«Il est parti avec ses secrets» -Hélène Fortin

L’on se serait senti mal de briser le silence qui régnait hier à la Salle Léo-Cloutier du Séminaire St-Joseph. C’est que dans le cadre de la Semaine de la prévention du suicide, Ciné-Campus a laissé la parole aux sœurs du défunt chanteur des Colocs, André «Dédé» Fortin, avant la présentation du film Dédé entre les brumes. Témoignage vibrant de deux endeuillées du suicide.

C’était le 10 mai 2000. On apprenait dans les différents médias que le fondateur et chanteur du groupe Les Colocs s’était suicidé en se faisant hara-kiri, deux jours plus tôt.

«Il y a des événements dont tu te rappelles toute ta vie. Un coup de téléphone et ta vie bascule. Pour moi, ça ne pouvait être qu’un homicide», raconte Hélène Fortin.

Faire leur deuil ne fut pas chose facile. Dédé Fortin étant une personnalité publique, elles ont été confrontées aux interprétations publiques et médiatiques dont leur frère faisait l’objet.

«Un livre a été édité, une nouvelle chanson qui en faisait état s’est mise à jouer à la radio. La musicographie a suivi un an plus tard. Le rapport du coroner a été dévoilé à la télévision; tu essaies de le cacher aux enfants», indique Mme Fortin.

Culpabilité et colère

Hélène et Sylvie Fortin admettent que le suicide apporte son lot de colère, de culpabilité et d’incompréhension, même dix ans plus tard.

«Il y a eu beaucoup de jugement. Chacun avait son interprétation de la question. Il y a eu des signes dans ses textes, ses chansons, dans les médias…Pourquoi on n’a rien vu, nous, la famille? Son dernier CD était presque un testament. On était où pendant que tout ça se passait? Pour nous, André aimait la vie. C’est sa souffrance qui l’a emporté», note Sylvie Fortin.

«Aujourd’hui, plusieurs questions demeurent et resteront…André est parti avec ses secrets», ajoute sa soeur.

La Fondation André «Dédé» Fortin

Le temps s’est écoulé et depuis ce jour fatidique, on a assisté à la création de la Fondation André «Dédé» Fortin qui vise à contribuer aux efforts de prévention du suicide au Québec.

Le processus inclut la collecte de dons, la promotion des demandes d’aide et de soutien aux services existants et l’appui aux organismes voués à la prévention du suicide et des maladies mentales.

«On s’est dit qu’un jour, on allait faire des actions pour prévenir le suicide et de sensibiliser aux maladies mentales. Ça a pris six ans avant la mise sur pied de la Fondation. Parce qu’il faut se reconstruire, cheminer là-dedans. On a les yeux brillants aujourd’hui devant vous, mais il faut avoir la force de chercher les outils nécessaires», précise Sylvie.