Une retraite méritée pour Luce Carpentier après 35 ans à l’école Richelieu

Luce Carpentier a vécu son dernier tour de piste le 9 décembre dernier dans ce qui a été une journée forte en émotions. En effet, elle tirait un trait sur 35 ans de carrière, mais aussi 35 ans de bonheur à l’école Richelieu.

La retraite est un passage obligé dans la vie d’un employé. Elle savait que le Jour J approchait, mais ne le réalisait pas vraiment en l’attendant.

« C’est dur de partir. La relation avec les enfants était encore chère pour moi. Je suis une vieille jeune, une vieille en santé (rires). J’avais tellement de plaisir avec eux. Je chantais et je jouais encore avec eux. Je courais encore dans la cour d’école avec eux et j’ai encore toute mon énergie. Mais bon, j’étais rendue là.  Je pense que c’est la stabilité du personnel qui fut le coup de grâce, la pénurie de personnel. C’était vraiment rendu difficile de pallier les absences et de trouver des remplaçants. Le reste, tout allait bien », lance-t-elle d’emblée.

« J’adore vraiment mon école Richelieu et je l’ai tatouée au cœur. J’adore mon équipe-école et on a une direction numéro 1. On a toujours eu un beau milieu de parents, avec des parents collaborateurs et terre-à-terre qui prennent le temps avec leur enfant. Ma vie de travailleuse était comblée et si j’ai réussi 35 ans de bonheur, c’est parce que c’était facilitant et réconfortant de venir ici. J’étais dans le meilleur des mondes dans une petite école de 180 élèves. »

Luce Carpentier a amorcé sa carrière comme technicienne responsable de gestions en 1986 au service de garde de l’école St-Dominique, soit le seul service de garde en milieu scolaire à l’époque. Le deuxième service de garde à ensuite voir le jour fut celui de l’école Richelieu où elle a joint les rangs au poste de technicienne-responsable de gestion/administratrice du service de garde, poste qu’elle occupera finalement pendant 35 ans.

« Il y avait 325 élèves à notre école et on n’avait pas de places ici. Tous nos locaux du service de garde actuel étaient des classes, alors le service de garde était dans le stationnement de l’aréna Jérôme-Cotnoir, dans la petite cabane du Club de soccer Albatros. C’est là qu’on avait établi le service de garde, sauf le midi puisque les jeunes dînaient au gymnase de l’école. On l’occupait durant les dix mois d’école. Le matin, j’amenais les enfants de la cabane à l’école, à pied. J’avais donc mon poste d’administratrice et je travaillais à temps plein à la présence-enfant », se souvient-elle.

« Quelques années plus tard, il y a eu une classe de maternelle de moins et on a pu récupérer le local. À ce jour, on est rendu à une soixantaine de jeunes le matin, 140 le midi et 85 enfants après les cours. On a gagné des locaux au fil du temps, toujours selon que l’école diminuait de clientèle. »

Un départ émouvant

Sa dernière journée de travail fut le 9 décembre. Elle se doutait bien qu’il s’agirait d’un vendredi chargé en émotions.

« Il y a un professeur qui est venu me chercher et il m’a dit qu’un élève voulait me voir. Il m’a expliqué que la technicienne en éducation spécialisée (TES) était occupée et que l’élève était en crise. Je sors de mon local et lorsque j’ai franchi les portes des escaliers du haut, c’est là que j’ai vu une haie d’honneur des enfants de la maternelle à la 6e année. Ils m’ont amenée au gymnase en m’applaudissant. Wow. Je ne pleurais pas et je ne voulais pas pleurer pour que ça reste un moment joyeux pour les enfants. Ils m’ont chanté des chansons et ils m’ont apporté une grosse carte que tout le monde a signée », raconte-t-elle.

« J’ai eu des hommages, des câlins, des remerciements. C’était très émouvant et j’avais le cœur gros. Les parents aussi ont défilé toute la journée pour venir me porter des cadeaux, des cartes et des mots. Il y a même des parents dont les enfants ne sont plus ici qui sont venus me voir. Je suis rentrée chez moi et à 17h30, je revenais ici parce qu’on se faisait fêter Josée Lampron et moi. On a eu droit à toute une fête! »

Luce continue d’aller « faire son p’tit tour » de temps en temps parce qu’elle n’est pas tout à fait prête à s’exiler complètement, du moins pour le moment. 

« J’ai le cœur gros de laisser mon école et de laisser mon équipe. C’est tout le côté social qui va me manquer. Par contre, je leur ai dit que je viendrais faire du remplacement et du bénévolat lorsqu’ils ont besoin de moi. S’ils ont besoin de moi un midi, je ne suis pas loin. Selon mes heures, lorsque je suis disponible, ça va me faire plaisir de venir », lance-t-elle, tout sourire.

« La réalisation de soi, venir chercher l’énergie des jeunes et le côté social vont me manquer. Mais bon, c’est sûr que ça allait venir un jour. On a des projets de retraite. Je suis une skieuse et on vient d’acheter un condo dans les pentes de ski de Stoneham, alors c’est un beau projet de retraite. Notre rêve, c’est vraiment d’aller dans les Alpes françaises », confie-t-elle.

Et la recette?

Il est moins commun de nos jours qu’une personne ait la chance de travailler toute sa vie au même endroit. Quelle fut la recette gagnante de la Trifluvienne? 

« Dans la vie, tu peux faire juste ton travail, point. Il a une autre option: t’intégrer aux autres. Ici, je me suis intégrée dans l’école et je me suis intégrée dans mon équipe-école. J’ai décidé de me trouver des défis et de monter des projets avec mon équipe-école. Le marché aux puces en est un bel exemple. C’est un parent bénévole, Lucie Dallaire, et moi qui avons décidé de lancer ça dans le temps. On est rendu à la 23e édition », explique-t-elle.

« Au fil des ans, il y a des parents qui m’aidaient à chapeauter le marché et ils sont partis. J’ai continué de le chapeauter jusqu’à l’an dernier. C’est un projet très éducatif puisque nos professeurs en font un projet de classe où l’enfant part d’une idée de vente jusqu’à sa création. C’est vraiment de l’entrepreneuriat. L’enfant fait les démarches, fait la conception, l’emballage et l’élaboration du prix. Le jour du marché aux puces, il vend les choses avec son professeur – sous forme de rotation – à leur table. Ce sont de tels défis qui te motivent et qui te rendent heureux. Je suis une technicienne de gestion, oui, mais ça me faisait réaliser comme éducatrice parce que je suis une éducatrice au fond de moi », conclut-elle.