Un artiste trifluvien fait fondre la Monnaie royale canadienne

VERRIER. Le Trifluvien Loïc Beaumont-Tremblay demeure peut-être encore méconnu du grand public ici, mais son nom fait beaucoup jaser chez les collectionneurs de pièces de monnaie. Pour la deuxième fois, la Monnaie royale canadienne a fait appel à la magie de l’artiste verrier afin de concevoir une portion des trois pièces de sa nouvelle collection.

La première de cette série mettant en vedette des créatures sous-marines a été mise en vente ce mois-ci. On y retrouve un hippocampe emprisonné dans un écrin de verre apposé sur la pièce d’argent. C’est dans son atelier aménagé dans un garage de Pointe-du-Lac que Loïc Beaumont-Tremblay a réalisé chacun des éléments de verre composants son œuvre.

Pour se faire, il a dû amener son art aux mille et une possibilités encore plus loin. L’artiste a dû utiliser une technique complexe appelée murrine. Elle consiste à insérer dans un tube des centaines de tiges de verre borosilicaté coloré qu’il a auparavant confectionné de manière à former l’hippocampe. Une fois fondu et l’air retiré, les tiges fusionnent en un long cylindre. Il ne lui reste alors qu’à l’étirer à très petite échelle avant de trancher de minces rondelles.

Ces pastilles de verre aux couleurs vives iront orner les pièces de la nouvelle série de la Monnaie royale canadienne.

«C’est du travail de moine», lance en riant l’artiste. «Les fils sont comme des grains de sable. S’il y en a un qui n’est pas tout à fait droit, cela va se voir. Fabriquer un murrine demande plus de 250 heures de travail. Nous en avons utilisé trois!»

D’ailleurs, c’est l’utilisation de cette technique avancée qui a plu à l’organisme national. Chaque pièce est unique.

7 500 exemplaires ont été frappés. Cela a impliqué la participation de deux employés à temps plein sur une période de cinq mois. La pièce, d’une valeur nominale de 20 $, coûte 151 $.

L’an dernier, les 8 5000 tirages de la pièce de monnaie «l’Univers» qu’il a dessinée et réalisée au complet ont tous été vendus. «Récemment, je l’ai vu sur Ebay à 200 $. Si la série se vend au complet, sa valeur augmente. Une pièce ne perd jamais de la valeur, mais vont-elles en gagner ?», a noté l’artiste.

Les deux prochaines pièces de monnaie de la série sur la vie sous-marine mettront en vedette une étoile de mer et une tortue. 

«L’argent» lui ouvre des portes

Artisan, Loïc Beaumont-Tremblay fréquente les salons des métiers d’art pour faire connaître les bijoux de sa petite entreprise Pouce vert. La Monnaie royale est son seul client majeur. Pour être sélectionné, il a dû se soumettre à un processus rigoureux et répondre à une multitude de critères.

«Depuis notre première collaboration, c’est certain que j’ai remarqué une différence. Ça m’a notamment ouvert des portes. Lorsque je me présente devant des compagnies et que je leur dis que j’ai travaillé avec la Monnaie royale canadienne, c’est un gage de qualité et de rendement», a-t-il affirmé.

Mais il ne faut pas se leurrer, ajoute-t-il, la marge de profit n’est jamais très grande lorsqu’on pratique un métier d’art. 

Une discipline en pleine croissance

L’utilisation de ce verre borosilicaté pour en faire de l’art est encore très émergente. Ce verre particulier est habituellement utilisé dans la fabrication des équipements scientifiques. Le mouvement ne cesse cependant de prendre de l’ampleur.

Lorsque l’autodidacte a découvert toutes les possibilités qu’y s’offraient à lui il y a 15 ans, il n’y avait que dix couleurs en vente sur le marché. Aujourd’hui, les matériaux et les techniques n’ont plus de limite. À l’époque, il estime qu’ils étaient seulement 1 500 verriers à faire cela. Le nombre se porte maintenant à 60 000 artistes.

«Sur la côte ouest des États-Unis, il y a un verrier à tous les coins de rue», raconte-t-il pour illustrer l’ampleur du phénomène. «Au Québec, c’est plus difficile de percer. Les gens ne connaissent pas ce verre et il faut faire beaucoup d’éducation.»

L’artiste poursuit son rêve de se faire connaitre sur les marchés internationaux. Il développement actuellement plusieurs nouveaux concepts tout en planchant sur sa production de bijoux en tous genres. Ses produits sont notamment en vente dans sa boutique en ligne au www.pouceverre.com.