La prostitution: un demi-siècle plus tard

En complément de l’entrevue accordée par Marie-Joëlle Côté en page 3, L’Hebdo Journal vous rappelle les grandes lignes portant sur la prostitution à Trois-Rivières dans les années 60 et 70.

Ces grandes lignes proviennent d’une série d’articles publiés en septembre 2011 dans le cadre d’un reportage sur les mœurs policières de l’époque.

On sait que Trois-Rivières est souvent vue comme une ville de party. Au début des années 1900, elle se faisait appeler « Happy Town ».

Retour aux années 60 et 70.

Mœurs policières relâchées

Le corps policier de Trois-Rivières ayant fait l’objet de deux enquêtes de la Commission de police du Québec en l’espace de 13 ans, on devine qu’il était plutôt facile à l’époque de s’adonner au vice sur le territoire de Trois-Rivières.

Ajoutez à cela les nombreux marins débarquant au port, l’époque fofolle du Flower Power, les courses à l’hippodrome et la pègre montréalaise posant un pied à Trois-Rivières après avoir été en partie chassée de Montréal à cause d’Expo 67, et vous avez le cocktail parfait pour permettre aux prostituées de brasser de grosses affaires.

Une poignée de policiers corrompus à l’époque toléraient la prostitution du moment qu’ils s’emplissaient les poches. Certains policiers se vantaient même d’avoir couché avec des prostituées au poste de police. D’autres dirigeaient la circulation sur le territoire, déterminant lesquelles parmi les prostituées avaient le droit de travailler au centre-ville.

Bordels

Il y en avait un peu partout.

«Des gens venaient de Montréal et de Québec pour coucher avec une prostituée. C’étaient souvent des professionnels qui ne voulaient pas se faire pincer dans leur patelin. Dans un établissement de la rue Royale par exemple, les gens se présentaient au garage du sous-sol avec une clef et grimpait à l’étage. On y pratiquait la prostitution de luxe», nous avait-on raconté lors du reportage de septembre 2011.

Rappelons qu’à l’époque, les gros chantiers se multipliaient: la construction du pont Laviolette, l’autoroute 755, le centre commercial Les Rivières et bien d’autres. Des travailleurs et hauts salariés venus de l’extérieur représentaient une source de revenu pour les prostituées.

« Un jour, un Noir débarque dans un hôtel de la rue des Forges, nous a-t-on raconté. Il offre les services de sa prostituée. Noire également. À l’époque, il n’y avait pas de Noirs à Trois-Rivières. Hésitant, le propriétaire de l’hôtel finit par accepter. Il avait au préalable reçu l’autorisation de l’escouade de la moralité municipale. Le Noir revient le lendemain. Si vous aviez vu le corps de la femme! Juste quelques jours et déjà les clients faisaient la file à la porte!»

La plupart des prostituées travaillaient dans des hôtels du centre-ville. On les croisait régulièrement sur la rue des Forges. D’autres pratiquaient leur métier ailleurs: roulottes, cabines près du pont Laviolette, maisons privées.

Beaucoup d’entre elles venaient de Montréal, chassées elle aussi par l’administration Drapeau au temps d’Expo 67. Trois-Rivières était une destination de choix car beaucoup d’argent coulait dans la capitale de la Mauricie à l’époque. L’industrie des pâtes et papier roulait à plein régime.

Et, avantage indéniable : la ville est située entre Québec et Montréal, les deux grandes villes de la province à l’époque.

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