«Sur les traces de Cédrika Provencher»: la quête de vérité de Stéphan Parent
Depuis juin 2015, Stéphan Parent a été «le gars qui filme», pour reprendre ses propres mots. Il a travaillé pendant plusieurs années sur un documentaire retraçant l’enlèvement de Cédrika Provencher et sur l’enquête qui en a découlé. Après avoir dû mettre son projet de documentaire sur la glace, il a eu l’opportunité de coucher en mots son témoignage dans le livre «Sur les traces de Cédrika Provencher | Le parcours d’un homme en quête de vérité».
De «gars qui filme», Stéphan Parent est devenu le gars qui écrit. À travers son témoignage, on suit les étapes de la conception de ce documentaire qui ne sera pas rendu public. Il raconte les témoignages de témoins nouveaux qu’il a recueillis, rappelle les faits entourant ce triste événement et met en doute certains pans de l’enquête qui a suivi la disparition de Cédrika Provencher, ce soir de juillet 2007.
«Le projet est arrivé par hasard, confie Stéphan Parent. La maison d’édition m’a contacté pour me dire qu’elle était intéressée à faire quelque chose sur l’histoire de Cédrika et de parler du documentaire dans le livre. Je n’étais pas chaud à l’idée, considérant la façon dont tout ça s’était terminé. J’y ai réfléchi pendant deux jours. Je leur ai offert un compromis: j’étais prêt à raconter cette expérience de l’intérieur, relater les témoignages que j’avais reçus et les impacts que tout cela a eus après coup.»
Cela devenait également une façon de faire en sorte que son travail ne tombe pas dans l’oubli. Le livre amène d’ailleurs quelques éléments nouveaux, comme ce témoignage d’un camionneur qui raconte avoir vu une voiture rouge devant la clôture du boisé de Saint-Maurice, où ont été retrouvés les ossements, tous les matins durant les deux semaines suivant l’enlèvement de Cédrika Provencher.
L’auteur s’est aussi entretenu avec l’amie de Cédrika qui se trouvait avec elle lorsqu’elles ont été abordées par un homme cherchant son chien dans un boisé près de la rue Chapais, ainsi qu’une autre dame qui se souvient avoir vu un véhicule suspect, rouge, dans le secteur pendant plusieurs jours consécutifs.
«J’ai aussi discuté avec une femme qui dit avoir trouvé un objet appartenant vraisemblablement à Cédrika au moment de sa disparition. Ça n’a jamais été vérifié. Ce n’est qu’à la découverte des ossements, une fois la neige fondue en juin 2016, que les policiers ont retrouvé l’objet en question. La dame m’a dit qu’elle avait contacté les policiers à l’époque», raconte Stéphan Parent.
M. Parent revient aussi sur la saga judiciaire qui a impliqué, plus récemment, Jonathan Bettez, et son acquittement des accusations de possession de pornographie juvénile en raison de l’arrestation illégale, sans mandat, dont il a été la cible.
Vers une réflexion?
Avec une écriture franche et sans détour, l’auteur plonge également dans l’émotion, de ce qu’il a éprouvé en rencontrant les nouveaux témoins jusqu’à ce moment de décembre 2015 où il discutait avec Henri Provencher quand ce dernier a reçu l’appel à la fois espéré et redouté annonçant que la police avait retrouvé des ossements appartenant à un enfant, peut-être Cédrika. La nouvelle se confirmera plus tard ce soir-là.
«Je n’ai pas trouvé facile de passer de la réalisation à l’écriture. Je me suis dit que je raconterais l’histoire comme je l’ai vécue de mes tripes, un peu comme si j’écrivais mon documentaire sur papier. J’ai aussi voulu y amener un côté plus humain, plus émotif», indique M. Parent.
Il espère maintenant que ce livre puisse amener une réflexion, des débats et des changements dans la société, que ce soit dans les services policiers, dans les médias et auprès de tous ceux qui ont suivi le dossier de près.
«Les policiers ont fait un gros travail, mais il faut parler de ce qui a fonctionné et de ce qui n’a pas fonctionné dans l’enquête et faire les mises en contexte qui s’imposent. Il y a des réflexions à avoir, des questions à poser, plaide M. Parent. Comment l’information est-elle transmise à la police? Est-elle filtrée avant de se rendre aux enquêteurs? J’ai aussi trouvé le rapport de Me Guy Bertrand très intéressant, notamment cette idée de nommer un procureur indépendant pour des cas comme celui-là et d’avoir une centrale où toute l’information en lien avec le dossier serait colligée.»
Pour ne pas oublier
C’est aussi la quête de la vérité autour de l’enlèvement et le meurtre de Cédrika Provencher qui a motivé Stéphan Parent à écrire ce livre.
«J’ai beaucoup hésité à faire ce livre. J’ai décidé de le faire pour la cause. Pour parler de Cédrika. Je considère que le Québec est en retard dans le traitement des dossiers non résolus. Un shérif américain me racontait qu’aux États-Unis, la police passe par les médias pour diffuser des informations afin de permettre au public d’appeler et de donner certains détails. Ça garde le dossier vivant. Un prédateur sexuel veut le silence. Ça contribue à mettre du stress sur le coupable», explique-t-il.
«Il ne faut pas que l’histoire de Cédrika Provencher soit oubliée. C’est important de la garder vivante. La société change, les gens oublient. Il ne faut pas qu’elle soit morte en vain», conclut-il.
Le livre Sur les traces de Cédrika Provencher sera en librairie à compter du 9 octobre.