« Même si on échoue, il faut se relever, prendre le taureau par les cornes et continuer »

Si un proche de Cloé St-Pierre lui avait dit, lorsqu’elle avait 14 ans, qu’elle aspirerait au doctorat en Psychologie, fort à parier qu’elle n’y aurait jamais cru. Mais aujourd’hui, Cloé en a parcouru du chemin et elle s’est relevée de brillante façon.

À 14 ans, Cloé n’excellait pas sur les bancs d’école et elle s’est retrouvée au cœur d’une relation de violence conjugale qui s’est avérée nocive en tout point. Voilà ce qui l’avait menée au décrochage scolaire.

« Mon chum avait tellement d’emprise sur moi qu’il s’est arrangé pour que je sorte de l’école. Le seul moment qu’il n’avait pas le contrôle sur moi, c’est lorsque j’étais à l’école. C’était parfait pour lui que je lâche les cours. Je me suis ramassée séquestrée là-bas et j’étais 24 heures sur 24 sous sa surveillance, avec lui », confie-t-elle d’emblée.

Quelques mois plus tard, la Trifluvienne se sortait de cette relation. Après avoir eu recours à des thérapies pendant plusieurs mois, elle a décidé de renouer avec les bancs d’école.

« Pendant mes nombreuses thérapies, je me découvert une passion pour la psychologie. Je réalisais que j’avais lâché l’école sans que moi, je veuille vraiment lâcher. Je me suis dit que je pourrais peut-être revenir faire de longues études et c’est là que je me suis informée pour un retour à l’école. Un de mes intervenants m’a référé le au Carrefour jeunesse-emploi (CJE) Trois-Rivières/MRC des Chenaux et j’ai fait partie d’une des premières cohortes de la classe-école, d’ailleurs », témoigne celle qui est maintenant âgée de 21 ans.

« J’ai eu un trouble stress post-traumatique suivant ma relation et ça aurait été anxiogène pour moi de me retrouver dans une grande école et de peut-être tomber sur lui ou sur un de ses amis. Je faisais beaucoup d’hypervigilance, de sorte qu’être entourée de beaucoup de personnes m’aurait amené à toujours analyser tout autour. Au CJE, ça me permettait d’être plus calme et les professeurs sont très compréhensifs alors je ne me sentais pas différente des autres parce que j’avais un trouble stress post-traumatique. Les professeurs s’adaptent également. De mon côté, j’ai dû m’absenter pour une période de quatre à six mois et ils m’ont laissé partir avant de m’accueillir de nouveau à bras ouverts. »

Depuis trois ans, le Carrefour jeunesse-emploi (CJE) Trois-Rivières/MRC des Chenaux offre l’École au CJE. Avant ça, les projets de retour à l’école ont toujours été offerts, mais le projet de classe demeurait un rêve qui est devenu réalité pour l’organisme trifluvien.

À son rythme, Cloé est actuellement en quête de son diplôme d’études secondaires. Ensuite, elle souhaite amorcer des études collégiales en Éducation spécialisée.

« Je ne vais pas m’arrêter là parce que je voudrais ensuite compléter des études en psychologie, donc faire un baccalauréat et un doctorat en Psychologie. Pendant mes études, je souhaite avoir un travail en intervention également. Je me suis rendu compte que j’aimais analyser l’être humain et essayer de toujours tout comprendre. Je me suis rendu compte que la psychologie était une passion et que c’est le sujet qui me donne toujours le goût d’en apprendre plus », explique-t-elle.

Il aura fallu sept ans avant que Cloé ne voie son ciel ennuagé faire place aux rayons de soleil. Aujourd’hui, elle se dit fière d’avoir repris le contrôle de sa vie.

« Ma plus grande fierté, ce serait de ne jamais avoir lâché. Peu importe ce qui arrive, nos objectifs sont fixés et je pense qu’une de mes plus grandes qualités, c’est que je vais continuer de faire des choses pour que je me sente mieux. Je vais continuer de faire du développement personnel et continuer de me comprendre. Je suis fière de n’avoir jamais lâché et de toujours savoir la foi en la vie, foi que j’avais perdue. »

« On regarde notre parcours et c’est le fun de montrer aux autres que c’est possible. Je pense que n’importe qui peut se raccrocher à quelque chose qui va le motiver et lui donner une vocation dans la vie. Ça va lui permettre de trouver son potentiel et sa place quelque part. Peu importe le temps que ça prendra », conclut-elle.

Mélyssa Champoux, future enseignante

La route des études secondaires fut tumultueuse pour Mélyssa Champoux, oscillant entre le bris de confiance en soi et l’intimidation. Laissant ses mauvais souvenirs derrière, elle a pris la décision de revenir en classe pour aller dénicher son diplôme d’études secondaires, et donc son laissez-passer pour rejoindre les bancs de l’université.

La Trifluvienne a pris la décision de mettre fin à ses études alors qu’elle était âgée de 16 ans.

« J’ai été victime d’intimidation de la part des étudiants, mais aussi de la part de professeurs. J’étudiais en Accès-DEP parce que j’avais de la difficulté en classe, surtout de la difficulté en mathématiques, ce qui m’a toujours nui. Un jour, une de mes enseignantes a placé tous mes cahiers de notes devant moi et elle m’a dit:  »Ta difficulté Mélyssa, on peut la comparer à une maison. Il y a la fondation, les murs et le toit. Toi, tu te situes au sous-sol alors je pense que tu serais mieux d’aller travailler (plutôt qu’étudier) » », se souvient-elle comme si c’était hier.

« Venant d’un enseignant, qui est supposé être un modèle, je me suis remise en question. Aussitôt que je me suis trouvé un emploi dans un magasin, j’ai lâché l’école. Je me disais probablement que si les professeurs ne croyaient pas en moi, j’allais travailler. J’y suis restée pendant dix ans. Puis un beau jour, il y a une de mes collègues à qui je disais que je voulais retourner à l’école et elle m’a parlé du CJE. Je suis arrivée ici et j’ai été accueilli comme si j’étais un membre de la famille. »

Or, ce n’est pas sans crainte que Mélyssa allait réintégrer l’école. De son propre aveu, elle redoutait ses futurs camarades de classe, ainsi que le professeur de mathématiques.

« Je pensais rester ici deux semaines et comme j’avais été victime d’intimidation dans le passé, j’étais vraiment stressée lorsque je suis rentrée dans la classe. Finalement, j’ai été bien accueilli et je me suis toute de suite dit que je serais bien ici. Ça fait deux ans maintenant, les enseignants ont toujours été super compréhensifs et je termine mon diplôme la semaine prochaine. Ensuite, je m’en vais à l’Université pour faire un baccalauréat en Enseignement parce que je veux devenir professeur d’anglais », lance-t-elle fièrement.

En magasin, Mélyssa a acquis non seulement des compétences et de l’expérience, mais une certaine sérénité. Aujourd’hui, elle ne peut qu’être fière d’avoir pris la décision de se raccrocher à ses études.

« Je suis fière de moi et aussi contente d’avoir déjoué des pronostics, si on veut, et de maintenant prouver à ceux qui ne croyaient pas en moi qu’ils se sont trompés. C’était caché au fond de moi et je n’étais jamais certaine d’être capable, mais lorsque je suis arrivée au CJE, j’ai tout de suite su que je serais capable. Je sais maintenant que lorsqu’on veut, on peut! », lance-t-elle.

« À tous ceux qui penseraient abandonner l’école, il ne faut pas abandonner, même si on a l’impression que notre vie n’est que d’échecs, car ce n’est pas vrai. Il y a toujours une lueur d’espoir. Même si on échoue, il faut se relever, prendre le taureau par les cornes et continuer », conclut-elle.