L’homme qui faisait parler le bois de grève
L’environnement a toujours été au cœur du processus créatif de Nelson Gagné. Jusqu’à la fin novembre, il présente une rare exposition à la Galerie d’art du Parc de Trois-Rivières.
À travers cette exposition intitulée Minuit moins une, l’artiste trifluvien veut amener les visiteurs à réfléchir sur notre environnement par le biais de petites mises en scène. De petits clous plantés dans le bois deviennent des populations qui se déplacent ou encore des forêts déboisées.
« J’essaie de rendre ça facile à lire, le plus clair possible. Très jeune, il y avait la forêt derrière chez moi et le lac devant. J’ai toujours vécu dans cette nature et la nature me parle facilement, raconte-t-il. Je parle de l’environnement, mais d’environnement en général, au-delà des problèmes de climat. Je peux aborder de maisons de personnes âgées, de tsunami, de déboisement, du déplacement d’une population sur un territoire. »
« Avec le titre Minuit moins une, c’est que ça commence à presser. On retrouve des notions de mesure de temps, un peu comme les prisonniers qui veulent savoir combien de jours ils ont vécu en prison », ajoute-t-il.
Nelson Gagné vit et pratique son art à Trois-Rivières depuis une quarantaine d’années. Le thème de l’environnement dans son art le suit depuis tout ce temps.
« Quand j’ai commencé il y a 40 ans, je me souviens d’un aménagement paysager qui m’a bouleversé. C’était un petit arbuste torsadé, trop travaillé, dans une entrée. Je me suis demandé pour quelles raisons on désire transformer autant notre environnement. Tout est parti de là: la gravures, les sculptures, les dessins… », raconte-t-il.
Toutes les œuvres que l’on retrouve dans l’exposition ont pris forme à partir d’un simple objet: le bois de grève. Comme une tranche d’arbre qui révèle son âge, ce bois de grève lui donne une carte photographique de l’histoire de ce dernier avec ses moments prolifiques et ses périodes difficiles.
« Pour moi, le bois de grève est un fossile. Ça amène une notion du passé qui a toujours fait partie de ma production. C’est une matière extraordinaire. »
C’est une belle-sœur qui lui a apporté du bois de grève qu’elle ramenait de ses escapades de pêche en Gaspésie. « Dans mes productions, j’imitais la nature, je redessinais des éléments de la nature. Quand j’ai vu le bois de grève, j’ai réalisé que c’était exactement ce que je faisais en 2D. Alors pourquoi reproduire quand je pourrais travailler à partir de cette matière. »
Le bonheur de créer
L’artiste trifluvien y intègre d’autres matériaux comme du béton et des métaux, mais également d’autres matériaux récupérés au fil du temps. Le bois de grève demeure toutefois la pièce maitresse de chaque œuvre. Il se laisse inspirer par la forme du morceau de bois, un peu comme l’on s’amuse à discerner des formes dans les nuages.
La pandémie lui a donné l’occasion de renouer avec la sculpture.
« Je tire mon plaisir dans la création, confie Nelson Gagné qui ne ressent pas le besoin d’exposer ses œuvres outre mesure. Je n’aurais possiblement pas monté cette exposition si on ne me l’avait pas demandé. J’aime travailler dans mes affaires. J’éprouve beaucoup de bonheur à créer de plus petits formats, car je peux créer plus rapidement et satisfaire mes besoins de création. Mon bonheur est dans la création. »
Quelques-unes de ses œuvres de manière noire ont aussi été intégrées à l’exposition.
Après deux ans et demi de travail sur ces œuvres, Nelson Gagné entend maintenant replonger dans le dessin et découvrir ce qui en ressortira.