Rosélie pesait 630 grammes

Avoir un enfant est une étape importante dans un couple, mais avoir un enfant prématuré change complètement une vie. Julie Mercure nous raconte comment Rosélie, née à 24 semaines et pesant 630 grammes, s’est battue pour vivre. Récit d’une mère qui n’a jamais baissé les bras.

À 37 ans, Julie en était à sa troisième grossesse. Dès les premiers mois, elle a su que celle-ci ne serait pas de tout repos.

«Vers 19 semaines, je suis allée à l’urgence, car je perdais du liquide corporel, mais comme ma grossesse n’était pas très avancée, je n’ai pu aller en obstétrique et les docteurs m’ont retournée à la maison.

«Puisque les choses ne s’amélioraient pas, je suis retournée à 24 semaines voir mon médecin. Il m’a aussitôt dit d’appeler mon conjoint car on aurait des décisions à prendre.

«Le docteur m’a avoué qu’il y avait des complications et que si je désirais garder le bébé, je devrais être alitée et hospitalisée pour le reste de ma grossesse. Comme je n’étais pas encore à 25 semaines, il m’a donné le choix. Je pouvais tenter le coup et garder l’enfant ou me faire avorter.

«C’était le premier enfant de mon chum et nous voulions vraiment le bébé. J’ai donc choisi d’aller à St-Justine. À notre arrivée, un médecin nous a expliqué ce qui se passerait si l’enfant était prématuré. Il m’a regardée et a dit : «Tente de le mener à 28 semaines», se souvient-elle.

Mars au lieu de juillet

Trois jours plus tard, à 24 semaines et trois jours, Julie eut ses premières contractions.

« Tout s’est passé tellement vite! Ils m’ont rapidement expliqué que j’allais subir une césarienne d’urgence. Si j’accouchais de façon naturelle, ma fille n’avait aucune chance de survivre. Mais dans les deux cas, à 24 semaines, il y avait peu d’espoir.

« Elle était attendue pour le 11 juillet, mais elle est arrivée le 25 mars 2009. Lorsqu’elle est née, elle pesait 630 grammes et mesurait un peu moins de 30 cm. On l’a tout de suite appelée Rosélie à cause de la couleur qu’elle avait à la naissance. Même si je pouvais la voir, je n’ai pu la tenir dans mes bras que 35 jours après l’accouchement, car elle était intubée jusqu’aux poumons.

«Rosélie avait un peu moins de 50% de chances de s’en sortir. Les bébés aussi prématurés, même s’ils survivent, courent des risques de devenir aveugles ou sourds et peuvent souffrir d’un déficit d’attention. On nous a même dit qu’elle ne marcherait peut-être pas. »

Frôler la mort 5 fois

«Elle a failli mourir cinq fois en trois mois et elle a subi deux chirurgies. Le 6 juin son état était critique. Les gens de l’hôpital ont demandé à ce que toute la famille (même les grands frères) vienne la voir. Six des huit médecins qui la traitaient voulaient arrêter la médication car ils croyaient qu’il s’agissait d’acharnement thérapeutique. Comme Rosélie s’était toujours battue, ils ont décidé d’essayer une dernière fois.

«C’est tellement stressant pour un parent! On vit dans une bulle. On n’est plus conscient de ce qui se passe autour», confesse Julie.

La chambre

L’enfant est arrivée trop tôt et sa chambre n’était pas prête. Plutôt que de demander aux docteurs si Rosélie allait vivre, Julie et Daniel avaient l’habitude de demander s’il pouvait lui faire une chambre. C’était leur façon de garder espoir. Lorsque l’état de l’enfant s’améliorait, ils s’affairaient à décorer et meubler la chambre de Rosélie. Lorsque les nouvelles étaient mauvaises, ils mettaient leurs travaux sur pause et attendaient le feu vert des médecins.

« Nous avons toujours été positifs, explique Julie. Nous pouvions compter l’un sur l’autre. Si j’avais un conseil à donner aux parents dans notre situation, je dirais : vivez un jour à la fois. Voyez toutes vos décisions comme si c’était la meilleure chose à faire. Ne jamais regretter, toujours garder espoir.

«Une semaine avant sa sortie, Rosélie a passé une imagerie par résonance magnétique (IRM). Elle avait un problème au cervelet et cela amenait des risques de paralexie cérébrale. Nous vivions dans un stress constant. Nous avions toujours peur que son état se détériore.

«J’en suis même venue à penser que c’était de ma faute. Que j’étais une mauvaise mère puisque je n’avais pas été capable de la mener à terme! J’aurais tant voulu que mon chum me voie avec une grosse bedaine. Je vivais un drame et un échec personnel», avoue la mère de l’enfant.

Plus le temps de travailler

Les deux parents ont cessé de travailler pour être au chevet de Rosélie. Donc pas de revenu.

«On dormait au Manoir Ronald McDonald, mais avec le gaz, la nourriture et toutes les autres dépenses, la facture s’élève à 6 000$ pour quatre mois. Cela s’ajoute aux comptes et autres dépenses qui continuaient à s’accumuler.

«Nous étions mal informés. Le CLSC nous a remboursé une partie, mais nous n’étions pas préparés. Nous n’avons pas gardé les factures et personne ne nous avait expliqué comment ça fonctionnait», déplore-t-elle.

Oxygène et gavage

«Rosélie avait besoin d’oxygène et était gavée à sa sortie de l’hôpital. Nous devions constamment retourner à Ste-Justine pour des rendez-vous car elle était suivie par des physiothérapeutes et des ergothérapeutes.

«Je l’ai surprotégée jusqu’à ce qu’elle ait un an. J’avais tellement peur. Les gens qui avaient la grippe ne pouvaient pas l’approcher. Maintenant, elle a deux ans et demi et elle va mieux. Elle parle et vit normalement, mais elle est encore vulnérable aux microbes. »