UQTR: Une méthode verte pour fabriquer des médicaments
C’est avec beaucoup d’émotions qu’Isabel Desgagné-Penix annonçait ce mercredi l’obtention d’une nouvelle Chaire de recherche du Canada, une deuxième chaire en quelques mois seulement pour la professeure et chercheure. Cette fois-ci, la chercheure se penchera sur le métabolisme spécialisé végétal.
Isabel Desgagné-Penix est également devenue titulaire de la Chaire de recherche sur l’ingénierie métabolique des microalgues en juillet dernier. Elle souhaite utiliser à nouveau les microalgues, mais cette fois pour synthétiser des molécules végétales employées dans la fabrication de médicaments.
En effet, Mme Desgagné-Penix souhaite comprendre comment certaines plantes fabriquent des molécules pharmaceutiques, afin d’implanter ensuite la « recette » dans des microalgues pour une production de médicaments à grande échelle.
« Une fois que nous aurons trouvé le mode de fabrication d’un alcaloïde, nous l’implanterons dans des microalgues pour qu’elles puissent produire elles-mêmes cette molécule. Contrairement aux plantes, qui ne fabriquent que de très petites quantités d’alcaloïdes, les microalgues sont des bio-usines performantes. Leur biomasse double toutes les 48 heures », précise la professeure Desgagné-Penix.
Outre qu’elles sont des hôtes intéressants pour reproduire la synthèse d’une molécule d’origine végétale, les microalgues contribuent aussi à la réduction des gaz à effet de serre par la photosynthèse. De plus, une fois les alcaloïdes extraits de la biomasse algale, cette dernière peut servir à la production, entre autres, de biocarburants ou d’aliments.
Des médicaments d’origine végétale
« Près de 60 % des médicaments actuellement utilisés dans le monde sont d’origine végétale. Pourtant, il reste encore beaucoup à faire pour découvrir de quelle façon les plantes médicinales synthétisent des molécules pharmaceutiques », explique la professeure Isabel Desgagné-Penix, titulaire de la Chaire et experte mondiale du métabolisme des plantes.
« Pour notre part, nous concentrons nos recherches sur les Amaryllidacées, une famille de plantes comprenant notamment les narcisses et les jonquilles », poursuit-elle.
Les différentes espèces d’Amaryllidacées produisent des alcaloïdes, une classe de molécules souvent utilisées comme médicaments anticholinergiques, analgésiques ou anticancéreux. L’équipe de la Chaire travaillera à comprendre quels sont les acteurs (gènes, enzymes, etc.) et les mécanismes intervenant dans la fabrication de ces alcaloïdes. Les chercheurs s’intéresseront entre autres à la galanthamine, un alcaloïde servant notamment à traiter les symptômes de la maladie d’Alzheimer.
« En plus de bénéficier à la communauté scientifique, les résultats des travaux de la Chaire vont permettre de mieux comprendre comment faire des médicaments afin d’en développer des dérivés, donc de modifier un petit peu la recette pour avoir des médicaments soit d’activité plus forte, soit d’activité nouvelle comparativement aux molécules originales », ajoute la chercheure.
Chaire de recherche du Canada
Le professeur Hugo Germain, proche collaborateur d’Isabel Desgagné-Penix, explique que le programme de Chaire investit pour attirer et retenir un groupe diversifié de chercheurs de premier ordre afin de consolider l’excellence de la recherche au Canada.
« Les titulaires de chaires du Canada sont considérés par leurs pairs, et ça, c’est très important, parce que ce n’est pas l’UQTR ou les chercheurs québécois qui choisissent de remettre une Chaire du Canada à Isabel, mais ce sont les experts de son domaine au Canada qui considèrent qu’elle est une chef de file et une pionnière dans son domaine », explique son collègue.
« La Chaire de recherche du Canada, elle est différente; c’est de la recherche plus fondamentale et qui me tient vraiment à cœur », mentionne Mme Desgagné-Penix avec beaucoup d’émotions.
En plus de la reconnaissance de ses pairs, Mme Desgagné-Penix n’a reçu que de mots élogieux lors de l’attribution de la Chaire de recherche du Canada, dont ceux du recteur de l’Université du Québec à Trois-Rivières, Daniel McMahon.
« En juillet, je félicitais Isabel et je la remerciais d’oser penser en dehors du cadre, et je le réitère. Tu es une chercheuse de très haut calibre et une personne fort impliquée en plus de tes travaux scientifiques. […] Non seulement tu fais honneur à l’Université et à tout le monde, mais toi tu sais surprendre », lance-t-il fièrement.
« La meilleure au monde, elle est ici. »