Exclusif: Recyclage Aluminium Québec et Alsa Aluminium pourraient être vendues

La crise économique frappe fort et brusquement dans deux usines du Parc industriel de Bécancour que la maison mère, la multinationale allemande AGOR AG, vient de mettre officiellement en vente. Florissantes il y a un an, les deux usines, qui recyclent des résidus d’aluminium, viennent tout juste de mettre à pied pour au moins six mois 75 de leurs 85 employés.

«Ce qu’on recherche, ce sont des partenaires pour les opérations au Canada. On a besoin de capitaux», explique Michel Noël, président d’Alsa Service Canada Inc., une entité canadienne qui appartient au géant allemand AGOR.

En fait, toute l’exploitation Alsa Service Canada – qui englobe deux usines de refonte d’aluminium à Bécancour et à Baie-Comeau ainsi qu’une usine de lavage des rebuts de refonte à Bécancour – est actuellement déficitaire. La maison-mère aurait donc publié un premier avis en Allemagne, ouvrant la porte à une vente ou à tous le moins une participation financière par des investisseurs intéressés par ses activités canadiennes. Ironie du sort, l’avis publié ce matin dans les pages de L’Hebdo Journal à Trois-Rivières demande un dépôt des offres au plus tard… demain, jeudi 18 décembre, à Cologne en Allemagne. «Je ne sais pas pourquoi c’est si court. Le message nous vient d’Allemagne, et je crois qu’il y a eu des délais de traitement et de traduction», avance le président des opérations canadiennes, avouant que la situation était difficile pour l’industrie mais affirmant qu’aucune fermeture complète n’était envisagée jusqu’à maintenant. «On a l’intention de rouvrir. Nous, on est une solution environnementale. Les résidus qu’on récupère, on les revalorise à 100% et ils peuvent être utilisés dans diverses industries, alors que s’ils ne viennent pas chez nous, ils vont au dépotoir», explique M. Noël.

Pour le moment cependant, les activités sont considérablement réduites dans les deux usines de Bécancour. La maison-mère allemande a effectivement donc décidé à la fin novembre de cesser temporairement ses activités dans l’usine Alsa de Bécancour, qui employait 30 personnes, et de couper drastiquement sa production chez Recyclage Aluminium Québec, aussi à Bécancour, dont 45 des 55 employés seront mis à pied temporairement d’ici à la mi-janvier. «C’est un geste drastique et ça représente une réduction très importante de notre production», concède M. Noël. «Mais le contexte est tellement difficile qu’on n’avait pas le choix. À cause de la crise, plusieurs de ceux qui nous envoyaient des résidus à traiter ont fermé leurs portes ou ont réduit leur production. S’ils ne produisent presque plus, on a beaucoup moins de résidus à traiter», explique-t-il.

Au total, ce sont donc 75 employés de ces usines utilisant une technologie unique au monde qui ont été mis à pied temporairement. Mais la situation est telle que ce n’est pas avant au moins six mois que les opérations pourront reprendre. «On parle de mises à pied pour un minimum de six mois, peut-être d’un an», précise M. Noël, en témoignant n’avoir jamais vu pareille débâcle dans l’industrie. «Ça fait 15 ans que je suis dans l’aluminium et je n’ai jamais vu une situation comme celle-là. En trois ou quatre mois, le prix de l’aluminium a chuté de 50%. Depuis un an, il a perdu 65% de sa valeur. C’est une situation unique et ça a été très rapide», affirme-t-il, en soulignant que les deux usines de Bécancour n’étaient pas les seules à souffrir de la situation. «J’ai un entrepreneur qui est client ici depuis 20 ans. Il m’a appelé ce matin pour m’annoncer qu’il m’envoyait son dernier chargement… ce matin. C’est drastique», illustre Michel Noël.

Pour les prochains mois, seulement une dizaine d’employés continueront donc à faire fonctionner le volet thermique de l’usine de recyclage. Construite au coût de 3 millions en 1985, l’usine a la capacité de traiter 40 000 tonnes métriques par année. Michel Noël ne se hasarde cependant pas à évaluer combien de tonnes seront réellement traitées dans les premiers mois de 2009. À l’usine Alsa, une usine-pilote construite en 2000 au coût de plus de 20 millions$, la production, qui peut atteindre 30 000 tonnes métriques par année, est complètement stopée, sans que M. Noël puisse préciser à quel moment elle reprendra. «Vous pouvez me dire, vous, à quel moment la crise va se résoudre?», questionne-t-il, illustrant la période d’incertitude actuelle.