Train à grande fréquence: investissement de 71,1 M$ pour une équipe de projet

Une autre étape a été franchie ce matin dans le projet de train à grande fréquence (TGF). Bien qu’aucun oui définitif en faveur du projet n’ait été déterminé, le gouvernement du Canada et la Banque de l’infrastructure du Canada investissent conjointement 71,1 M$ dans la mise sur pied d’une équipe de projet.

Cette équipe, qui sera établie grâce à la part de la Banque de l’infrastructure du Canada de 55 M$,  sera basée à Montréal et regroupera des experts de la Banque de l’infrastructure du Canada, ainsi que de Via Rail.

Au cours des 18 à 24 prochains mois, cette équipe finalisera les travaux juridiques et règlementaires liés aux évaluations de la sécurité et de l’environnement, consultera les intervenants et les communautés autochtones et examinera l’acquisition des terrains et des voies ferrées nécessaires. Une étude d’impact environnemental sur les 830 km du tracé doit aussi être effectuée.

Par ailleurs, l’équipe aura aussi le mandat de réaliser l’analyse technique, financière et commerciale nécessaire à la décision d’investissement finale d’un TGF dans le corridor Québec – Toronto.

Les 16,1 M$ restants du financement iront à Transports Canada et à Via Rail pour, entre autres, financer les travaux techniques visant à assurer l’interopérabilité du TGF avec les voies utilisées par les fournisseurs de transport en commun locaux et régionaux à Montréal et à Toronto, comme le système de train léger du réseau express métropolitain (REM).

Cette phase importante des travaux préliminaires doit être entreprise pour que les réseaux ferroviaires différents puissent se complémenter si le train à grande fréquence venait à voir le jour.

«Il faut aussi établir l’acceptabilité sociale du projet sur les 830 km. Il faut dire que le train traverserait plusieurs régions densément peuplées. C’est un projet de calibre mondial soucieux de l’environnement et des Premières Nations. Dans le contexte de pénurie de main-d’œuvre, c’est aussi un projet qui s’inscrit dans une grande mobilité. L’annonce d’aujourd’hui est aune approche concrète et réaliste pour que le projet puisse aller de l’avant», souligne François-Philippe Champagne, ministre de l’Infrastructure et des Collectivités et député de Saint-Maurice – Champlain.

Un projet prometteur

«Le projet de train à grande fréquence est prometteur, surtout qu’on assiste à une augmentation de l’achalandage dans le corridor Québec – Toronto. Au total, 80% des passagers canadiens circulent sur ce tracé.  Le TGF profiterait d’une infrastructure qui existe déjà comme les gares, des voies sous exploitées et de nouvelles voies dédiées. On vise à créer un nouveau réseau de transport avec une nouvelle flotte moderne et efficace. Ça signifierait aussi une réduction d’émission de gaz à effet de serre comparable à la suppression de 2,3 millions de voitures des routes pendant un an», explique Cynthia Garneau, présidente et chef de la direction de VIA Rail Canada.

Ces dernières années, 11 M$ ont été investis dans l’analyse de l’impact qu’aurait le projet de TGF pour les communautés entre Québec et Toronto. Cette étude servait essentiellement à déterminer si les gens prendraient le train et l’intérêt de la part du marché des investisseurs face à un projet du genre.

«Le signal est très encourageant et nous sommes très encouragés par ce changement dans le mode de vie par rapport à la mobilité. Avec l’étape annoncée aujourd’hui, on s’assure de l’interopérabilité avec le REM, ce qui était crucial», remarque Marc Garneau, ministre des Transports du Canada.

Bien que le signal soit encourageant, rien ne garantit que le projet voie le jour au terme de l’exercice.

«On a l’obligation de faire nos devoirs et de prendre une décision réfléchie. L’action d’aujourd’hui est un signal encourageant, mais il y a encore une décision à prendre», précise M. Garneau.

«Il n’y a pas de grand projet sans bureau de projet, poursuit François-Philippe Champagne. Il faut se mettre dans le contexte que le projet s’étend sur plus de 800 km. Là, on entre en phase de préconception et non d’étude. On a plus avancé en trois ans qu’en trois décennies.»

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Une nouvelle accueillie avec positivisme

Plusieurs intervenants du milieu économique et politique de la ville de Trois-Rivières ont assisté à l’annonce de cette nouvelle étape.

Pour le maire Jean Lamarche, faire intervenir la Banque de l’infrastructure du Canada dans le projet démontre le sérieux de la démarche. «Je suis très heureux de voir l’ampleur de ce bureau de projet. C’est une étape nécessaire à la concrétisation du train. Par ailleurs, de savoir qu’on est peu à faire partie du projet concrètement sur la rive-nord, c’est l’un des facteurs favorables à considérer. Les choses avancent.»

De son côté, la nouvelle présidente de la Chambre de commerce et d’industries de Trois-Rivières (CCI3R) a accueilli cette nouvelle de façon très positive. «Enfin, le train est en marche. C’est une étape charnière et important. Je me dis que s’ils prennent le temps d’investir 71 M$ pour passer à une prochaine étape dans le dossier, on peut être encouragé et croire qu’on l’aura notre train à grande fréquence», note-t-elle.

«Comme représentant du milieu des affaires, surtout du milieu industriel, c’est une excellente nouvelle pour la mobilité des employés potentiels et des étudiants. On ne peut pas rêver d’un meilleur moment pour l’annoncer. Et avec l’éclosion de l’OPEN, c’est fantastique! Les autorités ministérielles nous ont toujours dit que le projet était toujours en cours et ça vient nous le confirmer ce matin», ajoute Mario de Tilly, directeur général d’Innovation et développement économique de Trois-Rivières.

Des sentiments partagés pour Robert Aubin

Le député de Trois-Rivières à la Chambre des communes, Robert Aubin, concède qu’une étape importante est franchie avec la création de l’équipe de projet, mais cette annonce le laisse avec des sentiments partagés.

«Ça reste qu’au bout du processus amorcé, il n’y a aucune garantie formelle que le projet aura lieu. Ça nous repousse loin dans les délais. Le bureau de projet doit faire son travail pendant 18 à 24 mois. En espérant une réponse favorable, le projet prendra quatre ans de plus. De passer de l’étude théorique à la mise sur pied d’un bureau de projet, il y a un pas, mais on est loin de la coupe aux lèvres. C’est n’est pas l’annonce que les Trifluviens attendaient ce matin», critique-t-il.

M. Aubin rappelle aussi qu’il n’y avait aucune ligne sur le projet de train à grande fréquence dans le dernier budget libéral.

«Tous les moyens d’interpellation parlementaire ont été utilisés pour poser des questions au gouvernement. Le gouvernement aurait pu investir lui-même. J’ai toujours milité pour un financement public. Je ne peux pas m’empêcher de penser que les élections s’en viennent. Aux élections, les gens pourront se prononcer sur la valeur du projet et sur le mode de financement qui assurerait à l’usager un meilleur coût. Il semblerait plus facile pour le ministre Morneau d’investir 4,5 milliards dans un pipeline que pour le ministre Garneau d’investir le même 4,5 milliards dans un projet structurant pour les collectivités résidant dans le corridor le plus densément peuplé au Canada.», conclut-il.

«On ne croit plus aux Libéraux»

Yves-François Blanchet, chef du Bloc Québécois, a accueilli froidement l’annonce d’investissements par le gouvernement Trudeau concernant le projet de train à grande fréquence entre Québec et Toronto.

«Les libéraux ont promis de réaliser le train à grande fréquence en 2015. Ils ont passé quatre ans à prétendument étudier le projet et aujourd’hui, ils annoncent qu’ils vont investir…dans des études. C’est une autre annonce creuse du gouvernement Trudeau à la veille des élections. On ne croit plus les libéraux », a dénoncé M. Blanchet.

« Après 25 ans de discussions, on est encore loin de voir le train à grande fréquence se réaliser en Mauricie. Les ministres se sont de toute évidence déplacés ce matin pour faire une annonce dilatoire afin de pouvoir prétendre qu’ils ont fait quelque chose pendant leur mandat. Mais il n’y a rien dans ces ʺtravaux exploratoires supplémentairesʺ de plus sérieux que le renouvellement d’une promesse électorale de 2015 brisée par les libéraux. C’est le développement économique de la Mauricie qui continuera de souffrir de la négligence de ce gouvernement déconnecté des priorités du Québec», a conclu Yves-François Blanchet.