Retourner à l’emploi après une incarcération, c’est possible
DOSSIER. Passer quelques années dans un établissement de détention et regagner le marché du travail ne se fait pas en claquant des doigts. Les détenus, lors de leur passage en milieu carcéral, doivent être bien entourés afin d’être le mieux outillés possible au moment de leur sortie.
Gaby Lauzière en sait quelque chose. Depuis 11 ans, elle est conseillère en emploi en milieu carcéral à l’établissement de détention de Trois-Rivières.
Elle travaille plus précisément pour le Service d’intégration à l’Emploi Radisson (SIER), une «branche» de la Maison de transition Radisson, qui aide les gens judiciarisés ou qui ont des problèmes de consommation à retourner vers le marché du travail ou la formation.
«Mon rôle est vraiment d’aider les personnes incarcérées à retourner sur le marché du travail. Je travaille principalement la pré-employabilité, puisque je ne peux pas envoyer les détenus faire des entrevues», soutient Gaby Lauzière, dont le bureau est situé à même l’établissement de détention.
«Il faut dire d’entrée de jeu qu’une entente interministérielle entre le ministère de la Sécurité publique et le ministère de l’Emploi a été signée il y a plusieurs années, précise-t-elle, obligeant tous les établissements de détention à avoir un service d’aide à l’emploi, avec un conseiller sur place.»
Une approche volontaire… en demande
Le service dispensé par Gaby Lauzière est volontaire. Autrement dit, les détenus ne sont pas tenus de la rencontrer. «Ils viennent s’ils le veulent. Personne ne les y oblige.»
Les hommes incarcérés peuvent approcher le SIER en début de sentence. «Pourquoi j’en ai moins en début de sentence? Parce que j’ai une demande importante, et donc, une liste d’attente. Afin de voir le plus de gens possible, je mets la priorité selon la date de sortie des détenus; plus la date de sortie est proche, plus c’est prioritaire», souligne Mme Lauzière.
Théoriquement, l’intervenante doit accueillir 75 personnes par année.
«Ça, c’est le nombre qui s’inscrit, qui utilise le service et qui participe à des rencontres avec moi, mentionne-t-elle. Mais au total, je reçois entre 150 et 200 personnes par année dans mon bureau, qui viennent parfois juste pour une information ou une question.»
Une démarche en différentes étapes
Gaby Lauzière est claire: il n’y pas de recette magique et chaque cas est différent. Cela dit, certaines étapes reviennent systématiquement lorsqu’elle entreprend une démarche avec un participant.
«Évidemment, au début, je vais vérifier avec lui quels sont ses besoins. Ensemble, on va tracer son profil de travailleur en fonction de ses aptitudes, sa formation, ses expériences de travail, ses intérêts, ses valeurs, etc.», fait savoir la conseillère en emploi.
«Il y en a pour qui ça va bien et qui savent déjà ce qu’ils veulent faire en sortant. Dans ces cas-là, je les aiderai davantage avec le côté plus technique: rédiger un CV et une lettre de présentation, cibler des employeurs, etc., poursuit-elle. Par contre, d’autres arrivent en ne sachant même pas ce qu’ils feraient. Ils arrivent dans mon bureau en disant «Je veux travailler, mais je ne sais pas quoi faire.» Je vais donc les accompagner jusqu’à ce que la situation s’éclaircisse pour eux.»
Obtenir un emploi, c’est bien, le garder, c’est mieux
Dans le processus, Mme Lauzière leur montrera les techniques de recherches d’emploi et les aidera à devenir autonomes dans cette étape. «L’idée, c’est aussi de permettre au détenu de mieux se connaître lui-même. Parce qu’au fond, c’est bien de trouver un emploi, mais ce qu’il faut aussi, idéalement, c’est de le garder», croit l’intervenante.
Cette dernière ajoute que, sur l’aspect emploi, ses participants auront cheminé le plus possible avec elle pendant leur détention.
«Quand un gars est libéré, c’est lui qui décide ce qu’il veut. Parfois, à sa sortie, l’homme n’est pas rendu à se trouver un emploi immédiatement. Mais s’il l’est, je peux le référer à un service comme le mien, dans la région où il s’en va. S’il le désire, je peux aussi fixer un rendez-vous avec l’organisme en question, etc.»
Elle assure également qu’au moment d’un transfert dans un autre endroit carcéral, la démarche entreprise peut aussi se poursuivre.
Utiliser son temps d’incarcération positivement
Pour un détenu, il est possible d’utiliser son temps d’incarcération positivement pour préparer sa recherche d’emploi et son retour à l’emploi.
En effet, dans les détentions, il y a des formations, comme le français et les mathématiques de niveau secondaire. Plusieurs détentions offrent aussi des formations en santé-sécurité ou comme opérateur de chariot-élévateur, signaleur routier, etc.