Légalisation du cannabis: les intervenants d’ici expriment leurs craintes

CANNABIS. À moins d’un an de sa mise en application, le peu de temps restant au gouvernement du Québec pour encadrer la légalisation du cannabis inquiète les intervenants de la Mauricie et du Centre-du-Québec. 

Par Matthieu Max-Gessler

 

Lors de leur présentation lors de la Consultation régionale sur l’encadrement du cannabis, plusieurs acteurs du domaine de la santé et des services sociaux de la région ont dit craindre que Québec ne soit pris de court. Certains demandent même au gouvernement de faire retarder la légalisation s’il sent qu’il a besoin de davantage de temps pour se préparer.

«On a la possibilité de le faire alors pourquoi ne pas faire quelques pas en arrière pour vérifier comment ça fonctionne ailleurs? Ensuite, on met nos pendules à l’heure et quand on arrive pour vraiment le faire, on est vraiment en position de bien le faire», préconise Lise Lebel, fondatrice de la Fondation Katerine Beaulieu.

Pour la Ministre déléguée à la Réadaptation, à la Protection de la jeunesse, à la Santé publique et aux Saines habitudes de vie, Lucie Charlebois, une telle avenue n’est toutefois pas envisageable. «On va s’arrimer avec les délais que le gouvernement fédéral va se donner, mais c’est sûr que le Québec va être au poste en même temps que les autres provinces», promet-elle. 

Éviter la banalisation

Les intervenants craignent particulièrement que cette loi ne banalise l’utilisation du cannabis et n’incite davantage de personnes à en consommer. Or, la substance, si elle devient légale à consommer, conserve ses effets négatifs potentiels.

«Le cannabis est loin d’être sans conséquences; sur le cerveau, le système respiratoire, il augmente les risques de troubles dépressifs et anxieux», rappelle Sylvie Lacoursière, du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec.

Mme Lacoursière estime par ailleurs que la population de la Mauricie est davantage vulnérable face aux dangers du cannabis en raison notamment des taux de décrochage et d’emploi inférieurs à la moyenne provinciale. Elle craint également que la banalisation de cette substance n’incite des gens à se présenter au travail en étant intoxiqués, ce qui serait particulièrement problématique dans le milieu de la santé.

Si la banalisation est une crainte partagée par l’ensemble des intervenants, ils croient qu’elle peut être contrée par des efforts accrus en sensibilisation et en prévention. Ces initiatives devront toutefois être menées de manière concertée entre le réseau public et les intervenants sur le terrain, notamment ceux du milieu communautaire, prévient Philippe Malchelosse, de l’organisme Point de rue.

«Peu importe la façon dont ce sera encadré, il est clair qu’il faut que le réseau public et le réseau communautaire travaillent main dans la main, même chose pour le milieu de l’éducation. Il faut définitivement que par le biais de cette loi, l’État oblige les gens à travailler ensemble», soutient-il. 

M. Malchelosse recommande également au gouvernement de réinvestir dans les soins et les interventions de première ligne.  

De nombreuses craintes

Une autre grande préoccupation portée devant la ministre Charlebois est la sécurité des enfants et adolescents. Plusieurs craignent que la plus grande accessibilité du cannabis n’en incite davantage à en consommer, alors que des études ont montré que la substance nuit au développement de leur cerveau. Pour cette raison, certains croient que la possession de plants de marijuana à la maison devrait être interdite, en particulier lorsque des enfants y habitent.

Les participants à la consultation ont également soulevé la question des risques de la conduite sous l’influence du cannabis et les règles entourant sa vente, notamment sur Internet, des aspects de l’encadrement sur lesquels ils croient que Québec devra impérativement se pencher.

Il est également possible de participer en ligne à la consultation, ce que déjà plus de 9000 personnes ont fait, selon la ministre Charlebois.