents de la CIA. Parmi eux figure un expert en écoute électronique. Les deux autres sont des Cubains d’origine.

Les cambrioleurs ne voulaient rien dérober. Juste poser des micros car le président Nixon voulait connaître la stratégie électorale du Parti démocrate, le parti rival. Nixon était républicain.

Les cinq hommes pénètrent dans l’hôtel du complexe immobilier qui sert de quartier général au Parti démocrate. Les gars ont beau être des professionnels , ils échouent. Un agent de la sécurité les a repérés. Il appelle la police.

En fouillant les présumés cambrioleurs, les policiers tombent sur du matériel d’écoute. Pire : des carnets d’adresse permettent aux enquêteurs de mettre la main sur des numéros de téléphone reliés à la Maison Blanche. De plus, les hommes pouvaient disposer d’une somme d’argent colossale. D’où venait cet argent?

L’un des cinq hommes attire l’attention : James McCord. Spécialiste de l’écoute électronique, il est colonel réserviste de l’armée de l’air, ex-agent de la CIA et du FBI. Sans compter qu’il est un proche des membres du Comité de la réélection du président Nixon, comité formé en vue des élections fédérales qui s’en viennent à grand pas.

La plupart des cambrioleurs plaident coupable et sont libérés sous caution. On ne court aucun risque. On veut étouffer l’affaire le plus vite possible.

L’affaire en serait restée là si deux journalistes du Washington Post n’avaient pas poussé les recherches plus loin : Bob Woodward et Carl Bernstein. Ils font des centaines et des centaines d’appels. Tranquillement, ils remontent la filière jusqu’au bureau du président Nixon. Le New York Times emboîte le pas. D’autres quotidiens les suivent. Le cambriolage du Watergate prend une envergure internationale.

Dans les jours suivant l’arrestation des cinq hommes, Woodward et Bernstein avaient appris que trois d’entre eux se trouvaient à Washington, trois semaines plus tôt, au moment où les bureaux d’avocats réputés être proches du Parti démocrate avaient été cambriolés.

Comme de raison, le FBI est chargé de l’enquête. Sauf que le directeur de l’époque, Patrick Gray, nommé par Nixon, ne fait pas diligence. Outré, le numéro du FBI Mark Felt décide de court-circuiter la police fédérale en coulant de l’information aux journalistes Bernstein et Woodward. Un membre du Washington Post le surnomme « gorge profonde ».

Deux jours après le cambriolage, soit le 19 juin, Felt informe immédiatement les deux journalistes qu’un type de la Maison Blanche est impliqué. Du bonbon pour le Washington Post.

Pourquoi Felt fait-il cela ? Pour préserver la réputation du FBI qu’il juge trop complaisant face à la Maison Blanche. Felt a consacré sa vie à la police fédérale.

Ses détracteurs insistent sur le fait que sa frustration de ne pas avoir été retenu comme remplaçant à Gray (ayant démissionné pour avoir détruit des documents) était sa première motivation. Nixon ne l’aimait pas. Il n’avait pas confiance en lui. Il ne le voulait pas à la tête du FBI. Il voulait contrôler la police fédérale.

Le Sénat américain met une enquête publique sur pied. La vérité sort. L’affaire du Watergate n’est pas un cas isolé. Un vaste réseau d’espionnage émane directement de la MaisonBlanche.

Le conseiller juridique de l’équipe Nixon révèle que les discussions se faisaient parfois dans le bureau ovale de la Maison Blanche.

Au cours du procès, James McCord l’expert en écoute électronique lors du cambriolage fait des aveux qui font tourner les visages vers le président Nixon.

Point culminant : la Maison Blanche a fait pression sur la CIA pour que celle-ci demande au FBI de mettre fin à l’enquête sur la tentative de cambriolage au Watergate. Elle a même demandé à la CIA de lui donner un coup de main dans certaines opérations d’espionnage.

Le navire de Nixon a sombré le jour où la commissionpublique apprit que la plupart des conversations dans le bureau de la Maison Blanche étaient enregistrées.

Le chien de Nixon était mort. Les preuves allaient s’étaler sur la table.

Pendant deux ans, le président a nié toute implication de la Maison-Blanche dans le cambriolage du Watergate.

Le 9 août 1974, Nixon démissionne juste avant de se faire destituer par le Congrès. Des membres de son équipe écopent plusieurs années de prison.

Cela clôt l’épisode du plus gros scandale politique de l’histoire des États-Unis.

Nixon est décrit comme une personnalité paranoïaque dans le film Nixon d’Oliver Stone.

Le scandale du Watergate est raconté par les journalistes Bob Woodward et Carl Bernstein dans leurs bouquins Les fous du président et Les derniers jours du président.

L’enquête menée par les deux journalistes du Washington Post reste un modèle du genre. Tout en reconnaissant le travail de Woodward et de Bernstein, certains experts estiment par contre que Nixon a agi comme un pur imbécile, ce qui l’a mené à sa perte. Il a agi en pur amateur.

Cet article s’inscrit dans la série Histoires de crime qui renferme faits divers, procès célèbres et récits d’espionnage dont les archives se trouvent au www.lhebdojournal.com, actualités, sous-onglet justice.

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