Violences faites aux femmes: 12 jours pour sensibiliser

Les 12 jours d’action contre les violences faites aux femmes se déroulent du 25 novembre au 6 décembre à travers le ­Québec. Ces journées de sensibilisation prennent une autre ampleur cette année devant l’importante hausse du nombre de féminicides dans la province dans la dernière année.

«  ­La hausse est effarante, lance ­Joanne ­Blais, coordonnatrice de la ­Table de concertation du mouvement des femmes de la ­Mauricie. Il faut particulièrement se poser des questions comme société sur ce qu’on peut faire pour freiner ce type de violence envers les femmes. Il faut prendre conscience de tous les types de violence dont sont victimes les femmes, notamment les femmes racisées et autochtones.  »

«  ­On peut avoir l’impression que les féminicides qui se sont produits sont loin de nous, mais il s’en est aussi produit dans de petites villes, ­rappelle-t-elle. Il ne faut pas attendre que ce soit rendu dans notre région pour agir. On ne veut pas que le prochain féminicide soit chez nous…  »

Depuis le déconfinement du printemps 2020, le signalement des cas de violence conjugale est reparti à la hausse.

À la maison d’hébergement ­La ­Séjournelle, la hausse des demandes est inquiétante. Alors que le nombre de demandes d’hébergement s’était élevé à 214 en 2019‑2020, la directrice générale de l’organisme, ­Denise ­Tremblay, s’attend à passer le cap des 350 demandes cette année, si la tendance se maintient.

«  Ça ne m’étonne pas. On avait prévu une hausse. En 2020, pendant le confinement, les femmes ne pouvaient pas demander de l’aide, car elles étaient confinées avec le conjoint. C’était inquiétant. En avril, mai et juin 2020, le téléphone avait arrêté de sonner, mais on savait que ça repartirait lorsqu’il y aurait des assouplissements. Et c’est reparti  », raconte ­Denise ­Tremblay.

«  C’est la pointe de l’iceberg, ­ajoute-t-elle. On travaille beaucoup à créer des ­non-événements. Il y a des situations où il y a du danger pour la femme et les enfants et on réussit à mettre des gens en protection ou à mettre en place des mesures pour les sécuriser pour faire en sorte que ça ne se retrouve pas dans le journal pour de tristes raisons. Un conjoint suicidaire, c’est aussi un conjoint dangereux dans les cas de violence conjugale. Il faut aussi s’occuper du conjoint, ne pas le laisser isolé.  »

Les formes de violence sont multiples : violence psychologique, violence sexuelle, contrôle social, menaces…

«  ­La violence conjugale est l’ensemble d’une multitude de tactiques visant à contrôler sa conjointe. Ce sont des tactiques de contrôle physique et de menaces directes. Si tu pars, il va t’arriver ceci. La femme se fait également constamment rabaisser, subit du langage ordurier. Le contrôle social est très important pour un conjoint violent. Les deux façons d’instaurer un contrôle, c’est par le contrôle financier et de limiter ses contacts à l’extérieur du domicile  », explique ­Mme ­Tremblay.

Agir en prévention

Denise ­Tremblay et ­Joanne ­Blais s’accordent sur le fait qu’il importe d’agir en prévention auprès des jeunes afin de sensibiliser cette génération aux différents types de violences et de leurs impacts.

«  ­Je pense qu’il faut s’occuper de nos jeunes, de leur éducation, pour en arriver à une société plus égalitaire dans un ensemble de champs. L’éducation est une clé. Je travaille à ­La ­Séjournelle depuis plus de 35 ans. On a fait des pas énormes, mais il faut répéter les programmes de prévention et éduquer les jeunes, insiste ­Mme ­Tremblay. C’est une responsabilité collective, pas seulement des victimes et du système judiciaire.  »

Dans le même esprit, la ­Commission scolaire du ­Chemin-du-Roy, la ­Maison de ­Connivence et la ­Police de ­Trois-Rivières collaborent dans le cadre du ­Projet ­XOX pour sensibiliser les élèves de secondaire 4 aux situations de violence conjugale. Au printemps dernier, 27 classes avaient été visitées à ­Trois-Rivières. La ­Maison de ­Connivence a commencé à sensibiliser les jeunes à la violence conjugale il y a environ huit ans, une sensibilisation qui a pris plusieurs formes.

Dans une précédente entrevue, la directrice de l’organisme, ­Sabrina ­Bernier, confiait sentir un impact depuis. «  À l’école des ­Pionniers, la psychoéducatrice me disait que deux ans après un atelier, les jeunes s’en souviennent. On voit que ça les aide dans leur réflexion, confiait ­Mme ­Bernier. Il n’y a pas d’âge à la violence conjugale. Il n’est pas rare qu’on aille rencontrer des jeunes femmes qui vivent de la violence dans leur relation amoureuse. Parfois, il y a des choses qu’on peine à croire, des choses qu’on n’imaginerait pas un garçon de 14, 15 ou 16 ans faire vivre ça à quelqu’un . Il y a un apprentissage derrière ça. Je trouve que notre présence dans les écoles est super importante.  »

«  C’est important de travailler en amont auprès des enfants, de les éduquer sur les rapports égalitaires pour venir diminuer le risque de violence à partir de la source. Le système en place qui a été érigé engendre des inégalités entre les hommes et les femmes, ainsi que pour d’autres secteurs identitaires. C’est de là que naissent les violences, de ce rapport inégalitaire  », précise ­Joanne ­Blais.

La ­Police de ­Trois-Rivières entend également agir davantage. Devant la hausse de 17,3 % des infractions reliées à la violence conjugale en 2020, l’organisation a annoncé l’embauche d’un agent dont le rôle sera de travailler en prévention de la violence conjugale. L’agent travaillera notamment en collaboration avec les maisons d’hébergement et les autres partenaires du territoire pour améliorer l’offre de service en la matière.

Dans les trois prochaines années, la ­TCMFM travaillera sur un projet visant la lutte contre les violences envers les femmes. L’exercice permettra notamment de travailler en prévention et en intervention sur le terrain auprès de différents intervenants, dont le milieu du travail.

«  ­On veut voir comment dénouer certains problèmes bien ancrés pour amener des prises de conscience dans la société, ici dans la région  », conclut ­Mme ­Blais.

Des ressources pour aider les femmes victimes de violence

• CALACS de Trois-Rivières: 819 373-1232

  • CALACS Entraid’action de Shawinigan: (819) 538-4554

• SOS Violence conjugale: 1 800 363-9010 // sosviolenceconjugale.ca/fr

• Les Centres des femmes de la Mauricie: Femmes de Mékinac (418 289-2588), Centre des femmes L’Héritage (819 228-8421), Centre de femmes de Shawinigan: 819 537-4277)

• Centre de santé des femmes de la Mauricie : 819 378-1661

• CIUSSS de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec

• Maisons d’hébergement pour les femmes victimes de violence conjugale: Le FAR (819 378-2990), La Séjournelle (819 537-4181), Maison de Connivence (819 379-1011), Toit de l’amitié (819 523-7829) et Maison Asperimowin (819 523-8600)