Beaux, jeunes… et échangistes
Oubliez la scène diffusée à profusion où une dizaine de baby-boomers bedonnants, nu et menottes aux poignets, étaient arrêtés au club échangiste «L’Orage», à Montréal en 1998. L’échangisme, en 2011, a un nouveau visage: il est jeune, éduqué, de belle apparence et se dit plus épanoui que jamais!
«Au début de notre relation, moi et ma conjointe, nous étions des personnes plutôt jalouses, souvent en train de douter de l’autre. Après sept ans d’échangisme, on peut dire que jamais nous n’avons ressenti autant de complicité entre nous! On se sent véritablement comme une équipe, un peu comme des meilleurs amis qui s’aiment profondément», explique d’entrée de jeu François*, un homme d’affaires de 33 ans.
«C’est certain que lorsqu’il m’en a parlé initialement, j’étais un peu réticente. J’avais peur d’être jalouse de le voir toucher à une autre fille», note pour sa part Daphnée*, une universitaire de 27 ans.
«Alors, on en a parlé très longtemps, de long en large, de tout ce que ça impliquait au niveau émotif et physique», dit-elle.
Une bisexualité avouée
«Je ne me cacherai pas que faire du sexe avec un autre couple était un fantasme pour moi, mais c’était aussi pour assouvir la curiosité de Daphnée. Je sentais qu’elle aurait du plaisir avec une femme et je savais qu’elle fantasmait sur l’idée, mais la gêne l’empêchait de le dire ouvertement et de passer à l’acte», raconte l’homme d’affaires.
Ainsi, François et Daphnée se sont donc entendus sur leur limite.
«Nous avons parlé de notre définition de l’amour et du sexe pour s’assurer que nous étions sur la même longueur d’onde», dit François.
Lorsqu’ils passeraient à l’acte, si quelque chose clochait, ils arrêteraient tout sans poser de question, ni insister pour le refaire une deuxième fois.
«C’est une règle, une obligation que de respecter l’autre, parce que c’est la base. Sinon, l’échangisme, ou la conception que l’on en a, perdrait tout son sens. Nous, on le fait pour s’épanouir ensemble. Pas pour s’éloigner et créer des conflits», affirme-t-il.
Escorte et cyberespace
La première fois qu’ils ont inclus une autre personne dans leurs relations sexuelles, ils ont sollicités les services d’une escorte dans une chambre d’hôtel.
«Ça faisait d’elle une personne neutre: on ne la connaissait pas et nous ne la reverrions jamais», explique la jeune femme.
Après cette expérience, ils se sont mis à la recherche d’une femme seule consentante sur des sites web de rencontre.
«Nous nous sommes rapidement rendu compte que des femmes seules qui veulent vivre des expériences sexuelles avec des couples, ça n’existe pratiquement pas! Ce sont toujours des faux profils, des arnaques. Alors, nous avons opté pour rencontrer un couple», se souvient François.
Selon eux, ces sites accueillent des centaines d’utilisateurs libertins de tous les âges et de toutes les professions.
«Il y des gens qui œuvrent dans le secteur de la santé, de l’éducation, de la vente, etc. Mais règle générale, les gens recherchent toujours des personnes dans leur tranche d’âge», souligne Daphnée.
Le tout se déroule comme sur un forum de discussions habituel.
«Certains ouvrent leur webcam et parlent entre eux, d’autres demeurent plus discrets et ne font qu’écrire. À partir de ce moment-là, on cible des couples potentiels et on échange nos courriels, puis nos numéros de téléphone. Finalement, on se parle de nos limites. Par exemple, certains couples ne veulent pas avoir de relations complètes avec l’autre couple, seulement entre eux. Alors si l’on pense que ça peut cliquer, on se donne rendez-vous pour souper ensemble chez l’un ou l’autre des couples», ajoute-t-elle.
Une soirée échangiste
Les soupers se déroulent de façon intime et respectueuse, estime Daphnée.
«Pour notre part, on peut affirmer que ce n’est pas un univers où les gens prennent des drogues ou consomment de l’alcool à outrance. Souvent, on ouvre une bouteille de vin et c’est tout», dit-elle.
Pendant le repas, il faut être alerte aux signes, dit-elle. «Ça se peut que ça ne fonctionne pas, qu’il ne se passe rien et il ne faut pas en faire tout un plat. Les personnes libertines sont souvent très ouvertes et amicales. Alors, si aucune avance ou allusion n’est faite, ou si aucun petit geste ne démontre un intérêt envers l’autre couple, on finit le souper poliment et on quitte tout simplement», explique Daphnée.
«Si au contraire, ça clique, on peut passer au salon, par exemple. À partir de ce moment-là, des rapprochements peuvent survenir dans un cadre établi et toujours avec les protections adéquates. Parce qu’on ne fait aucun compromis là-dessus, jamais», assure François.
Des amitiés chères
À ce jour, Daphnée et François ont rencontré six couples libertins et ont revu certains à plus d’une reprise. Quelques-uns sont même devenus de très bons amis.
«Ce que je retiens de nos expériences, au-delà du plaisir sexuel, c’est la complicité et les amitiés que nous avons développé avec des gens qui pensent comme nous», croit l’homme d’affaires.
«En ce qui me concerne, même si j’ai de petits défauts, je ne me suis jamais sentie aussi belle et désirée. Je suis beaucoup plus confiante aujourd’hui. Et en plus, je crois aussi que l’on s’est fait des amis qui nous sont chers avec qui l’on a plus rien à cacher!», conclut la jeune femme.
*Noms fictifs