Profession thanadoula: « Il faut que la fin soit digne »
On connaît les doulas, ces femmes qui offrent du soutien physique et émotionnel aux femmes enceintes avant, pendant et après l’accouchement. Toutefois, on connaît moins les thanadoulas. Leur rôle: accompagner les gens en fin de vie et leur famille.
Ariann Bellerose est ergothérapeute à domicile. Dès le début de sa carrière, lorsqu’elle travaillait au CLSC, elle a souvent eu à intervenir auprès de personnes en soins palliatifs. Elle s’est rapidement sentie à l’aise auprès de cette clientèle.
« J’ai tellement eu de beaux échanges avec eux. Vers la fin, les gens se départissent un peu de tout ce qui est superflu, comme les bobos ou les petits tracas du quotidien. Ça fait que tu as vraiment des conversations profondes avec eux. Autant que tu les aides qu’eux t’aident à comprendre beaucoup de choses. Je trouve que tu as vraiment accès à l’essence de la personne quand tu l’accompagnes en fin de vie », raconte Ariann Bellerose.
Elle a réalisé qu’au-delà de l’aspect médical de l’accompagnement, elle souhaitait aller plus loin et avoir davantage un rôle d’accompagnante auprès d’eux. La vie a fait en sorte qu’elle tombe sur une entrevue avec la thanadoula Cynthia Brunelle dans un podcast. Elle est alors entrée en contact avec celle qui est devenue sa mentore dans les trois dernières années.
« Elle m’a vraiment alignée et m’a guidée pour que je puisse faire ma formation de 400 heures. J’ai eu ma certification récemment, précise Ariann Bellerose. Dans le contexte où les gens souhaitent le plus possible demeurer à la maison avant ou lors de leur décès, mon rôle sera très aidant afin de soutenir ces personnes, mais aussi les proches qui leur offrent du soutien. »
Un « projet de fin de vie »
L’accompagnement peut débuter à différents stades, que ce soit à partir du diagnostic ou encore dans les derniers instants.
« Quand j’arrive plus dans les derniers moments, c’est peut-être un peu plus un accompagnement avec la bulle familiale. Il arrive que la personne ne veuille pas parler de sa propre mort parce qu’elle ne veut pas embêter ses proches, parce qu’elle ne veut pas faire peur ou en mettre trop sur les épaules des gens. Mais elle vit avec sa peur, souligne Ariann Bellerose. Et vice-versa. Les proches peuvent aussi éviter de parler de certains sujets avec le mourant. Dans ces situations, j’arrive comme une personne neutre et je peux offrir un espace sécuritaire d’échange. »
« C’est un accompagnement sur le plan physique où je peux aider grâce à ma formation d’ergothérapeute, mais ça peut aussi être spirituel et psychologique, poursuit-elle. Les besoins peuvent varier et mon rôle est d’être à l’écoute de ces besoins. Parfois, c’est simplement de parler, de raconter comment elle a reçu le diagnostic, de quoi elle a peur. Ça peut aussi être des respirations. Les besoins se dessinent au fil des rencontres. »
Ariann Bellerose aime parler de projet de fin de vie. « Parce que les personnes sont peut-être en fin de vie, mais elles sont en vie. C’est important de maintenir des objectifs. Par exemple, ça peut être quelque chose qu’elle veut dire à un proche avant de partir. J’aime voir la fin de vie comme un projet, de se donner de petits objectifs, de l’accompagner dans ce projet de fin de vie et d’alléger cette transition vers la mort. »
« Même si la personne a un diagnostic, elle peut souvent encore faire des choses. Ma formation d’ergothérapeute est utile pour ça, car je peux adapter les tâches, mais aussi l’environnement de la personne. Si on économie de l’énergie pour aller aux toilettes en apportant des modifications, alors la personne sera peut-être capable de faire son petit jardinage », explique la thanadoula et ergothérapeute.
« Il faut que la fin soit digne, à l’image de la personne et de ses souhaits les plus profonds, résume Ariann Bellerose. Il faut laisser la personne parler. Parfois, la famille veut gérer les choses. Ça leur fait du bien aussi parce que ça leur fait moins penser à leur souffrance. Le danger, c’est qu’on peut oublier la personne qui est en fin de vie. Il ne faut pas la perdre de vue. Il faut la mettre devant. »
La Trifluvienne lancera plus officiellement ses services de thanadoula dans la semaine du 6 novembre à l’occasion de la Semaine nationale des personnes proches aidantes. Elle organisera un événement en direct sur Facebook chaque midi avec, notamment, des art-thérapeutes et une résidente en médecine qui veut se spécialiser dans les soins palliatifs. Les détails sont sur sa page Facebook Ariann Bellerose, Thanadoula et Ergothérapeute à domicile.