Joueur de poker professionnel, un métier payant?
Lorsqu’on aborde le sujet du poker, on entend souvent parler d’histoires d’horreur où les joueurs perdent tout ce qu’ils ont, argent, famille et amis. Toutefois, certains réussissent à très bien gagner leur pain avec ce jeu. L’Hebdo Journal a rencontré le joueur Louidge pour en savoir plus sur ce mode de vie.
Même s’il n’est âgé que de 22 ans, Louidge possède néanmoins une bonne expérience dans le monde du poker.
Comment as-tu découvert le poker?
«J’ai appris à jouer au cégep à 17 ans. Je me suis réellement intéressé au jeu lorsque je me suis rendu compte que je faisais plus d’argent en faisant des tournois à 5 $ ou 10 $ avec mes amis que dans mon emploi d’emballeur. Le poker est devenu une véritable passion et j’aimais vraiment ça. De là, j’ai monté les échelons tranquillement.»
Est-ce-que ta nouvelle vie de joueur professionnel a été bien accueillie par tes proches?
«J’ai fait croire à mes parents que je venais étudier à Trois-Rivières. Ce n’est qu’après le déménagement que je leur ai dit. Ça s’est mal passé puisqu’on ne s’est pas parlé pendant un an. Mon père voyait ça comme si je m’en allais faire carrière dans les machines alors que ma mère est zéro gambling. Heureusement, ils ont fini par accepter avec le temps.»
Quelle est la différence entre un joueur professionnel et un joueur amateur?
«Il faut que tu te départisses de la valeur de l’argent quand tu deviens professionnel. L’inconvénient en devenant pro c’est que tu as pas mal moins de plaisir à jouer. Tu dois toujours garder la tête froide donc quand tu gagnes, tu n’es pas heureux. Je le réalise seulement quand l’argent se dépose dans mon compte.»
C’est assez rentable pour ne faire que ça?
«Nous sommes peut-être une cinquantaine au Québec qui vivons très bien en faisant plus de 60 000$ par année. À Trois-Rivières, environ quatre ou cinq. L’an dernier, j’ai récolté près de 250 000$. Jusqu’à présent, je perds 50 000 $ cette année, mais je ne m’en fais pas. Il y a beaucoup de chance dans le poker à court terme, à long terme : pratiquement pas. Ça marche par mois. Si tu es gagnant c’est impossible de perdre. Ça prend un minimum de 10 000$ pour quelqu’un qui veut se lancer dans le milieu de manière disciplinée.»
C’est quoi le quotidien d’un joueur de poker professionnel?
«Chaque personne est différente. Contrairement à la croyance, ce n’est pas une «job» de huit heures par jour. Pour ma part, je joue près de trois heures à chaque journée ce qui correspond à environ 45 000 mains par mois. Il faut que tu joues dans les moments où tu es le plus motivé et le plus en forme sinon tes résultats en souffrent. À ce niveau, c’est comme n’importe quel sport. Il faut avoir un bon rythme de vie, une bonne diète et se lever tôt pour aller chercher tout ce qui nous donne un avantage sur les autres.»
Quel type de poker est le meilleur, en vrai, face à face ou en ligne, sur Internet?
«Au départ, j’ai joué du «live» pendant deux ans. Maintenant, ça fait deux ans et demi que je joue presque exclusivement sur le web. Internet permet aux joueurs d’acquérir de l’expérience plus rapidement en raison du nombre de mains que l’on peut jouer. La grosse différence se situe dans le nombre de tables auxquelles on peut participer en même temps, car l’espérance de gain est beaucoup plus grande (Il en joue neuf simultanément). De plus, les temps ont changé. Aujourd’hui, c’est beaucoup plus difficile en raison de la compétition féroce des joueurs Internet. De nombreux outils de statistiques sont disponibles pour ceux qui veulent s’y mettre à fond. Dans les grosses limites, il y a souvent cinq réguliers pour un seul poisson. Je ne serais jamais devenu un professionnel si j’avais commencé à jouer au poker aujourd’hui. Ça m’aurait coûté beaucoup trop cher au départ.»
Le poker illégal est-il un mythe?
«Le poker illégal se joue aussi à Trois-Rivières avec des mises à l’aveugle (blinds) à 200 $ et 400 $. C’est du poker récréatif, mais avec de gros montants. Ce sont presque juste des bandits qui y jouent puisque quelqu’un de normal n’a pas les moyens de flamber autant d’argent aussi rapidement. Bref, le poker caché dans les sous-sols existe encore.»
Penses-tu être un joueur de poker professionnel longtemps?
«Je ne le sais pas encore. Je vais peut-être jouer pendant encore trois ou quatre ans si je suis capable de le faire, car c’est plus dur d’année en année. Je suis dans un virage. À 26 ans, je ne sais pas si ça va me tenter de retourner aux études.»