Plainte non fondée à la DPJ : un drame familial évitable ?

POURSUITE. Une plainte non fondée à la Direction de la protection de la jeunesse a brisé une petite famille de la Mauricie. Le couple qui avait accueilli six enfants entre 2011 et 2013 s’est vu retirer de force son droit de garde. Cette comédie d’erreurs, dénonce la Fédération des familles d’accueil et ressources intermédiaires du Québec (FFARIQ), aurait pu être évitée.

L’histoire d’horreur a commencé lors d’un voyage en juin 2013. Le couple voyageait alors en compagnie de plusieurs autres familles d’accueil. C’est la responsable d’une de ces familles qui a déposé le signalement.

Selon la plainte enregistrée à DPJ, le couple de la Mauricie aurait privé les enfants de manger durant une longue période et s’en serait pris à eux verbalement. La plaignante n’en serait pas à son premier signalement. Au contraire, elle aurait déposé quatre autres plaintes plus au moins fondées par le passé.

Après plusieurs jours d’audiences et l’audition de plus de 30 témoins, le juge de la Cour du Québec a donné raison au couple. Dans son jugement rendu le 26 janvier 2015, il a d’ailleurs vivement critiqué le travail «bâclé» du centre jeunesse et le «manque de professionnalisme» dont a fait preuve la DPJ dans ce dossier.

On reproche aux intervenants de ne pas s’être assuré de la véracité des faits rapportés.

Le couple dont l’anonymat est requis par la Loi a aujourd’hui entamé des procédures judiciaires à l’encontre de la DPJ. La famille réclame 1,3 million de $ pour les traumatismes financiers et psychologiques qu’ils ont vécus, eux et les enfants.

L’un d’eux est une petite fille dont le couple avait la garde depuis qu’elle était âgée de 48 heures. 

Une loi inadéquate ?

LA FFARIQ, un syndicat qui se porte à la défense des droits des ressources en  familles d’accueil, soutient depuis le commencement les démarches de ce couple de la région. «Des dossiers comme celui-là, il y en a plusieurs. Et ce qui est épouvantable là-dedans, ce sont les impacts dévastateurs sur la stabilité des enfants déplacés », s’est désolé la présidente de la FFARIQ, Geneviève Rioux.

En deux ans, elle a dû intervenir dans au moins 12 autres cas semblables en région. Au total, ce sont quarante enfants qui ont dû porter sur leurs petites épaules les conséquences de ces drames familiaux. La plupart gardent encore des séquelles à l’âge adulte.

« Ces histoires d’horreurs sont symptomatiques d’un problème beaucoup plus grand », a révélé Mme Rioux. Selon la fédération, la loi actuelle n’est pas adéquate. Bien au contraire, celle-ci jouerait à un jeu très risqué avec la vie des enfants les plus vulnérables.

« Aujourd’hui, nous sommes en face d’une famille brisée par l’application d’une loi inadéquate. Pour certains des enfants placés depuis leur naissance, cette famille est la seule qu’ils n’aient jamais connue. Imaginez les séquelles d’un enfant de deux ans, arraché à sa mère du jour au lendemain », a lancé Mme Rioux.

Si la famille avait été consultée lors du processus d’enquête menée par la DPJ, croit cette dernière, les enfants n’auraient pas été déplacés.

Le cas du couple de la Mauricie est d’ailleurs l’un des dossiers qui ont amené la FFARIQ à revendiquer des amendements au projet de loi 99, présentement en révision. La fédération a déposé un mémoire, en septembre dernier, demandant que l’on accorde un «droit de parole» à une famille d’accueil qui a pris soin d’un enfant depuis au moins 6 mois.

Cela a déjà fait ses preuves en Ontario, où « une famille d’accueil a droit au statut de partie lors du processus judiciaire, si un enfant a été placé dans la ressource depuis au moins 6 mois ».

Au Québec, la Loi sur la protection de la jeunesse et d’autres dispositions (LPJ) stipule quant à elle que seules les parties reconnues par le tribunal peuvent être entendues. Les familles d’accueil n’en font pas partie. 

Revendications de la FFARIQ :

– D’avoir le droit au même avis d’instance qu’une partie

– d’avoir le droit d’être présente à l’audience

– d’avoir le droit d’être représentée par un avocat

– D’avoir le droit de présenter ses observations devant le tribunal

– Permettre que les familles d’accueil soient consultées avant qu’un enfant ne soit transféré d’un milieu de vie à un autre