Le premier court-métrage d’Alexandre Dostie sera présenté au TIFF
CINÉMA. Le premier court-métrage réalisé par le cinéaste trifluvien Alexandre Dostie connaît des débuts prometteurs. Projeté en première mondiale au Festival du film de Guanajuato au Mexique, «Mutants» figure également à la programmation du Toronto International Film Festival (TIFF), où il sera présenté en première nord-américaine en septembre.
«Je suis vraiment content de la sélection! Pour travailler en distribution de films, je sais qu’il n’y a pas de science exacte dans la sélection des films lors des festivals, souligne le cinéaste. Beaucoup de facteurs humains entrent en ligne de compte, car ce sont des jurys qui choisissent les films. Tu ne peux jamais prédire à l’avance si un film sera sélectionné ou non.»
Il faut dire qu’Alexandre Dostie n’a pas eu le temps de prendre du recul par rapport au film dont il signe aussi le scénario. Le court-métrage a été tourné à l’été 2015 dans la Beauce natale du cinéaste et est ressorti de l’étape du montage en mars dernier.
«Ce projet est né d’un souvenir de longue date. Un gars en Beauce avait connu une fin tragique suite à une histoire d’amour qui n’a pas fonctionné. J’étais adolescent à cette époque, à l’étape des premières amours. Je me suis demandé comment ce serait si j’avais été dans le corps de ce gars-là», raconte-t-il.
«Mutants» transporte le spectateur à l’été 1996. La vie envoie une balle courbe dans la face de Keven Guénette… Et ça frappe, littéralement! Guidé par son coach de baseball paraplégique, Keven découvre la mutation, le sexe et l’amour.
«Le film se veut un parallèle entre la première et la dernière histoire d’amour. L’amour peut paraître tellement simple, mais c’est super compliqué quand tu es au centre de tout ça.»
Casting sauvage en Beauce
Alexandre Dostie ne s’est pas facilité la tâche avec ce premier court-métrage. Alors qu’il aurait pu décider de filmer le tout dans un studio, dans un environnement contrôlé, il a plutôt préféré tourner les scènes à l’extérieur en cinq jours. Au final, la pluie a joué les trouble-fêtes pendant quatre jours.
«Dans ma tête, c’était un film solaire! Disons que la pluie et la météo changeante ont ajouté de la pression. J’aurais aimé tourner de nouveau deux ou trois scènes, mais il a fallu faire des choix.»
Et plutôt que de faire appel à des acteurs expérimentés, il a préféré travailler avec des adolescents sans expérience de tournage!
«On a fait la tournée des polyvalentes dans des municipalités de la Beauce et des terrains de baseball pour recruter de jeunes acteurs. On en avait repéré 200. À la deuxième audition, il restait environ une vingtaine de personnes. Je cherchais des jeunes qui avaient les personnages en eux naturellement, de sorte que ça ne leur demandait pas trop de sortir de leur zone de confort, de la personne qu’ils étaient, une fois devant la caméra.»
Difficile de gérer une bande d’adolescents sur un tournage?
«C’est beaucoup de job!» admet Alexandre Dostie.
«Heureusement, je pouvais compter sur une équipe expérimentée autour de moi. L’assistante-réalisatrice a donné un bon coup de main et on avait une personne spécialement pour coacher les jeunes. Comme réalisateur, j’étais donc moins sollicité de ce côté et je pouvais me consacrer sur les autres aspects du tournage.»
Le pari de faire appel à des adolescents non-acteurs pour ce film s’est avéré réussi. Même si plusieurs scènes étaient particulièrement exigeantes pour les jeunes, ces derniers sont parvenus à créer de petits bijoux de scènes, affirme le cinéaste originaire de la Beauce qui a amené son équipe filmer dans les villages de Saint-Honoré, Saint-Théophile, Saint-Martin et Saint-Jean-de-la-Lande.
«Je dirais que sur le plan de la réalisation, c’est brut, assez instinctif. Mon approche est en construction. C’est mon premier film. Je pense que je suis en train de réaliser la puissance que peut avoir une image. J’écris beaucoup de dialogues et de poésie dans la vie. Je commence à comprendre qu’au cinéma, on n’est pas toujours obligé de faire parler les personnages et qu’on peut exploiter au maximum la force des images. Je suis encore un bébé là-dedans!»
Syndrome de l’imposteur
Alexandre Dostie a bénéficié d’une bourse de la SODEC pour écrire le scénario de «Mutants», scénario qu’il aura travaillé pendant près de trois ans avec ses producteurs d’Art & Essai.
«J’ai pu compter sur des producteurs compétents et exigeants. C’est confrontant de devoir travailler et retravailler autant un scénario. Mais les commentaires qu’ils me faisaient étaient toujours pertinents. Je me suis dit, à un moment, que je n’étais peut-être pas capable d’écrire un scénario. Je me suis développé un caractère. Je ne pourrais pas dire le nombre de versions qu’il y a eu, mais je peux te dire que la première version avait 34 pages et la dernière, 13 pages! Tout ce processus a permis de gagner en efficacité narrative.»
La réalisation s’est avéré un défi important également. «J’avais un peu peur. Je me sentais un peu imposteur. Je n’ai pas étudié là-dedans et la réalisation, c’est tout un défi de communication. C’est de communiquer ton idée le plus précisément possible pour que les acteurs, le directeur photo et le gars de la musique aient la même vision du film que toi, qu’ils voient le même film dans leur tête, la même ambiance. Au final, j’ai adoré l’expérience», confie-t-il.
Tournée des festivals
Le cinéaste souhaite maintenant déposer un nouveau projet de court-métrage auprès de l’équipe d’Art & Essai pour septembre.
D’ici là, «Mutants» devrait connaître une belle vie dans les festivals un peu partout.
Au cours des prochaines semaines, on pourra voir le court-métrage au Festival du film de Saint-Séverin et au Long week-end du court, à Trois-Rivières, ainsi qu’ailleurs au Québec.
«Mutants» fait aussi partie de la tournée Best of du Festival international de film de Guanajuato.
D’autres dates de projection sur la scène internationale seront également annoncées prochainement.