«L’austérité a saboté le réseau de services de garde éducatifs»

GARDERIES. Les éducatrices des Centres de la petite enfance (CPE) du Cœur du Québec ont dénoncé mercredi les impacts de la modulation des frais de garde (taxe familiale) sur le réseau des CPE, sur son personnel et sur ses usagers.

Rappelons que depuis le 22 avril 2015, le tarif fixé pour la fréquentation d’un service de garde subventionné inclut une contribution de base par jour, par enfant (7,55$), et une contribution additionnelle modulée selon le revenu familial.

Plus précisément, si le revenu familial est inférieur à 50 545$, il n’y a pas de contribution additionnelle à débourser. À partir de 50 545$, toutefois, le tarif augmente à 8,25$ par jour. Lorsqu’il atteint 75 820$, la contribution additionnelle augmente graduellement pour se situer à 20,70$ pour un revenu familial d’environ 158 820$. La contribution de base et la contribution additionnelle sont indexées annuellement.

Ces augmentations tarifaires poussent donc certains parents à se tourner vers le privé puisque pour eux, les remboursements d’impôts sont plus avantageux.  «Nous les comprenons: ils doivent faire le mieux pour leurs enfants avec les moyens dont ils disposent», indique Dominique Jutras, présidente du Syndicat régional des travailleuses et travailleurs en CPE du Coeur du Québec — CSN.

Or, cette migration engendre son lot d’impacts sur l’ensemble des travailleurs du réseau (éducatrices, responsable à l’alimentation, préposées…). Le syndicat parle de baisses d’heures, d’ajout de tâches et même d’abolitions de poste.

Et ce n’est pas tout: les enfants subissent, eux aussi, les effets des coupures, martèle l’organisation. «À cause de ces nouvelles règles, ils sont quotidiennement bousculés dans leur routine, car dès qu’il y a diminution de ratio, des travailleuses sont retournées à la maison.»

Dans pareille situation, ces enfants sont jumelés dans un autre groupe et certains peuvent vivre cette situation plus d’une fois dans la même journée, précise-t-on.

«Nous remarquons aussi que certaines directions sont dans l’obligation de créer des listes de rappel d’enfants pour réussir à remplir toutes les exigences de rendement du gouvernement. Le matériel abîmé n’est plus remplacé. Même le temps de qualité auquel chaque enfant aurait droit est limité dû à l’alourdissement des tâches des travailleuses. Nos groupes d’enfants de 4 ans se vident de plus en plus, puisque le gouvernement les dirige plutôt vers le préscolaire», déplore le syndicat.

Il ajoute que les 30 millions de dollars supplémentaires annoncés la semaine dernière par le gouvernement ne représentent qu’une goutte dans l’océan. «Il y a quelques semaines, le gouvernement nous annonçait fièrement qu’il arrivait à un surplus budgétaire de deux milliards de dollars. Alors, pourquoi nous exiger cette austérité qui a saboté notre réseau de services de garde éducatifs? (…) Le ministre Proulx affirme que les CPE sont importants dans le "développement global" des enfants de 0 à 5 ans et qu’ils facilitent la réussite éducative des enfants, alors pourquoi toutes ces coupes? Nous, les travailleuses des CPE du Coeur du Québec affiliés à la CSN pressons le gouvernement d’abolir la taxe familiale et de réinvestir massivement dans le réseau des services de garde éducatif.»

 

 

En complément

– De mars à octobre, pas moins de 4100 nouvelles places de garde ont été créées au Québec. Près de 75% de celles-ci ont été accordées dans des garderies privées non-subventionnées

– La modulation des frais de garde a fait en sorte que le gouvernement du Québec a engrangé 168M$ de plus. En revanche, le réseau des CPE a subi des compressions de 120M$.